Voir le jour

 

 

 

 

un mal de chien à bosser ( c’est que le travail n’attend pas, l’écriture et le cinéma, si…) – c’est un peu toujours la même histoire, always the same old story – mais là c’est un film français, je l’ai vu il y a un moment – les images sont du film annonce et de l’imdb – on fait ce qu’on peut, plus ça va plus c’est dur : peu importe, les artères se solidifient sans doute (on ne fera pas dans l’autofiction cependant) (il y a des choses qui se passent au monde qui me donnent la nausée mais qu’est-ce que ça fait ? ben rien –  peut-être que ça va mal finir qui peut le dire ? – aux us comme dans l’uk deux cinglés au pouvoir, un autre qui veut refonder un empire ottoman, un quatrième qui veut faire le tsar et élimine au poison ses opposants quand ce n’est pas par des coups de feu…) et pendant ce temps-là, des enfants naissent…

 

 

il y a une héroïne, mère d’une fille assez adolescente – l’héroïne en vrai se nomme Jeanne mais en dehors du vrai Norma – elle a été chanteuse d’un groupe c’est pour ça  Norma – elle a décidé un jour, enceinte d’on ne sait trop qui, de s’enfuir – elle a opté pour travailler dans une maternité, elle y est auxiliaire – elle a saisi sa chances rencontrant alors Francesca, la sage-femme incarnée magnifiquement par Brigitte Roüan – le film décrit la vie dans une maternité, accouchements, césariennes, péridurale, risques urgences la vie la mort… Des relations de travail. L’autre partie du film, ce sont les relations qu’entretient Norma-Jeanne avec le reste du monde, et notamment sa fille (Lucie Fagedet, solide) .

Ce sont sans doute maladresses mais le film tient, et il tient surtout par ses actrices : quelque chose passe. Une entente sans doute : les conditions de travail (la grève qui vient)

l’arrogance assumée (comme on dit aujourd’hui) tellement contemporaine du chef de service (Stéphane Debac)

mais se tenir ensemble, et faire face. Le film tient par ses actrices, Sandrine Bonnaire en Norma Jeanne (parfaite)

Brigitte Roüan en sage-femme (sans doute a-t-elle accouché Jeanne) lumineuse

Aure Atika qui disparaît à un moment – magique cependant – ici avec Kenza Fortas en stagiaire (une nature) –

Claire Dumas sympathique et honnête cœur sur la main (on l’avait aimée dans « Tout ce qui me reste de la révolution« )

en amorce ici Nadège Beausson-Diagne (adjointe au chef de service : de quel côté est-elle ?) (efficace et sensible), et d’autres comme Sarah Stern – en chanteuse légèrement fofolle –

des actrices une maternité des accouchements – des tensions, des chansons (il y a une chorale, il y a une chanson que nous donnait Nicoletta – tu te souviens de Nicoletta ? – Mamie blue – je ne suis pas trop pour la redondance à outrance, mais enfin, il y a l’adage qui indique que la mise en scène c’est taper sans relâche sur le même clou…) un retour du refoulé et des cendres jetées à la mer (…), des maladresses certes, mais une claire vision – de fortes et tendres  relations entre femmes : ce n’est pas si courant (même si ces rôles sont convenus – la corporation elle-même porte en titre sa fonction (les sages-femmes) – elles se battent, se mettent en grève, solidaires et unies : ce n’est pas si courant. On salue ici l’entreprise (et Sandrine Bonnaire qui porte le film, avec cette énergie qu’on aime).

 

Voir le jour, un film de Marion Laine.

Il manque dans cette petite narration d’un film sympathique toute la partie du passé de Jeanne donc Norma. J’ai voulu ne garder que le versant professionnel disons – j’ai vaguement le sentiment que la chanteuse le groupe cette musique probablement du temps des punks ne sert pas la force du film : je préfère y voir cette lutte pour un statut, tellement plus forte et plus vraie.   

Tirez sur le pianiste !

 

 

 

Reprenons : c’est parti du fait qu’un entrefilet mentionnait que durant ces quelques mois d’arrêt momentané, le monde du cinéma (si on peut dire) comme un bon peu du reste d’ailleurs du monde tout court avait subi cette stase – tous les tournages se sont arrêtés, les gens sont rentrés chez eux ou dans leur seconde maison, reclus comme nous autres (ici, là ailleurs) (à Paris et dans le neuf trois par exemple ça a été plus tendu qu’en campagne, certes) (jte parle même pas des US ou de l’UK, ou de l’Inde ou de la Chine…) – et que durant cette période, la plupart des cerveaux ont continué de fonctionner comme si de rien n’était – les pervers ont cherché à tirer profit de l’affaire, d’autres ont tenté de faire autrement; on a glosé sur « le monde d’après » comme si ça avait un sens – puis on s’est remis à nos occupations (au travail, c’est le fond qui manque le moins disait ce connard de la Fontaine) (évidemment que je suis en colère : qui ne l’est pas ?). L’entrefilet disait (c’était courant juillet ou août je ne sais plus exactement) que machin avait cédé les droits de son catalogue de films à truc – pour donner la chance aux abonnés de truc de voir ces films-là. Je ne suis pas particulièrement fondu des réalisations de ce cinéaste (François Truffaut – il est de 32, il a vingt huit ans au moment du tournage) que je trouve assez hypocrite – mais ça ne regarde que moi – et en tout cas j’avais déjà vu le film chroniqué aujourd’hui (probablement dans les années soixante dix) (je me souviens parfaitement de la prestation comme on dit aujourd’hui de Boby (ne prend qu’un b) Lapointe (Avanies et framboises) – il est de 22).  Machin a donc vendu à truc le droit de diffuser les films du Truffaut à son catalogue (machin a dû racheter le Carrosse j’imagine – j’irai voir, oui *) : et alors ? Bof, rien sinon que donc pendant les suites de la pandémie, truc (qui est, par parenthèses si mes sources sont bonnes, pété de fric) a été voir les producteurs des films arrêtés pour cause de virus à laconcorona pour leur proposer un rachat (il paraît que ça n’a pas marché avec beaucoup) (prix inférieur hein, puisque quand même tout ça s’est arrêté, on va reprendre produire il faut comprendre et voilà…!). Non, je m’en fiche un peu, les affaires sont ce qu’elles sont : et d’ailleurs je pense que le Truffaut n’aurait vu aucune objection à ce que ses films soient diffusés via le réseau de truc, mais enfin il me semble que truc est un peu dégueulasse (il n’est pas douteux que le monde dans lequel il grouillotte le soit tout autant) (c’est celui des affaires, comme c’est celui du cinéma) . Voilà tout 

