Tous pour un (rire jaune 2)

 

 

Quelle mouche peut bien piquer le rédacteur sinon quelque chose en rapport au « people » (peuple, mais le beau, pas le bon, non plus que le petit) à vouloir regarder ce genre de photographies de personnages évoluant dans les ombres portées par les grands de ce monde ? Quelle malheureuse perversité l’oblige ainsi à côtoyer un univers avilissant parce que inatteignable certes mais indigne presque, ces sourires, ces images où hommes en veste/cravate, femmes en robe et hauts talons, teintes et coupes de cheveux, bijoux, élégance et sorties de restaurant, dont il ne sait rien, ne veut rien savoir sans doute mais tout de même regarde, recherche des images de ces personnes, individus, hommes et femmes d’allégeance et de politique et de fierté ? Des témoins de ce qui se trame, s’ourdit, s’achemine vers quelque chose comme la victoire de leur « champion » (la chanson de Queen, quelle merveille…), le pouvoir suprême des affaires et la main sur la domination… Des gens de l’entourage du type dans l’oeil du cyclone ces jours-ci (tant qu’on en viendrait à la plaindre :  mais ce serait oublier et omettre  tous ces actes qui, semaine après semaine, décrivent la réalité du pouvoir, de l’Etat et de ses servants). A nouveau, ici, donc, des photos, illustrations retouchées, rehaussées, illuminées si possible, de personnages toujours très diplômés, très souriants, souvent appartenant à de grandes familles, particules et capitaux financiers, sociaux, scolaires, de tous ordres, de droite, cela va sans dire, presque extrême, horreurs et dégoûts, tant pis, ici la maison(s)témoin est aussi celle des vampires et autres monstres de tout poil…

Je me souviens que Françoise Dolto préconisait à ses enfants (l’un d’eux racontait cette histoire, lors d’une émission de télévision à laquelle je participais, j’y étais acteur, tu le crois ça ? eh ben c’est la vérité…) quand ils avaient des gros mots à dire d’aller les éructer là où il le sied mieux à des personnes éduquées : les chiottes. Bon, ici il n’en est pas (déjà, j’en ai fait la remarque, je pourrais certes créer la catégorie pour y flanquer le billet qui vient afin d’ensuite l’envoyer aux égoûts, mais enfin), je le pose en gravats parce que les postes auxquels les personnes ici en portraits prétendent semblent assez compromis…

On s’acheminait tranquillement vers une conclusion hâtive. Il n’en sera(it) sans doute pas ainsi, pourtant : des élections, tous les cinq ans à présent, je me souviens fort bien de celle de quatre vingt-quinze où, durant ce mois de mai, les nervis du parti de la fille du borgne avait jeté dans l’eau de la Seine un type, un arabe, Brahim Bouarram, marocain. Il en était mort. C’est aussi qu’aujourd’hui c’est le 8 février et que je me souviens aussi du livre magnifique du fils d’une des femmes assassinées au métro Charonne, en soixante deux, Fanny Dewerpe, et le livre de son fils donc, Alain, dont j’aperçois ici qu’il s’en est allé voilà deux ans (en folio, Charonne, 8 février 62). Malik Oussekine, Adama Traoré, aujourd’hui Théo L.. Les blessés, Romain D. et d’autres, les énucléés, et tant d’autres choqués, blessés, meurtris…

J’ai entrepris cette recension mais le coeur n’y est pas, pourtant, il n’est pas à rire, non, tant pis. Je renoue, dans cette maison, avec les illustrations. Entrent ici donc des suppôts du candidat de la droite aux élections présidentielles d’avril et mai prochain. Ce ne sont pas des enfants de choeur, et cette chronique n’est pas un panégyrique. Il s’agit de connaître des visages, comme si des photos pouvaient en dire long sur ce qu’ils sont.

Dans le même ordre d’idée que lors du précédent billet (Pantoufles (rire jaune)) on part d’un article du journal (on va me réclamer des royautés bientôt -royautés, c’est mieux que royalties ? crois-tu ?) pour identifier ceux qu’on pourrait aussi bien, sans doute, trouver dans les divers organigrammes qu’à la presse les services de communication dévoilent comme s’il s’agissait d’un très saint Graal ou autre magie formidablement informée et orchestrée (la question des patronymes est réglée en fin de billet parce que ça va comme ça).

