Feuille de route

 

 

il n’y a plus personne ici, ou bien ? On s’essaye à faire des textes sur des personnages (ce sera le thème semble-t-il de l’été) (on avance en atelier comme en misanthropie, il en est ainsi et c’est tant mieux) tout est brûlé, oui

Alexander (Erland Josephson, un de mes alter ego – avec Gian Maria Volonte ou Stanley Baker) a foutu le feu , tu parles d’un sacrifice… (Andreï Tarkovski, 1986) 

« Nous nous sommes tant aimés » ce film magnifique (1974, Ettore Scola) C’eravamo tanto amati plus joli en italien, et puis on a cessé… Quelques semaines d’oubli, ou de pause de stase de fin, comme le clap… Le cinéma, tourner, tourner, tourner encore, le quartier est empli d’intermittents, on les voit à l’aube s’en aller à moto, appeler-touitter un krypto-taxi vitres fumées berlines à vomir valise à roulettes et bermuda à fleurs, on les entend le soir rire et chanter, quelque chose de l’amabilité – on fait ce qu’on peut toujours, je t’assure… – ou de l’horreur, c’est au choix.

Rien à faire, le temps passe.

 Paul Javal sur la terrasse, chapeau, ciel et mer.

Rien à faire, le livre magnifique qui met en scène le personnage principal, Rome, lu dans le métro, les rues tu te souviens via Veneto la banque, de l’autre côté de l’Aventin, l’autre comptoir, il y a du monde dans les souvenirs, il y a Fritz Lang (on sifflote, comme « M » en attendant qu’une petite fille passe…) il y a Sam Fuller « ahahah…!!! ça flatte mon ego…! »

il y a cette merveille-là

Pina (Anna Magnani)  « Rome Ville ouverte » (Roberto Rosselini, 1945)

l’Italie, on aimerait s’y installer, mais non, le temps passe, les ans s’effritent, le voyage en Belgique s’est bien passé merci, on avance en âge comme on se tourne vers des idées macabres

Patricia Franchini (qu’est-ce que c’est, dégueulasse ?) (Jean Seberg, « A bout de souffle », Jean-luc Godard, 1960)

fréquemment quand je prends le métro c’est un peu à elle (à d’autres aussi, les étrangers, les déplacés, les déchus) que je pense – ce sont des idées romantiques, ce sont des idées de Paris, la rue Campagne-Première ou le pont Neuf

  (je ne l’ai pas vu mais il est dans le petit carnet, à louer dvd : « Les amants du pont Neuf » (Léos Carrax, 1991) le type, Jean-Yves Escoffier qui fait l’image se trouvait un jour dans cette épicerie du faubourg Saint-Antoine (elle n’existe plus, il me semble qu’elle faisait le coin de la rue Saint-Bernard) et je l’ai pris pour un autre, il m’a serré la main, un sourire « Jean-Yves Escoffier » il a fait mais ce n’était pas lui, c’était quelqu’un d’autre , quelque chose comme un fantôme peut-être

le cinéma a cette grâce, on est assis dans l’ombre, le rouge des fauteuils n’existe plus (d’ailleurs ils sont bleu au Royal), sur l’écran une image qui vibre, cette musique-là (celle de Nino Rota pour Otto e mezzo, la ronde, cette autre merveille) et puis voilà, quand on sort il ne reste plus rien, que quelque chose dans la mémoire, il faut y retourner, on y va, viens on y va (les sièges, au 104 sont couverts de velours noir) on avance encore, c’est vrai tous les ans, on en prend un de plus (deux puissance six ce dimanche, tu avoueras…) (l’image ci-dessus, c’est l’un des neveux du réalisateur, « Homeland, Irak année zéro » (Abbas Fahdel, 2015) une autre merveille, ce garçon-là est mort à la guerre, tu sais…) ce n’est pas que la chance ne nous sourie pas, ce n’est pas non plus qu’elle accompagne chacun de nos pas ou de nos actes, non ce n’est pas ça. On n’a pas la prétention d’être superstitieux, non plus que celle de tenter quelque art divinatoire.

Je regarde cette maison (je suis désolé pour Sam Fuller, j’ai des choses à faire, je suis un peu pressé je changerai cette image (c’est fait), la poser aussi grande que les autres, allons) témoin de mon empathie pour le cinéma (je ne laisse pas tomber, non), je vais poser ça dans l’entrée (j’ai lu une feuille de route sur fenêtres et je l’ai trouvée à mon goût), et puis après le travail, tout à l’heure, j’irai voir soit le film de Schlöndorf soit le documentaire sur ce réalisateur afghan… Il fait tellement chaud, il fait tellement froid… Mieux vaut avancer

 

Post scriptum : cherchant cette image de Samuel Fuller, en train de diriger quelque chose comme « Les Maraudeurs attaquent » (Merill’s marauders ») (1962) ou « Quarante tueurs »(Forty guns » (1957), je découvre celle-ci

Sam en compagnie de Jim Jarmusch (ils étaient assez potes et c’est à peu près normal, vu que Jarmusch  est l’auteur d’un des plus beaux couples de cinéma qui puisse se voir (« Only lovers left alive » (2013)). Euh, moi non plus je ne vois pas bien le rapprochement, mais c’est certain qu’ils parlent du même point de vue, ces deux-là. 

2 réflexions au sujet de « Feuille de route »

  1. ahlala (pourquoi je pense à Maryse tout à coup ?)
    (je ne sais pas comment tu fais ça Pierre, mais merci)

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