 

Bon sinon, le film du jour est tiré d’un roman de David Goodis (1956 – il est de 1917, il n’a pas quarante ans) (traduit en série noire en 1957 – traduit par Chantal Wourgaft – son âge je ne sais,elle est décédée je crois), il y a pas mal d’invraisemblances mais on s’en fout un peu. On est assez content de voir du noir et blanc (image : Raoul Coutard – il est de 24, il tape trente-six); on est aussi content de voir Charles Aznavour (il est de 24 aussi, lui) alias Edouard Saroyan, alias Charlie Kolher en pianiste. Il s’agit de l’histoire de quatre frères (ici on en voit deux – gauche cadre, c’est Chico (Albert Rémy (né en 15, 45 piges) – il jouait le père du Doinel (Antoine, donc) dans « les 400 coups » l’année d’avant)

C’est à Charlie qu’on s’attache – il rencontre Léna – son frère Chico est poursuivi par des voyous qu’il a grugé – évidemment ça va mal finir.  Le film date de 1960;  on voit les rues de Paris un petit peu; Charlie

rencontre Léna (Marie Dubois, elle a vingt-trois ans; il en a trente-huit (

dans la – si elle existe – vraie vie) : ce soir-là ça ne se fera pas – il rentre chez lui (il vit avec son frère Fido qui doit avoir dans les douze ans) – sur le même palier vit Clarisse, une respectueuse qui danse là où joue Charlie – elle garde le petit Fido (Richard  Kanayan, doit avoir dans les douze ans – il jouait aussi déjà dans les 400 coups, l’année précédente) quand il revient de l’école, elle lui donne à manger, c’est un peu comme une mère (ou une grande sœur) –

Charlie et elle se retrouvent dans le même lit, ils sont amants en somme (elle c’est Michèle Mercier (elle a vingt ans) (elle va tourner bientôt  la série des « Angélique » et devenir une espèce de star

du grand écran) (il n’y en a pas vraiment à l’époque de petit) – mais Charlie aime (sans encore vraiment tout à fait le savoir) Léna, et puis les choses allant comme elles vont

ce qui doit arriver arrive

(c’est assez convenu, j’avais prévenu) (conventionnel : les femmes sont jeunes, les hommes plus âgés, tout ça) et puis on parle – un long flashback explique pourquoi Charlie est si triste – alors que Léna elle est si gaie – on apprend que Charlie est veuf de Thérèse

(Nicole Berger, adorable : vingt-six ans au moment du tournage) (elle se tuera dans un accident de voiture en 1967, que la paix reste sur son âme) – Charlie reste peut-être un peu coupable de ce suicide – c’est une histoire triste (elle a couché avec l’imprésario à Charlie afin (peut-être) de lui faire obtenir un contrat (lequel imprésario est interprété par Claude Heymann – qui est de 7, ça lui fait 53 printemps) (elle s’en veut, elle se jette par la fenêtre; Charlie ne l’en empêche pas) – et puis, et puis Charlie tue en état de légitime défense le patron du bar, Léna l’aide à s’enfuir alors la route

et la poursuite par les autres malfrats qui veulent leur argent (je passe sur certains autres détails)

et la fin dans la neige

Il y a cependant en ouverture cette scène qui se déroule dans la rue où Chico s’enfuit et est aidé à se relever par un type qui lui flanque des gifles – le type porte des fleurs à sa femme, et nous explique pourquoi et comment il en est tombé amoureux – c’est la raison du film (comme celle de tous les autres films sûrement), le passant est interprété par Alex Joffé (il est de 18)

un cinéaste (des comédies surtout, films avec Bourvil, Robert Hirsch etc. plutôt qualité française…), acteur et scénariste, père d’Arthur Joffé (je me disais je le connais, mais non, (enfin oui, mais non) je le confonds avec Roland Joffé) – et donc comme un signe vers cette frange du cinéma honnie et vomie par ce qu’on appelait alors « la nouvelle vague »… Et pour finir mentionnons Catherine Lutz dans le rôle de la femme (« plus pour longtemps » dit-elle dans un éclair de préscience de l’avenir) (elle est de ? – elle a dans les 40 ans, là) Mammy, du patron du bar (Serge Davri, il est de 19)

 

(*) : (add. de 9h53) sous le lien, l’article de la Cinémathèque Française indique que « tous les films de François Truffaut seront produits par » le Carrosse sauf celui-ci, plus « Fahrenheit 451 » (1966, d’après Ray Bradbury),  « Une belle fille comme moi » (1972) et « la Nuit américaine »(1973) – ce sont sans doute ces films qui ont été rachétés par machin, donc, et non ceux produits par les films du Carrosse (faudrait voir: y’a du boulot).