N’importe, ici, voici un homme et son fils (lui expédégé assurances privatisée lorsqu’il était au trésor, enfin on fait son chemin, et puis après les enfants grandissent et voilà ce qui arrive)

cravate, pas cravate, sourire pas sourire, barbalak ou pas, il fait doux sous le soleil, il fait doux dans les allées du pouvoir, ici un conseiller lorsque son mentor était à Matignon,

ici un autre, sa « plume » (comme on dit) toujours rive gauche (ces deux-là proches du pouvoir russe)

derrière lui le sourire du prochainement mis en examen, d’une part et de l’autre la piste du circuit du Mans (sans doute – il faut dire que le type qu’ils conseillent, et elles aussi, on verra, aime le sport automobile) (son frère aussi, tout autant) il fait doux, il fait beau, le ciel est clair, le temps marche pour nous, puis viendra un ex-Harvard business school, quand même l’ami américain

de vrais gens, stratégic manager, sans compter le suivant manager en chef (ex-pédégé numéricable entregent lobbying)

suivi immédiatement peut-être de son épouse (ex pédégère grand magasin fusion acquisition émoluments)

gent féminine sourire campagne horizon vent liberté, il fait doux

(le badge cnpf au revers -pardon medef, le cice, les 50 milliards, on peut en sourire, certes) (mais jaune, tu sais nono, jaune) et pour aussi les ingénieurs (syndicat ingénierie études et conseils, tu vois le flou de l’intitulé – sans doute le cabinet 2f y émarge-t-il)

la franchise, la loyauté, la rectitude des sentiments et des affects, ici ce qui me trouble (comme disait, tu te souviens, Fabius avec Jaruzelski tout ça) ce sont les talons (ici, la communicante en chef)

le sac aussi, bah c’est comme ça il faut se grandir, tu comprends mais la photo ça capture, à des moments inopportuns, l’apparition publique (ici fermons les yeux sur son appétence envers Ayn Rand, qu’on a déjà croisée, évidemment, lors des promenades en terre de mac carthysme de notre série « Sorcières ») (c’est que le monde des idéologies reste petit : juste tout contre celle du nouvel élu peroxydé et sa proximité avec les tenants du KKK) , la collusion qu’il peut y avoir avec ces milieux et ceux qui ont porté à leur firmament ce champion est incarné par ce conseiller

son champion a tant d’humour, bien sûr qu’on en rit, d’autres encore côtoient la banque (fatalement)

(petite vignette sans cravate, désolé – ni plus de notice), beaucoup sortent de l’école nationale d’administrations augmentée ici de Polytechnique (dircab)

recasé en fin de course, les images sont grandes pas vrai ? Prendre fait et cause pour un leader, politique depuis trente cinq ans, le suivre, l’aider, combattre ses adversaires et se tenir à ses côtés dans les moments terribles

autre énarque, puis avocat d’affaire fusions-acquisitions (comme nano 1 oui) ex-caisse des dépôts quand même parce que l’Etat et ses serviteurs – pour un temps – est tout de même une valeur (du moment qu’il les sert), ici l’un des plus fervents admirateurs de la carrière de ce poulain en couverture d’hebdomadaire qui ne fait pas dans la flatterie tu sais bien, vois

culture milliardaire, vas tant pis, et d’autres encore, qu’est-ce que ça peut faire, il fait tellement beau, la droite la plus bête du monde ? allons donc, ici l’instigateur d’entretiens intellectuels

(derrière lui, à la moue brillante – en d’autres temps on l’aurait qualifiée de sociale-traître – aujourd’hui gestionnaire région…) lui est conseiller spécial, ici son directeur de campagne (ex de l’adversaire « droit dans ses bottes », il faut savoir miser sur le bon champion, opportunément si possible)

proche de cette dernière

ah bah…

Avec la distribution par ordre d’entrée en blog : Henri de Castries et son fils Jérôme; Jean de Boishue; Igor Mitrofanoff; Nano 1°; François Bouvard; Pierre Danon; Laurence Danon-Arnaud; Dorothée Pineau; Viviane Chaine-Ribeiro; Anne Méaux; Bruno Retailleau; Arnaud de Montlaur; Jean-Paul Faugère; Antoine Gosset-Grainville; Marc Ladreit de Lacharrière; Jérôme Chartier; Valérie Pécresse; Patrick Stefanini; Madeleine de Jessey.

Avec nos compliments.

Le sourire

 

Non, rien n’est simple (mais on y revient) (voilà qui a l’air de fonctionner comme il faut) (On remercie toute l’équipe, mmes C.Jeanney et R. Lecomte, mr.G.Vissac pour le boulot de désinfection de la maison(s)témoin) (On y revient) (on a du retard…) (on remet sur le métier la même ouvrage d’il y a quelques semaines) (depuis que le temps est passé, on reprend un dimanche, depuis ce temps-là outre-atlantique – comme on disait du temps où on n’était plus dans l’organisation du traité de l’atlantique nord – un autocrate tente de gouverner la fédération des Etats-unis d’Amérique, mais dans la rue et ailleurs, on voit des milliers et des milliers de personnes, et on tente quand même de faire barrage à l’ordure et l’avilissement).

