A quoi on pense (où veux-tu en venir ?)

 

On vient ici le mercredi, une sorte d’habitude  – mais le rédacteur est un homme d’habitude, c’est une façon – celle qu’il a trouvée – de mettre un terme à une espèce de peur, d’angoisse, de crainte, de sursaut : il ne se passera pas un mercredi sans que – c’est une affaire entendue : je passe.

Par ici. Le mercredi, bien que je sois occupé ailleurs – j’ai des choses à faire, c’est à ne pas croire, notamment celles que je m’oblige à réaliser.

Il y avait une fois cette affaire de ma mère, ce n’est pas qu’elle soit reléguée, mais j’en fais quelque chose sans doute d’autre.

Je ne sais pas (ne pas) écrire, il le faut,j’ai vaguement l’impression que cette accoutumance se tait quand (disons) deux ou trois cents mots plus tard,je me rends tout à coup compte qu’il est deux heures, que je dois lire « La mort de Torcello » ou que je dois aller retrouver cet-te ami-e là quelque part, pour discuter de quoi au juste, je n’en sais rien, mais on a des trucs à faire, des choses à se dire et des histoires à tenter de raconter. Et donc on sort.

Tout en italique. Dehors, il fait un temps de saison : on aime à savoir que les choses sont ce qu’elles sont

tout comme les affaires, de même que le monde qui tourne donc (en) rond qu’aux Etats règne un fou dangereux ainsi que dans le royaume de la très sainte Russie.Ici un autocrate qui n’est pas encore sanguinaire – on va voir ce qui se passera lorsque, dans la rue, se développeront certaines actions.Pour le moment, il fait beau, il fait doux. C’est la trêve, les vacances, on pense à autre chose(les comptes, les trajets, les emplois du temps, quand où comment avec qui dans quelles conditions – la température, la pression, le temps et les autres variables, nous verrons ensuite).Il y a dans ce dossier vingt quatre photos : sait-on jamais pourquoi, tout à coup, certains objets appellent le cliché ? Il y a le fait que, lorsqu’on rentre ici (Jean Moulin, disait André, l’homme au pigeon de Lasserre) on y dépose quelque chose, des mots, des images, des liens, des pensées, on entre ici comme dans un moulin (jamais fait le rapprochement avec le cliché, tu vois comme les choses vont) et puis on en sort aussitôt : on nous a vanté la qualité de l’isolation, celle de l’acoustique, on nous a appris que le chauffage par le sol, ailleurs, demain jamais, que sais-je, on nous a dit que la modularité des pièces, les revêtements en chanvre ou les fenêtres isolantes et les tuiles photosensibles tout cela avait (certes) un coût mais que l’amortissement se ferait dans le temps (vingt ans, au regard de vos quatre vingts espérés, qu’est-ce donc ? un quart, eh oui) on nous a permis de faire sur l’avenir ce calcul basique et qu’on laisserait au moins ça aux enfants à venir, un couple charmant, une voiture décapotable, des sourires signal (je pense, je crois, il me semble que c’était un journal nazi, mais j’ai oublié, laisse, j’ai oublié) (tout comme la tour que voulait flanquer cette étoile de l’architecture que le monde entier nous envie, tu te souviens ? non, j’ai oublié) (la chanson dit « j’ai tout oublié des campagnes/ d’Austerlitz et de Waterloo », je me souviens) alors j’avance en âge (et je gagne en misanthropie, oui) petit à petit se constitue la collection, elle est là dans un dossier (ce magnifique rangement, arborescent, iridescent, incandescent, opalescent)dans lequel se trouve encore un dossier lequel recèle encore d’autres dossiers, et voilà le travail. On en pose une ici, une autre là (le mieux, c’est de réagir différemment : à la fin de l’envoi, je touche ! disait Cyrano, eh bien, la machine compte, mollement, les mots que j’inscris ici, et à la fin, le compte sera divisé par autant) (nous verrons) c’est tout vu.

Vous êtes entré(e)(s) dans cette maison, les murs ont été laminés de gris taupe (on aime le gris taupe car il correspond à ce que voit l’animal, et nous voulons, nous aimerions tant que vous vous comportiez en quelque sorte non pas comme un mais à la place de, voyez), les sols couverts d’une couche à l’huile de lin d’une couleur indéfini mais non définitive, évidemment, car tout, absolument tout est négociable comme vous n’êtes pas sans le savoir. Les portes et les serrures, la cuisine et la salle de bain, la salle d’eau à l’étage contiguë à la chambre d’amis, le blanc va à ravir à ces espaces. Immaculés. Ainsi qu’en un rêve.Il fait doux, le printemps s’est achevé, l’astre au ciel parcourt inévitablement son ellipse et en direction de Véga de la Lyre a assuré sa voie son chemin son erre, dans trente trois ans, nous serons neuf milliards, avant deux mille cent la hausse de la température se sera limitée à deux degrés Celsius si Dieu veut (car il est grand et de ses prophètes il en est toute une théorie) la centrale de Flamanville sera opérationnelle dans dix ans, légèrement après la date prévue, son budget multiplié par trois ou quatre (comme celui de la philharmonie de Paris, mais là n’est pas l’enjeu) (non plus que la question), on en construit deux autres sur l’île, là, en face de Calais où une édile annonce sans rougir qu’il ne faut pas nourrir ces gens-là, celle de Finlande ma foi il fait froid, là-bas non ? des histoires à dormir éveillé, les attaques des virus, ils périront par où ils ont péché, c’est probable, et les vaches seront bien gardées. Il est tard.Le monde s’enfuit et s’éveille, demain le ciel s’éclaircira car c’est  l’été. On aime le savoir. 

Alors voilà, dis donc, à quoi tu penses ? Je me disais vingt quatre images, c’est exactement une seconde de cinéma. Ou autant d’heures d’un jour…

A quoi je pense ? A la prochaine séance. A mercredi prochain donc.

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