Carte postale d’été

 

 

 

Vacances
(l’image est du « fond d’écran » du rédacteur)

(ici, tout n’est que vacances : personne, le vide absolu, et la pelouse qui jaunit)

agent ou pas, après ces déboires de santé, la vie a repris une espèce de cours inversé – on croyait avoir compris, on avait été bernés certes mais on croyait qu’il se passerait quelque chose de particulier, une prise de conscience de l’existence réelle du mur contre lequel nous précipitait le système économique et social basé sur le rendement, la compétition et le profit – ah le profit (profitez bien de vos vacances surtout et revenez-nous reposés) (pour mieux travailler et faire ce qu’on vous dira, mais surtout, surtout, pour la fermer) (on s’occupe de tout, retraite, chômage, sécurité sociale et mutuelle : on s’occupe de tout, pour vous – et bien : rien à en dire, laissez nous faire) (jte parle même pas de l’école ou de l’hôpital, de la « justice » ou de la police – des armées ? des EPR ?) l’important, c’est la santé (à la votre !) – on avait en effet tout gardé et on repartait dans le même sens, en tentant d’accélérer pour rattraper le retard (soyons juste, on avait changé quand même le fantoche; on en avait mis un autre à la place, avec un bel accent du terroir et du territoire : ça avait rassuré dans les campagnes, sans doute). Il y avait eu une photo une image du grand capitaine imbus d’écologie et de féminisme qui conduisait un « scooter des mers » du côté de son fort, disait le magasine (beau comme de l’antique ou comme un sosie). 

Ici, dans cette maison, on a cessé de chauffer, on a coupé l’eau – l’agent l’ouvre s’il fait visiter (ça n’arrive plus), rebranche l’électricité pour faire fonctionner les rideaux de plastique qui masquent les baies – il fait chaud, c’est l’été, c’est la plaie – le creux du quinze août où on aimerait en finir – les vacances, le reste du monde – quelques images sur les tablettes

Withney Houston qui chante « je t’aimerai toujours » (son image s’est imposée à moi quand j’ai appris la mort de Bernard Stiegler, qui n’était ni noir, ni femme, ni chanteur – je me suis souvenu des émissions qu’il avait animées) – ce sera dans la maison un obituaire, une actualité, un hommage – les gens passent la vie elle même passe et nous ne faisons pas suffisamment attention à nos proches – il faudrait leur dire – on reste là avec des interrogations, des sentiments qui fleurissent et se taisent – masqués, gels aux mains, réunions et distances – travail ou c’est la porte – malades, cette peste-là nous envahit – des images qui nous restent

à l’été soixante-et-un on tourne « Cartouche » – on travaille l’été dans le cinéma, beaucoup l’été (la lumière n’est pas onéreuse – on travaille, on travaille) – le sinistre des salles, ces jours-ci oui mais l’atelier alors le cinéma m’est revenu – il n’est jamais parti, mais il m’est revenu comme il était alors (ici la sortie des boites de films dans le caddie de la cinémathèque universitaire

une image pour « vivre ») « vivre » est un texte que je tente de préparer, mais je n’ai pas le temps tu sais, avec cette maison, pendant le week-end, cette autre qu’il faut retaper – et puis les vacances et l’âge, le repos, les lectures – dans ses notes, Margot annonce qu’elle a travaillé à son « Mémoires d’Hadrien » de très nombreuses années, en l’oubliant pendant une bonne vingtaine, le retrouvant à la faveur d’une lettre (c’est vraiment un beau parcours que ces notes) et elle indique que pour se départir de son oisiveté ou de sa dépression, elle se rendait dans un musée, à Pittsburgh je crois, pour admirer ce tableau du Canaletto

il s’agit du Panthéon de Rome lequel a été bâti par l’empereur Hadrien (je n’écris pas, je n’écris guère – je ne tiens pas la distance – ça ne fait rien, mais parfois j’en éprouve du dommage – j’illustre, comme fut illustre l’Empereur) – ces mots devraient être au journal (je me suis aperçu que la tentative d’inventaire de Perec avait lieu durant un week-end, commencée un vendredi d’octobre, elle se termine le dimanche qui suit) je les mets un vendredi creux dans cette maison, ça ira – le cinéma  continûment (j’aurais bien mis un autre « e » quelque part à cet adverbe mais non) (tant pis) pour moi, il faudrait faire un tour à Venise sur les Zattere

pour m’aider à sortir de cette oisiveté qui n’en est pas une, ce manque d’allant peut-être ou cette fatigue mélancolique – voici les deux frères après leurs courses

au fond vient les croiser quelqu’une, devant eux, un autre avec son caddie – les lunettes et la canne – une image de l’ami photographe (le texte pour lui, oui) (les commentaires des poèmes express de Lucien, oui, aussi)  – mais plus le cinéma – du côté des stars par exemple, cette image que j’aime parce que pas encore empuantie (j’interprète) de costumes et de bijoux de marque

ça se passe à Cannes en soixante quinze (ce ne sont pas gens normaux mais gens quand même) (« Are you talking to me ? ») (Taxi Driver, Martin Scorcese – ici les deux acteurs Jodie Foster et Robert De Niro) (oui, c’est à toi qu’on parle) – le cinéma, un ring