Il s’agit d’une histoire de mariage et de repas ( les repas, au cinéma – et pas seulement, dans la vie -, c’est quelque chose de signifiant, un peu comme les génériques : transversalement, on compare, par exemple, celui du « Festin de Babeth » (Gabriel Axel, 1987) avec celui de « Festen » (Thomas Vinterberg, 1998)). Ce film-ci est assez librement composé (il s’agit peut-être d’une litote pour dire que la mise en scène est parfois approximative). Deux frères (ici à l’image)

R PV DS 3

cuisinent pour une fête de mariage assez enlevée (ça se passe en Egypte, je ne me souviens plus exactement, je suis désolé j’ai oublié). Durant cette fête de mariage, on apprend qu’un mauvais bougre veut s’emparer de cette entreprise pour y installer quelque chose de neuf, de clinquant, performatif et financièrement avantageux : quelque chose d’exactement contemporain, pour tout dire. On danse cependant

on s’amuse, c’est drôle et vivifiant

ça tournera au drame, mais là n’est sans doute pas l’important : encore que si, certainement, mais comme ça se passe dans le monde musulman, ça vous a quelque chose de tellement libre que le drame – qui est partout, c’est entendu, non seulement au Moyen-Orient (comme on dit) mais aussi ailleurs (aux Etats, au Canada, au Carroussel du Louvre, j’en passe parce que je ne veux pas plomber non plus trop le truc) – le drame passe après l’amour

quel que soit l’âge… On remarque que le père des deux cuisiniers (lui qui a fait la boutique, tant et si bien que la rue où elle se trouve porte son nom, un peu comme Emile Littré, ici, à Paris, a été dépossédé de la sienne par un potentat de l’édition) se trouvera aussi dans l’embarras de l’amour (son grand âge l’oblige à user de substances qu’il ne parviendra pas à dominer), mais la morale, à la fin, triomphera quand même.

Ici, en cette maison(s)témoin, donc, entre « Le ruisseau, le pré vert et le doux visage » (Yousry Nasrallah, 2016), témoignant de la gaieté et de la joie de vivre d’un peuple espiègle et cultivé, aimant manger rire et danser…

Primus en Norvège

(quelle est donc cette façon de faire, de toujours rester accroché à quelque chose, qu’on aime, certes, mais qui n’est qu’une sorte d’habitude, qui ne vit que par soi, qui n’a pas d’autre ambition, d’autre but, d’autre fin ? A quoi est-ce que cela peut bien ressembler ? Impossible de trouver, sinon à de l’addiction, simple, comme celui qui a besoin de sa dose; le surmoi conquérant impose de continuer parce que on a commencé, et qu’on ne s’arrêtera pas; seul : Quichotte, mais Sancho Panza, son âne Rucio et sa Rossinante, Jules Maigret et sa femme à blanquette, ou Sherlock et son fidèle Watson – j’apprends que la réplique « alimentaire mon cher Watson » n’est jamais tombée de la bouche du détective violoniste et cocaïnomane – « élémentaire », non plus, t’inquiète ) (il ne fait aucun doute que ce film-ci, même s’il n’y a pas que le cinéma dans la vie, se trouvera dans la cuisine – et pas seulement du fait de la carte postale de L’aiR Nu) (à paraître) (ne suis-je qu’un héros de fiction et ne suis-je donc que cela ?) 

 

Le héros de ce film (« Bienvenus! » ou « Welcome in Norway« , 2016 ) se nomme Primus par une sorte d’antiphrase (interprété par l’acteur probablement fétiche du réalisateur, Anders Baasmo Christiansen) (le réalisateur se nomme Rune Denstad Langlo – je me documenterai pour savoir s’il s’agit de noms composés ou de deux prénoms, l’un figurant celui d’un père/aiëul/grand oncle par alliance – si quelqu’un passe et sait, qu’il-ou elle-m’informe…) : il n’est maître de rien, n’importe, il possède (venant d’un héritage, semble-t-il) un hôtel qu’il veut faire fructifier (l’hôtel reste à terminer) : l’Etat propose à ses administrés de financer l’accueil de réfugiés à hauteur de cent mille couronnes par tête (soit à peu près onze mille euros) et Primus en accueillera donc cinquante. Ils seront dans son hôtel comme chez eux du moment qu’ils effectuent les travaux, et que l’hôtel se trouve aux normes. Primus est assez raciste, en un sens, et pour lui il s’agit d’une affaire pour s’en tirer. Les hôtes arrivent : ils vient les chercher en bus à la gare…

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L’histoire rebondit (sa famille, sa femme, sa fille, tout ce joli monde vit dans le froid) (on l’a vue au 104 à Pantin), mais ce qu’on trouve de profondément différent c’est la place qu’occupent les femmes. Elles tiennent les commandes, d’une certaine manière. Ici, la policière et l’assistante sociale

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même à l’image, les hommes viennent ensuite (l’assistant social, l’hôtelier) :  un des réfugiés (qui n’a sans doute pas de papier) s’enfuit et tout le monde de le regarder faire (on ne peut pas l’attraper, il a passé une frontière communale…). C’est un film débonnaire, les enjeux sont de faire vivre ensemble une cinquantaine d’individus aux religions différentes (sinon antagonistes) dans un même lieu. Trois histoires se tissent, trois personnages les incarnent : ici Abedi (Olivier Mukuta)

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là Zoran (Sliman Dazi)

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enfin Mona (Elisar Sayegh)

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(à gauche, devant la femme – Hanni (Henriette Steenstrup) légèrement déprimée de Primus – et sa fille Oda (Ninni Bakke Kristiansen) qui veut mener sa vie et y parviendra sûrement). Trois personnages qu’on  suit dans les détours de l’histoire (un scénario structuré et serré), dont les destinées seront différentes, on s’en doute, mais on accepte de voir leurs façons d’agir tout en les partageant.