(légère contre-plongée qui permet d’attraper le coin des plafonds, comme dans Citizen Kane, tu te souviens) Mohammed Ali (aka Cassius Clay, le danseur des rings, cette merveille, puis…) plus Christopher Lee (mister Dracula ou Fu Manchu ou autres Sherlock encore en personne) (le triangle de la pochette ou la marque du sweat-shirt ?) (à ne pas confondre avec Vincent Price – ils se ressemblent comme deux frères) (« le Masque de la Mort Rouge » pour Vincent (Roger Corman, 1964) – pour ne rien oublier, dans ce dédale d’images, une d’ici – le ciel plombé, le mois d’août en demi – ça pourrait aller mieux, ça pourrait être pire – avancer ? sans doute;continuer ? certainement; travailler, oui, mais pourquoi faire ? ça va aller – Les deux arbres au soleil

Bonnes vacances

Partir (# résister, toujours – et n’oublier, jamais)

 

 

 

on n’est jamais sûr de rien – il faut aller travailler, paraît-il – obligatoire et nécessaire : comme si ce chômage était de notre fait, tu sais – je cherche une maison dans les bleus, de plain pied, avec une terrasse sur l’arrière, couverte si possible – ce n’est qu’un décor tu me diras, en effet – il y a au bout de la perspective, du point de vue qu’ils nomment « Miradouro », au flanc d’une des collines de Lisbonne, un tout petit bout de jardin, on y découvre cette splendeur

il faut gravir la pente, certes – ça ne fait rien, il doit bien y avoir un funiculaire, un tram ou quelque chose qui repose les vieux muscles – il y avait cette petite carriole de papa Omri à Marseille avant qu’on ne la lui retire

le type ne gêne personne, il fait même oeuvre sociale et on l’emmerde(on pétitionne ici si on veut)  – ça me fait souvenir (il arrive la même chose à Mevlut) de ce beau livre « Cette chose étrange en moi » (Orhan Pamuk, 2014) sous-titrée « La vie, les aventures, les rêves du marchand de boza Mevlut Karatas et l’histoire de ses amis et Tableau de la vie d’Istanbul entre 1969 et 2012, vue par les yeux de nombreux personnages » (traduit du turc (folio) par Valérie Gay-Atskoy) augmenté d’un index et d’une chronologie ainsi que d’une photo d’un vendeur de boza que je replace ici

la boza est une boisson turque traditionnelle – on a besoin de vacances, on irait sur le Bosphore ou faire le tour de la mer Noire en auto – il n’y aurait pas la guerre, ni le tsar ni ce fumier ni toutes ces ordures, le monde serait joli en paix – mais non – je n’ai que quelques images, je dois travailler, faire visiter peut-être mais en août ? y’a quelqu’un, tu crois ? Pendant la réclusion, on a bien essayé de résister mais à présent les gens partent en vacances ou quoi ?

on n’abandonne jamais complètement (il y a soixante ans, ça se passait comme ça, une 403 bleu nuit (c’est encore en noir et blanc comme tu vois) à l’avant qui conduit un type qui fume une Gitane, sa femme est à côté de lui, elle s’est penchée vers lui a posé sa main sur son bras, derrière il y a leurs quatre enfants qui s’extasient en presque silence tellement ils sont cois – il est tard, la journée a été longue et les lumières brillent sur la ville, une ville qu’ils n’avaient jamais vue les fenêtres sont ouvertes on roule tranquillement – comme si c’était hier) – presque – alors les vacances ? encore une image, une de l’endroit qu’ils viennent de quitter (et ensuite, on clôt pour quelques numéros)

une dernière d’où j’aurais du me trouver si tout n’avait pas été chamboulé – mais tu sais quoi ? on s’en fout complètement de ce chamboulement – on bronze on rit on rêve…

bonnes vacances s’il vous agrée d’en prendre

 

 

(l’image d’entrée de billet est due à Brigitte Célérier, qu’elle en soit ici remerciée)

 

 

 

Abbas 2 (où est la maison…?)

 

je me laisse faire : arte diffuse des films d’Abbas Kiarostami, alors à nouveau je les regarde, je les aime, je les regarde encore, je les ai vus, je les vois – Abbas Kiarostami est décédé il y a quatre ans, à Paris où il était soigné, il avait 76 ans mais ne tournait plus en Iran. Cette perte…

 

 

on aime les enfants – c’est une affaire entendue – parce que justement ils sont aimables – celui-ci par exemple

il se nomme Ahmad (dans le film: dans la réalité, il se nomme Mohammed Reza) ou celui-là

c’est lui Mohammed Reza (c’est Ahmad dans la « vraie » vie) (Abbas K. a interchangé les noms, pour rire, sûrement – pour les faire jouer l’un à la place de l’autre et vice-versa) – ils sont ensemble à l’école; ils doivent être en quelque chose comme le cours préparatoire, ils apprennent à écrire ; Mohammed s’est fait gronder, il n’a pas fait ses devoirs (il travaillait), il pleure, c’est déchirant (vraiment, pauvre môme…); ce sont des enfants, ils sont pauvres comme leurs parents et arrivés à la maison, avant de faire leurs devoirs d’écriture on les fait bosser : par exemple celui-ci a mal au dos

c’est pourquoi il n’a pas fait ses devoirs (les bidons de lait sont lourds)

une classe de garçons, ils sont vingt et ils bossent – c’est vraiment une belle histoire (un scénario en platine) – Ahmad a pris par mégarde le cahier de Mohammed Reza, il cherche à savoir où se trouve la maison de son ami (en platine – magnifique et sublime) ne la trouve pas, cherche et court et croise ce type qui s’appelle comme son ami

mais ce n’est pas son père alors il court, Ahmad, il cherche, se trompe court encore, revient repart, croise un vieil homme qui fabrique des portes, lequel lui donne une fleur, et l’emmène chez (de nouveau,) cet homme (ce n’est pas là) (non, ce n’est pas là mais c’est la nuit qui vient), Ahmad s’en va, c’est la nuit – il rentre chez lui – le voilà de retour, le soir on dîne, il a ses devoirs à faire, il va les faire – séquence formidable – il est là

tu vois comme il s’applique ? Pour faire son travail

sa mère lui apporte à manger (il n’a pas mangé à table, il était préoccupé : le cahier de son ami, il n’a pas réussi à le lui rendre : demain, le maître va le punir, le chasser peut-être…) – il travaille Ahmad – si Flaubert avait été Emma, moi j’aurais bien été Ahmad –

il est tard mon garçon – un peu, oui, il est un peu tard mais voilà que le vent ouvre la porte

le vent qui tourne les pages, le vent qui souffle entre, bouscule le linge, Ahmad est là et regarde le vent (tout comme Joris Ivens filmait le vent, Abbas nous le fait sentir) (c’est quoi le cinéma, sinon filmer le vent ?)

oui, Ahmad, regarde le vent, regarde Ahmad… (sa mère ramasse le linge dans la nuit – Ahmad regarde et regarde encore)

et c’est déjà demain, c’est déjà la classe, mais Ahmad n’est pas là – on se dit « il dort encore il s’est couché trop tard il était si fatigué » – et puis

le voilà (il tente un mensonge pour expliquer son retard et puis finalement non) il entre rejoint sa place

à côté de son ami (sa maison, il ne l’a pas trouvée)

mais ce n’est pas faute de l’avoir cherchée

bah tant pis – il a fait les devoirs de Mohammed, le maître voit les devoirs faits, c’est très bien – oui, c’est très bien

et là, la fleur donnée par le vieux type : sublimissime…

 

Où est la maison de mon ami ?, un film (formidable) d’Abbas Kiarostami (1987)

 

 

 

Abbas (au travers des oliviers)

 

 

 

C’est un cinéaste iranien – il tournait dans son pays, on l’en a chassé, il est mort à Paris – dans « son » pays des histoires de gens normaux, différents semblables, qui parlent une langue douce différente belle – j’ai là une photo prise par le robot de la région où est tourné ce film : cette photo dit pas mal de choses, je la pose ici, dans cette maison, c’est une espèce de carte postale, quelque chose qui viendrait d’un pays que je n’ai jamais vu (je le regrette tellement, si tu savais) (mais j’ai lu  « L’usage du monde » quand même (Nicolas Bouvier, dessins de Thierry Vernet, au seuil sûrement) en vrai l’espace et le continent

du côté de Koker (dédiée à l’ami O.Hodasava)

oui, on reste là et on regarde (le militaire sur le toit consulte son portable, il n’y a (à peu près) aucun doute) – deux films (celui du jour (1994), plus « Et la vie continue » (1991) au début « La vie et rien d’autre » mais il y avait le Resnais au même titre) illustrent le tremblement de terre subi par le pays en 1990 qui a fait selon les sources cinquante mille morts, plus, moins, terreur – tout ça se passe vers Koker (Kiarostami a indiqué qu’il préférerait, si c’était possible, qu’on considère « Le goût de la cerise » comme le troisième s’il fallait absolument et à toute force faire une trilogie de Koker avec son travail) (la « trilogie » cette merveille de notre ère…)

 

Un plan est une entité

la caméra tourne et on ne l’arrête pas – ici, le héros descend une pente, au fond des oliviers : au travers d’eux marche sa promise (on ne la voit pas mais on sait qu’elle est là-bas)

il est dit fixe (le plan) si la caméra ne bouge pas (on voit la jeune fille entre les deux rangées d’oliviers de gauche)

ici la caméra fait un léger panoramique de bas en haut pour garder dans le plan la jeune fille qui s’en va – le garçon (Hossein, il remplace ai pied levé un acteur qui bégaie quand il parle à une femme) lui court après (il lui fait la cour, si tu préfères)

lui a disparu; elle a disparu (elle se nomme Tahereh,comme dans la vie, comme Hossein se nomme Hossein dans la vie) : seule la caméra continue son pano – on aperçoit le bout du champ (le champ, dans le cinéma, c’est important) on découvre l’ampleur du paysage

un moment plus tard : les deux jeunes gens sont à l’image  – la jeune fille à gauche au fond, le jeune homme entre la deuxième et la troisième rangée d’arbres – la chanson « Orly » de Brel dit « je suis là/je la suis » : c’est ça (le pano bas/haut continue)

puis est doublé d’un droite/gauche : on suit la jeune fille, son promis a disparu dans les oliviers – l’ampleur du champ est majestueuse, avoue –

le revoilà – on n’en pas encore parlé mais on l’entend dire des mots au loin; une musique qu’on dit classique (un basson sans doute, des violons, quelque chose d’assez gai) accompagne l’image (entrée dans le champ de l’arbre, gauche cadre, sublime : le témoin le plus proche de l’explication…) –

il la suit mais la rattrape – il lui parle – il lui demande de lui répondre – elle avance

elle prend le chemin à droite, il la suit, il la rattrape, elle s’arrête et se retourne vers lui

légèrement recadrés

si loin de nous : c’est leur secret – personne qu’eux ne sait – la musique est joyeuse, le revoilà qui revient – elle s’en va, suit son chemin

il ne marche pas il court – elle prend le chemin sur sa gauche, puis sur sa droite –

il ne court pas, il vole (il y a Brel encore, qui fait « je volais, je le jure /je jure que je volais… ») – bientôt elle aura disparu –

le chemin ? quel chemin ? à travers champ – la musique le(s) suit – on la distingue encore devant les arbres au fond – que leur joie demeure –

il revient s’approche

bientôt happé

par les oliviers

fin du plan/fin du film/générique

quelle splendeur

 