C’est burlesque, même si le sujet est grave. On rit, on s’amuse, on s’attend un peu à ce qui se passera, mais le plus important, c’est certainement qu’on dépassera sa peur de l’autre et des autres pour s’entraider : c’est sans complaisance et très sensible.

Ici Primus coupe des tranches de pain pour le buffet (à la scie circulaire…) (voilà pourquoi la cuisine)

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ailleurs il sera presque violé par la bibliothécaire (Line, alias Renate Reinsve

renate-reinsvequi elle aussi sait ce qu’elle veut), plus loin d’autres déploiements qui ne finissent ni en drame ni en tragédie (bien que la cruauté des diverses histoires affleure) mais donnent aux spectateurs du film un sens doux-amer mais tendre d’une sorte d’humanité où les religions, les couleurs de peau, les genres mêmes et surtout s’équivalent : l’important ne serait que des les unir… Lourde tâche cependant, mais probablement ici réussie.

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En tout cas, sans prétention, sans leçon à donner, assez comique et suffisamment profond pour faire réfléchir sur nos identités européennes (même si la Norvège, comme on sait, ne fait pas partie de l’union : mais, de cela, qui en a quelque chose à faire ? Pas les réfugiés, en tous cas…).

A voir.

 

 

 

Marvin

(foin de trêve confiturière ou point, confite ou autre, je vais à la mine) (de deux fois de suite convoquer le cinéma étazunnien prouve la puissance de l’objet : dans le même mouvement, temps, dans la même italique, on voit bien aussi qu’on en est baigné et qu’il ne sert peut-être à rien de tenter de s’en éloigner) (je pense souvent à ces idées-là, la Syrie ou l’Irak, la Libye ou la Tunisie, ces façons de vivre, mourir, naître ici ou là, les rêves souvent en cauchemar voir la cabine d’un camion, savoir que derrière soi pousse la cargaison de trente six mille kilos et avoir confiance en ses freins lorsque la route descend d’une pente à six degrés) (ces temps-ci, je l’avoue, j’ai la gorge un peu âcre) (je cite)

 

La pure merveille des films de ce DjiDji ce sont les relations qu’il parvient à instaurer dans les couples qu’il dépeint, met en scène, montre, représente. Dans son précédent « Only lovers left alive » (2013), déjà le couple entretenait ce type de proximité magnifique qu’on aimerait tant parvenir à instaurer avec les personnes qu’on aime, c’est vrai, c’est chaud, c’est tellement doux et ensemble, l’impression de ne vouloir, des deux côtés que le bonheur de l’autre  (les grands mots sont lâchés, mais si le cinéma ne les employait pas, c’est qu’il serait devenu inutile) (il faut aussi savoir que l’utilité, en art, n’a rien d’une mesure – mais le cinéma un art, c’est une question qu’on se résoudra à ne pas à poser: ici, on fait en sorte de donner à voir quelque chose d’un film, il est dans le salon -ou le séjour – parce que c’est dans cette pièce-là que le drame se noue).

paterson-sur-le-canape

(quelques photographies sont copyrigth Mary Cybulski, réalisatrice américaine – et donc photographe – il n’y a jamais très loin non plus, comme on voit, de l’image fixe à l’animée). Laura est sans doute plus la maîtresse du chien que ne l’est Paterson (ici à l’image): lui est conducteur d’autobus

paterson

dans cette vile qui s’appelle Paterson comme lui (ou l’inverse). C’est une histoire qui a lieu sur sept jours.

Comme la genèse, hein.

(Je suis allé voir un peu ce Paterson, j’ai trouvé ceci

autobus-depot-paterson-nj

on dira qu’il s’agit du dépôt de bus dans la réalité (quelle est-elle ? je ne sais pas), en regardant un peu j’ai aussi trouvé cela

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il s’agit des chutes d’eau qu’on trouve dans le parc historique de la ville – évidemment, je me suis renseigné pour savoir où Jim Jarmusch avait vu le jour -imagine-toi qu’il est de la même année que moi – et c’est dans une ville nommée Cuyoaga falls, chutes d’eau comme ici, les voilà

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ce me serait assez égal, mais il se trouve que cette ville (style 50 000 habitants) se trouve dans la banlieue d’une autre, Akron, laquelle est en relation directe avec l’équipementier pneumatiques Goodyear, là où j’ai commencé à travailler à seize piges, ce qui resserre encore l’amitié que j’éprouve pour ce Djidji-là).