Au travers des oliviers, un film d’Abbas Kiarostami

 

 

 

#11 bis – résister encore ( plats ronds)

 

 

 

j’ai vaguement le sentiment qu’on veut nous rejouer la même partition – nous faire peur, et encore – afin de ne pas nous laisser libre du peu qu’il nous reste – des masques, des gels, des regards effrayés, soucieux – le monde deviendrait-il semblable à ce qu’en prédisait Stephen King dans son  22 11 63 – après la guerre atomique, on a muté, on n’a plus d’appareil respiratoire – quelque chose de ce genre – on aime avoir peur aussi, mais vu l’épaisseur de la connerie ambiante (ne citons pas leurs noms mais les chefs d’état, non, vraiment…) on serait bien fondé à croire que ça pourrait tout aussi bien se déclencher demain à Hong-Kong, en Corée en mer de Chine, à Chypre, en Pologne ou en Hongrie, n’importe où en Afrique ou ailleurs, finalement – on est peu de choses – pendant ces jours là, les plats ronds

ici du pain perdu – cette plaie de savoir que près de trois milliards d’humains, sur cette terre ne mange pas à sa faim – l’eau manque à un milliards des nôtres – on a laissé les épiceries ouvertes, on a récupéré le pain en trop, un peu d’œuf un peu de lait du sucre –

une quiche lorraine – ces images de plats, de chats, de soi : quels enseignements ?

pas si ronde que ça, la pizza – le froid parfois, puis le temps si clément – les peurs, les joies les rires les mots, le téléphone messenger et autres joyeusetés de zooms – quelque chose de tellement moderne – on n’était pas là, on était ailleurs, on parlait on se voyait – on en avait marre on pleurait – la rage au cœur de la fin mars

ça n’avait pas vocation à publication (ici jambon poireaux la quiche) (pas la lorraine) (on remarque peut-être la cafetière et les chaussons charentais de l’officiant en bas du cadre dans les bleus) il fallait bien vivre – les vieux mourraient seuls sans amis sans parents – seuls pour protéger nos propres angoisses – les gens applaudissaient à huit heures, le premier mercredi, on avait demandé aux croyants de prier – vers sept heures et demi – aujourd’hui

tu sais quoi, (laitue/betteraves/pommes) en ville j’aimais à photographier le pékin, à présent il s’avance masqué, je ne le regarde plus je ne les regarde pas, je transpire je fais attention, je ne respire que chichement – je regarde mes contemporains – il ne fait pas beau

(papardelle/poireaux/crème/andouille) je me souviens et j’entends « signaux faibles » dans le poste, les mêmes et on recommence en pire – on achètera le silence mais on ne fera rien pour l’institution de l’hôpital, rien pour rendre son humanité à cette santé qui a son ministère – la honte qui atteint nos âmes, vivants certes, mais à quel prix ? – les blouses blanches, les morts dans la rue, les prises genoux sur le cou pour faire taire, empêcher de respirer, les manifestations nassées, réprimées, les gens éborgnés, maltraités violentés gazés – les mensonges éhontés sur les stocks de masques, sur les tests sur les trains qui convoient dix malades – ces images percluses de fausseté – et puis le silence, les ciels clairs

(lentilles corail/riz basmati/ail oignons) vivre se nourrir penser aux autres – le poids de la maladie qui alourdit les bronches, celui de la peur qui essaime en nous tandis que le minus se pavane chez le professeur-miracle de Marseille – il y avait le matin le roman de L’AiR Nu à réaliser, les travaux, ranger, nettoyer penser rire se prendre dans les bras parler aux autres lire écouter – désormais, comme tu sais, nous sommes les vieux – nous sommes les parents – un printemps magnifique en soleil et tendresse colorée –

(lentilles vertes/lards/basilic) (sans point) des plats ronds dont on échangeait avec les autres les images – pas mal, hum ça a l’air bon – bon appétit – tout était parfaitement réglé comme avant, avec nos A2D, nos promenades, nos masques – des « signaux faibles » qui se font jour, on repère des « clusters » on invective « barrières » on demande des comptes – le chant des oiseaux, plus un seul avion à réaction plus un seul panache blanc qui salit l’horizon et le climat – l’idiot qui parle, les médecins qui commandent, les flics qui tabassent – résister, oui, anniversaire, penser aux autres, nos amis disparus, nos parents arrachés à notre affection –

quand on s’est retrouvés (sablés nature), on s’est embrassés, on s’est dit à nouveau qu’on s’aimait, qu’on était là, bien là, oui, on a survécu, on s’est tenu on s’est parlé, on est là – vous êtes là ? dans cette maison, oui, des plats ronds

seulement pour vivre (tarte aux pommes/confitures de cerises) sans intention particulière

pour les amis lors du premier wtf déconfinement – cent kilomètres – des artichauts à la barigoule – sans intention particulière, non, simplement pour vivre et se savoir vivant

et continuer sans laisser le vide nous envahir (ici des pommes de terre nouvelles, là des radis roses et ronds)

et cette dernière pour finir, italienne un peu, déjà posée, pour ne pas oublier

Jenny (et Maurice)