Je ferme la parenthèse.

Le type conduit son bus et écrit des poèmes.

paterson

Sa femme, elle, est entichée de noir et blanc (elle est adorable, tout comme lui)

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tous les matins on les trouve tous les deux (en plongée – magnifique) allongés dans leur lit -dans les bleus et blancs, dis-moi, tous les jours il va bosser, écrit trois lignes, tous les soirs revient, replace la boîte aux lettres (déplacée par le chien – tant pis, c’est dit) dîne avec Laura, puis

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sort le chien (Marvin, ici son portrait

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derrière la salière blanche, la poivrière noire, dans cette petite maison que j’ai cherchée sans la trouver mais je suis à peu près certain qu’elle se trouve à Paterson) (en fait il s’agit d’une chienne, Nellie, à qui le film est dédié) (Nellie dans la vraie vie, tu vois ce que je veux dire) , puis croise ici un rappeur

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dans une laverie qui répète, il va boire une bière au bar, croise le patron, quelques connaissances, revient le plus souvent hors champ, en fin de semaine (pendant le week-end, si tu préfères), voilà que Laura vend des gâteaux qu’elle confectionne

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(même s’ils sont dans sa topique, on ne peut pas nier qu’ils soient magnifiques et c’est pourquoi) : elle les vend tous, gagne un paquet de dollars (286 si j’ai bonne mémoire) et invite son chéri à manger une pizza et au cinéma où ils vont voir une île du Docteur Moreau comme on n’en fait plus (Island of lost souls Ernest B. Shoedsack, 1932, version en noir et blanc évidemment) et ils rentrent à la maison (il m’a vaguement semblé que cette projection mettait en scène la jeune Laura, mais je ne suis pas complètement sûr).

Ca ne finit pas mal, ce ne sont que des mots (je ne dis rien, je ne veux pas dévoiler).  Il part se promener le lendemain

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et sur ce banc rencontre un japonais (tout comme Ozu Yashihiro) qui lui fait un cadeau, devant les chutes de Paterson.

Ce sera tout.

Une merveille.

En dédicace spéciale (Noël, nouvel an, tout ça)  à Pierre Ménard, à Dominique Hasselmann, et à l’Employée aux écritures pour son commentaire (et par suite, à Brigitte Célérier).

 

Dans trois mille ans

 

(publicité, propagande, j’ai beau faire attention à ce genre d’injonctions – si j’en vois une, je ferme… – comme j’aime le cinéma (même celui de chez l’oncle sam) j’en parle un peu avec des scrupules) (ce type d’italiques, en début de billet, ça permet de lancer la machine, mais c’est aussi, j’espère, dissuasif : sans un tout petit peu de sympathie pour Hollywood – une once, presque rien- on peut passer son chemin. Ici, dans la maison(s)témoin, on accueille toutes les sortes de fantômes goules et autres bizarreries, et c’est à peu près normal aussi qu’on y trouve des entités qu’on nomme « extra-terrestres » -bien qu’elles le soient, terrestres, évidemment, puisqu’elles ne sont que l’émanation d’esprits plus ou moins habités par ces histoires imaginaires – je les ai placées dans la chambre d’amis, parce qu’elles ne font que passer, et aussi dans la salle d’eau, parce que c’est sans doute grâce à l’eau qu’on parvient, ici, à les comprendre…).  

Ici, une jeune femme, linguiste (on l’appelle Louise – comme madame Brooks et ses araignées, au hasard – et Banks – comme je ne sais pas exactement quoi) (Amy Adams). Elle se trouve ici devant l’écran, une épaisse plaque de verre transparente sur laquelle, avec elle, correspondent les nouveaux venus (une douzaine de « coques », « vaisseaux » ou quoi que ce soit, habités par des genres de calamars à sept bras réparties sur toute la Terre (il ne s’en trouve point en France, désolé) – au fond de l’image, noire et grumeleuse : la paroi du « vaisseau »)

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Elle a l’honneur, ou la chance, ou le culot, d’entrer en relation avec des êtres supérieurs (sans doute) qui lui disent venir en ami sur cette planète afin d’aider l’humanité à surmonter ses divisions (entre US et Chine, malgré les efforts de Nixon, ce n’est pas, comme on croit le savoir, l’entente cordiale) (on ne parle pas – trop – de la Russie : la géopolitique du monde est changée depuis que l’union soviétique -ça fait bizarre de parler de ça, pas vrai ? – n’est plus). Plus loin, ces entités (nommée « heptapodes » -z’ont sept « pieds » – discutent par flots d’encres interposés, sont tout puissants, s’en iront à la fin dissous comme nuage de lait dans thé anglais…) veulent nous aider car elles auront, dans trente siècles – une paille – besoin de nous (disent-elles) (car elles connaissent, tout comme Louise, l’avenir). En tous cas, douze trucs arrivent sur Terre : l’armée est sur le pont (ici, l’armée et son chef, incarné par Forest Whitaker – sont moins bornés qu’à l’accoutumée…) (colonel Weber) (on pense à Folamour, et Sterling Hayden (alias Colonel Jack. D. Ripper…) et à ce que cette venue aurait pu provoquer chez eux…)

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On cherche et on finit par trouver : grâce à la culture scientifique (très scientifique) de ce garçon-là (très très scientifique, physicien en diable) (Ian Donelly, incarné par Jérémy Renner) on parvient à comprendre le langage des extraterrestres, et surtout leur but ultime.

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Même la CIA (dont on voit, dans l’image ci-dessus l’incarnation qui guette à la jumelle l’avenir) ne peut parvenir à mettre des bâtons dans les roues du (bientôt) couple. Et donc on discute le coup avec eux (les deux entités présentes aux US), et grâce à cette préscience dont est dotée cette mademoiselle Banks, on parvient à ne pas créer de dissension trop forte entre les divers Etats de cette planète afin de l’unir dans un but commun : continuer à vivre. Et à procréer (fatalement, pourrait-on suggérer) (on nous épargne la scène de lit, merci). Las, la progéniture est atteinte d’une maladie incurable… C’est donc en vain, en un sens, que tout ce qui a été entrepris se sera résolu. Mais enfin, nous verrons : dans trois mille ans puisque les fantômes s’en sont allés, et que la planète, elle, continue de tourner…

Le film (budget : 47 millions de dollars quand même) (en a rapporté, pour le moment, plus de trois fois plus…) (le cinéma est une (très) bonne affaire et aussi – bizarrement ? – le premier poste d’exportation du budget étazunnien, stuveux) est assez dramatique, le montage très alambiqué (on croit à des flash-backs, mais c’est l’inverse), l’image parfaite, les effets spéciaux réussis (on pensera à nouveau à Stanley Kubrick pour les changements de gravité entre l’intérieur du « vaisseau », et la Terre) : un beau film de science fiction au cinéma, ce n’est pas si courant…

 

La vraie nature du monde

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Il y a là plusieurs histoires qui, toutes, se groupent pour donner un portrait de cette société-là (un groupe, une secte, une association : des hommes, pour la plupart, qui ne reculent devant rien pour asseoir leur pouvoir) – le wiki du film en compte cinq, c’est possible – il y a eu aussi une série télévisée tirée du livre de Roberto Saviano – un contrat doit être sur sa personne, il me semble qu’il doit être protégé par la police où qu’il soit – je ne sais pas grand chose de cette histoire- là je me documente, certes, mais les choses ne sont pas simples, non plus – c’est un lieu du monde qui doit se garder d’éclairages et de mises au jour – le type vit à présent à New-York, ou Hollywood, gardé par des flics dit la gazette – c’est un film qui raconte comment on entre, comment on s’adapte à cet univers, comment il faut montrer pour cela une espèce de courage.

Comment être au monde… enfin dans ce monde-là (le nôtre…?).

Au fond et typiquement un  tropisme masculin. Trahisons, haines, vices et trucages, mensonges et comédies, initiations idiotes et croyances imbéciles. Tisser une toile sur laquelle se peint la vraie nature du monde (on peut espérer que ce n’est pas la seule…) : ici comme ailleurs.

Le drame se joue à Naples, sans doute quelque faubourg (la documentation rapporte que l’auteur du livre dont est tiré ce film est originaire du lieu (Casal di principe, un quartier du nord de Naples) et que du fait qu’il donne les vrais noms des vrais gens, ceux-ci lui en veulent à mort).

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On veille, on guette (le sous-titre qu’on ne voit pas dit « gendarmerie dans la rue…! ») : descente de police

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tout le monde fuit – on tire on saigne, on meurt – des jeunes gens, ils n’ont pas vingt ans, ils reprennent ce qu’on faisait dire à Al Pacino (« Scarface », presque remake de celui de Howard Hawks (ah Paul Muni…)(1932) de Brian de Palma, 1983), « boum boum boum !!! » assène Marco à son acolyte Piselli (des jeunes gens, qui meurent, ceux qu’on voit sur l’affiche du film

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grand prix du jury à Cannes en 2008 sous la présidence de Sean Penn ), le titre probablement une contraction de Gomorrhe (l’une des deux villes ensevelies sous le feu de Dieu, selon la genèse) et Camorra (la mafia napolitaine), j’ai pris des images du film-annonce, travaillées recadrées, j’ai tenté de faire quelque chose, mais le point n’y est (toujours) pas

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on ne cesse pas de compter les billets de banque, on enfouit des centaines de tonnes de déchets toxiques (800 tonnes ? oui, 800 tonnes… c’est illégal, ah oui)

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c’est qu’il n’y a aucune loi, sinon celle du plus fort, du plus riche, du moins regardant, on s’en fout, on flingue, on entraîne des jeunes types de quinze ans ou moins

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on tire dans le tas, on s’en fout on veut qu’ils meurent, on veut qu’ils perdent, du sang, de la haine, et pas la moindre (ou si peu) présence de l’Etat – c’est une certaine idée de l’Italie, de la démocratie tout autant – et pendant ce temps-là Berlusconi gouvernait… – trahir, toujours : ici le portrait du « caissier »

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qui vient, pour les capi distribuer de l’argent aux familles de ceux du clan qui sont en prison… (il n’y en a jamais assez, d’argent)

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On apprend à la fin du film, avant le générique, que l’argent de cette société s’investit aussi dans la reconstruction du Ground Zero (Sol zéro, ici à l’image gsv 2013) en remplacement du world trade center tours jumelles : il ne fait pas de doute que l’argent n’a pas d’odeur.