 

 

il y a certainement un truc qui ne va pas (chez moi, je veux dire) : probablement, une trop grande confiance en soi – de quelle source pourrait bien provenir cette arrogance ? Écrire pourquoi pas après tout – par exemple, j’ai aimé écrire pour cette croisière – ça a été une espèce de commande et j’en ai aimé les contraintes – puis le monde a changé – j’aime que le monde change (et le prince Fabrizio (l’un des premiers à venir visiter cette maison) (et à y demeurer) de redire « il faut que tout change pour que tout demeure semblable » – ah Burt…) le cinéma m’a manqué – il va revenir ici (on a vu récemment L’ombre de Staline qui n’est pas si mal) – mais pour le moment, un livre qu’on illustre des lieux où il s’est déroulé – bien des choses ont changé, mais voilà, c’était ici.

 

Le nom de la rue a changé – c’était la rue des Sablons (il en est une intra-muros jte dirais) – ils vivaient au 1 : le voici ici

image de juin 2008

le père (Nuchim), la mère (Rivka) et leurs deux enfants – Jenny et Maurice (il y avait un film de l’époque, je crois que c’était Françoise Rosay dans le rôle – il est de 36 – le mari jaloux, c’est Charles Vanel – ma mère avait dix ans, mon père treize – Carné, musique Kosma, scénario Prévert etc.) (il faut bien accrocher quelque part la réalité des choses), Jenny avait 11 ans, et Maurice 7.

(Il y a quelques jours, Maurice s’en est allé (que son âme soit paisible) le 13 juin).

juin 2014

Puis en 1930, ils déménagèrent, à Vincennes.

juillet 2015mai 2018   

(que cherches-tu dans les images ? des preuves ? des indices ? des hasards et des réalités ? il y a là du jeu, de l’amusement,du renseignement : comment était-ce ? comment est-ce ? de la curiosité, et aussi de la mémoire) les enfants vécurent ici un moment, deux ou trois ans pour Maurice, je crois – c’est Aubervilliers

mars 2019

Puis vint la guerre, les parents n’étaient pas français – ils étaient juifs, venaient de Pologne – la guerre, la déroute – l’occupation – puis le 16 juillet 1942, les rafles du vel’d’hiv – la complaisance des fonctionnaires de la police française, les dénonciations – les autobus, le commissariat (tu te souviens du 17 juillet 61, les mêmes autobus les mêmes agents, le même Papon) – et puis les parents qui disent à ces deux enfants (ils sont français, ils sont nés en France, ils peuvent rester…) (Jenny a seize ans, Maurice quatorze) « partez, les enfants »  – laissez-nous – « partez, sauvez-vous, vivez » – ils sont retournés ici donc

ils portent l’étoile, à sa place mais mal cousue par Rivka, la première fois qu’elle sort avec, Jenny passe devant ce café qui existe toujours, au coin de la rue des Vignerons

ils attendent leurs parents – mais ils ne reviendront pas  – Maurice est devenu Rajsfus, un homme magnifique comme sa sœur d’ailleurs, il arrivait que je regarde le site qu’il tenait (infatigable recherche de la vérité sur les exactions de la police…) on l’aimait beaucoup mais voilà. Le livre est écrit avec la voisine de l’auteure, laquelle est Jenny

32 avenue Franklin Roosevelt Vincennes

il apparaît de loin, peu importe, on le sait là, elle est là, elle qui aime apprendre à lire aux enfants – elle passera son bac avec son amie Monique – elles  auront fréquenté l’école de la rue de l’Egalité

j’aime tant les savoir sortir, peut-être de là, ces deux amies (ce sont elles deux, sur la photo d’entrée de blog, je crois bien – on ne m’a pas renseigné), et puis aller pour rentrer à la maison, les voir accoudées à cette rambarde de pont parlant parlant parlant


quand même on en aurait changé (le type sur le pont a été chercher du pain, voilà tout – le train passe et court vers la Nation) – Jenny et Monique – oui, pour se souvenir – le souvenir par exemple du numéro de déporté tatoué sur le bras du mari de Jenny , Jean-René – demandé par Marine, la petite fille de Maurice – pour ne pas oublier, dit-elle – oui, pour ne pas oublier, cette vie, ce monde, ce vingtième siècle…

Entre ici Maurice… (et Jenny qu’on aime tant, l’héroïne et la voisine dont l’histoire nous est racontée par Geneviève Brisac dans « Vie de ma voisine »  en 2017, au point seuil 4752 – magnifique)

 

Carte postale d’ailleurs

 

 

j’avais gardé à l’intérieur pas mal d’images sans trop de sens (celle d’entrée, le Nil quelque part vers le Caire ou Thèbes ou ailleurs je ne sais plus – je l’ai trouvée il y a peu), il y avait aussi celles qui racontaient les repas, les plats, les préparations qu’on avait faites ce printemps, les unes dans une campagne, les autres en ville, et puis c’est passé – j’ai préféré (sans doute parce que c’est plus joli) (ou que j’imagine un plaisir plus grand) cette série-là – c’est une peu comme une musique qu’on aime, Tchavalo Schmitt ou Antonio Zambujo, l’entendre transporte – ailleurs un autre temps, une autre époque, un autre espace

on pourrait dire qu’on commence intérieur jour – une nappe jaune, un repose-plat, deux tasses et une cuillère format à café – comme on les aime – et un sucrier