Pantoufles (rire jaune)

(que de tergiversations, c’est sans doute la paranoïa qui me guette, j’ai supprimé le billet, voilà que je le repose – mais je n’ai que les images… OSEF dirait ma fille, alors OSEF) (les pantoufles, on les met dans l’entrée) (OSEF c’est on s’en fout) Mais on doit, quand même aussi, de loin, peut-être, mais quand même, essayer de faire vivre ce lieu. J’essaye, je m’y essaye. Il y a aussi de la prétention à présenter ce type de personnages un peu comme des clowns, burlesques et espiègles, qui rient, font des mines et amusent une galerie -celle présentée ici, par exemple – mais est-ce que ça amuse vraiment ? En tout cas, pas moi, ou alors avec aigreur (la bile, peut-être, l’envie de gerber, certainement) (et du coup, disqualifier le travail : l’emploi de mots plus ou moins grossiers permet à certains de s’en aller… C’est pas facile, la vie, tu vois…)

C’est à la suite de la lecture d’un article du mensuel le Monde Diplomatique (novembre) auquel je suis abonné que m’est venue cette idée de mettre sur des noms des visages. Il s’est agi de trouver qui, dans ce monde de brutes, tient en main celle (invisible) du marché. Depuis la venue de cette idée, donc, le ministère s’est débarrassé de son premier (nano  2 pour les intimes), a rajouté une couche en mettant à sa place celui qui, à l’intérieur, a couvert les agissements de cette police à Sivens, à Notre_Dame_des_Landes, et partout lors des manifestations contre la loi travail (ni loi, ni travail).

Je m’égare sans doute, machin a dit qu’il n’irait pas. La plupart de ces personnages (et bien d’autres) sont passés par un institut, la French American Foundation, association loi 1901, mais oui ma chère. Ladite association aide le personnel politique et médiatique à comprendre la vraie réalité du marché (occident, ultra-libéral, privatiser les profits et socialiser les pertes notamment celles des banques, privées va sans dire).

Ladite association a ses locaux avenue de New-York, au trente quatre dit la chronique (quai rive droite, c’est dans le 16 mais tout près du 8, t’inquiète).

34-avenue-de-new-york

C’est là oui : un type est appuyé et suit le robot des yeux (sous ses lunettes noires, je crois qu’il porte main gauche son portable)

34-avenue-de-new-york-2

On ne voit pas bien (OSEF).

Le 5 décembre dernier, probablement en la galerie des glaces du château de Versailles, avait lieu la commémoration par un dîner de gala de ses quarante ans de règne sur le lobbying pro-US mené ici. IL y aura monsieur Valéry Giscard d’Estaing

french-american-foundation

(alias crâne d’oeuf). C’est sous son règne que la fondation a été créée

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(il avait des sympathies outre atlantique aussi, comme en Afrique on se souvient de ses chasses, tout ça). Il y aura aussi à ce dîner monsieur Michael Bloomberg

m-bloomberg

homme d’affaires étazunnien (ancien maire de New York, huitième fortune du monde dit la gazette). Du beau linge. Des gens comme il faut et comme il en est des milliers, voilà tout : connaître le sens où soufflera le vent, et s’y plier. Ici le sourire de celui qui dirige cette fondation (qui est aussi, on ne se refait pas, président du directoire de Vivendi) : monsieur Arnaud de Puyfontaine.

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L’article dépeint les parcours de ces gens qu’on nomme pantouflards, qui passent de responsabilités au sein de l’Etat à d’autres, dans des grands groupes, entreprises multinationales, transfontalières etc. qui dictent au marché ses lois et ses règles : on délocalise ici, on profite des zones franches là, on se sépare (le salarié, variable d’ajustement comme on sait), on va voir si on peut s’installer dans ce joli paradis sans impôt et autres joyeusetés que le monde de la finance ultra-libérale crée depuis (au bas mot) deux décennies. Premier d’entre ces parcours

jmbarroso

celui de monsieur José Manuel Barroso, qui passe de la présidence de la Commission européenne au conseil d’une grande banque (celle-là même qui a aidé la Grèce à falsifier ses comptes, passons).  On trouve aussi madame Neelie Kroes (même parcours, autre banque, juste)

neelie-kroes

En même temps, pourquoi coller ces sourires dans la maison-témoin ?  Longtemps je me suis posé la question, et puis il s’agit juste d’une curiosité, à quoi ressemblent-ils donc ? La vérité oblige à dire que les illustrations sont choisies : on les a prises souriantes, parce que la vie est belle. Du moins, sans doute (on doit l’espérer) pour eux.