– et ensuite ce seront (extérieur jour) des variations

il s’agit (ici côté jardin) du repas de midi, souvent


le soir on n’en boit pas (intérieur)

quelques objets dans différentes dispositions (on aperçoit le beau temps) (on sort, côté cour, côté table à tout faire)

ce sont plans rapprochés, tasses, vides ou non – la terrasse, l’herbe, le motif rouge du sucrier – rien d’autre que de mortes natures

le café c’est un lieu, commun, un moment

il évoque Balzac, le moulin, la machine et la pause – Gainsbourg et sa couleur – la détente mais les nerfs, parfois on fume, on regarde ailleurs, lui fume aussi

on attend qu’il passe, comme le temps, on peut l’offrir, quelquefois en certains endroits on donne de quoi en apporter à un mendiant sans domicile fixe malheureux désargenté – un répit la machine crie quand il est prêt –

ce printemps était beau – on avait ce mal de vivre, c’est vrai, mais il faisait beau, on attentait à nos jours mais les arbres et les fruits n’en avaient que faire

les humains se masquaient – on attendait pour les courses, on l’achetait moulu par livre

c’est un poids qu’on aime aussi au masculin  – ici sur une chaise, côté jardin, à l’ombre du cerisier

servi – il y avait beaucoup d’autres choses, un oignon un radis et c’est l’Italie

comme le café, ce pays

un peu de sucre, je me souviens je les voyais, elle et sa mère, dans la Dauphine rouge, au soleil, sur l’avenue qui fait route, elles s’isolaient, un moment de repos

et puis les fruits ont mûri – le soleil donne la même couleur aux gens dit la chanson – elles rougissent (tu te souviens : « il en rougit le traître » ? Cyrano, ah Cyrano ta Roxanne)

nous étions tiraillés – des rituels pour résister, pour ne pas sombrer dans la peur imbécile – regarder le jour et regarder la nuit – jouer, manger boire – vivre et laisser dire  – et pour finir et pour vous, quelques fleurs sauvages devant une porte

 

CARTE POSTALE DE LA TERRE

(je ne pose pas sous étiquettes de mots-clés les noms des divers acteurs et actrices de cet épisode noir de notre histoire – contemporaine, actuelle, le monde d’aujourd’hui – pour ne pas infecter cette maison de logiciels malveillants – comme on en est victime ailleurs – mais je n’oublie pas leurs noms) (les fleurs en entrée de billet sont pour elles et eux tou.te.s) 

 

 

 

VENDREDI OU MERCREDI – CARTE POSTALE DE LA TERRE

c’est sans doute une exercice entrepris ici – il y avait la volonté de faire entrer ici des choses qui m’importent (le cinéma, par exemple; ou la lecture; pas la sociologie mais je m’en sers quand même – pas envie de bassiner le monde avec ce pan de la théorie des mondes sociaux  mais après tout pourquoi pas ? c’est que ça me barbe – comme pourrait dire le futur ex-premier sinistre) (machin a la maîtrise de l’agenda, comme on sait, et va fourbir ses jouets après la consultation de dimanche) (sauf cas d’extrême urgence et de rapport de son comité noir et  scientifique) – je voulais rendre compte d’un film mais pour essayer d’en tirer une leçon pour le futur et puis ensuite, ça s’est enlisé (ça viendra, je vais m’y employer) – on fait partie, toujours et bien qu’on n’en sache rien, ou qu’on ne le veuille pas, d’un collectif ou d’une communauté – c’est à gerber, hein, j’en suis bien d’accord – mais sinon seul au monde, comme dans cette maison[s]témoin, comment voulez-vous ?  On parle aux murs (MAIS NON !) ? À la fresque sur le mur du salon ? on se fait passer pour l’agent ? on joue à la marchande ? Non, si elle est vraiment déserte, je l’ouvre – il y a eu le plan de la pandémie, celui de la réclusion, on a attendu un moment, on a tenté de résister (onze fois sur le métier, on a remis ça)  mais non et tant mieux, on n’a pas été atteint (dieu merci comme disait Louise), on a plaint celles et ceux qui le furent – on a continué à travailler si on pouvait – ça n’a pas empêché le meurtre de Georges Floyd, ça n’a pas empêché les actes précédents

Fresque-stains-adama-traore-george-floyd-20118c-0@1x

la réunion en masse, cette sublime beauté, des jeunes gens autour du tribunal d’instance de Paris à la porte Clichy pour ne pas oublier Adama Traoré,  – hier, aujourd’hui, les mots de la famille de Cédric Chouviat et les siens

mais combien de gens morts pour rien, juste une mauvaise prise, un peu de nervosité, la peur de l’autre – dans cette maison, je ne sais pas s’il y a quelqu’un, mais je sais que j’y dépose au moins les traces sinon les âmes des personnes qui blessées torturées tuées ne cesseront de la hanter – et c’est pourquoi je le fais – s’il n’y avait encore que des hommes, je voudrais cependant aussi me souvenir de Jo Cox, assassinée pour ses idées politiques par les tenants du premier ministre d’aujourd’hui (united kingdom)

je ne voudrais pas qu’on oublie Marielle Franco

assassinée elle aussi par les tenants du président do brazil d’aujourd’hui (sinon par des sbires appointés par son fils…) – je voudrais qu’on pense encore à Nasrin Soutoudeh, emprisonnée dans les geôles iraniennes pour ses idées politiques

et ne pas oublier Farida Abdelkah toujours en prison elle aussi, pour rien

et  (malgré les sourires précédents, ici, son visage magnifique) une pensée pour le Chili, où Daniela Carasco, clown et artiste a été violée et tuée par les forces dites de l’ordre

alors qu’elle devraient être gardiennes de la paix.