Monsieur  Karel de Gucht, grand défenseur auprès de la Commission du traité (mort, on l’espère) (le traité, pas le monsieur) transatlantique devient consultant.

karel-de-gucht

Vient ensuite monsieur Mario Draghi (banque, puis banque d’Italie, puis banque centrale européenne)

mario-draghi

(c’est en effet très marrant). On va ici, on revient là, on multiplie son salaire, ses stock-options, et on continue : qu’est-ce qu’il y a à dire, sinon bravo ? Je ne sais pas. Aux US, c’est ce qu’enseigne la fondation du début, ces allers et venues sont pléthores, normaux, recommandés. En est un témoin marquant monsieur Ben Bernanke (celui qui a sauvé les banques en 2008, par exemple

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et qui y travaille à présent) C’est beau, c’est grand, c’est généreux. C’est surtout tout à fait normal. De même, monsieur Timothy Geithner, secrétaire au Trésor US qui rejoint un grand fond d’investissement.

timothy-geithner

On apprend que cet état d’esprit s’est emparé de nos élites au milieu des années quatre vingt, avec le passage de monsieur Simon Nora

simon-nora

du rang de grand commis de l’Etat à la banque Shearson Lehman brothers (laquelle, oui, tout ça, en 2008). Ce fut ensuite le cas de monsieur Jacques Mayoux (le créateur de la taxe sur la valeur ajoutée, l’impôt le plus inégalitaire – et le plus important), qui s’en va représenter la filiale française d’une grande banque étazunienne (pas trouvé de photo, souriante ou pas).  Puis l’ancien directeur de cabinet de monsieur Jacques Delors, monsieur Philippe Lagayette

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(qu’on voit peu sourire sur les images : ce ne doit pas être, non plus, tous les jours marrants) puis ancien directeur de la Caisse des Dépôts, qui rejoint une banque étazunienne. Tous ces ponts, toutes ces facilitations pour fusions-acquisitions-regroupements sont évidemment parfaitement légales, il n’y a rien à en dire. Ainsi monsieur Charles de Croisset

philippe-lagayette-vignette

(qui en sourit un peu) va d’une banque française à une autre étazunienne; monsieur Jean-François Cirelli

jean-francois-cirelli

passe de Gaz de France-Suez à Black Rock, l’un des gestionnaires d’actifs les plus puissants au monde. Ca va bien, en effet. Ainsi en est-il aussi (ça va bien, elle trime dans le luxe aujourd’hui) de madame Clara Gaymard (c’est la femme à Hervé, neuf enfants, fille du professeur Lejeune lobbyiste anti-avortement – on se souvient à peine de l’appartement qu’elle et son mari envisageaient, il a fallu reculer, cette fois-là)

clara_gaymardlaquelle a favorisé le rachat par General Electric de la division énergie du groupe Alsthom (le « h » est tombé, de ce coup là). Las ! Dès que ça a été fait, monsieur Jeffrey R. Immelt

jeffey-r-immelt

s’en est séparé… L’ingratitude des puissants…

En prison

 

 

Bakırköy Kadın Kapalı Cezaevi C 9 Koğuşu : telle est l’adresse où on peut envoyer des mots, des lettres, des avis d’existence et de soutien à Asly Erdogan emprisonnée depuis plusieurs mois pour délit d’idée. Ecrivain, femme, libre : les atouts pour la prison, peut-être – si nous ne faisions rien – à vie.  On garde de l’espoir – on a une adresse, les mots,les lettres, les soutiens lui parviendront-ils ?

On  a des outils (même si on les agonit, parfois) : copier/coller dans la barre de navigation, on arrive ici

bakirkoy-zero-gsw

le surlignage bleu correspond aux lieux visités photographiés répertoriés par le robot. On voit l’aéroport Mustapha Kémal-Atatürk à gauche (on sait comme on aime ces dispositifs ici)

bakirkoy-gsw-aeroport-1

et à droite cadre, l’île où le robot n’allât point, à côté d’un stade de baskett à la mode, on découvre

gsw-bakirkoy-2

la prison où est enfermée, entre tant d’autres femmes pourtant, celle à qui cet article de la maison(s)témoin  est destinée : la prison pour femmes de Bakirköy, à l’est d’Istanbul, c’est en Turquie où sévit un autocrate ancien joueur de football semi-professionnel dit sa notice wiki (aussi bien Ronald Reagan fut-il acteur de second plan). Le robot donc n’est pas admis aux abords, les satellites sont loin, mais les optiques fortes

gswbaikirkoy-3

on pratique par zoom avant

gsw-bakirkoy-7

(ici le robot vous gratifie d’une vue dite en trois dimensions, on n’y croit que peu, mais le nord n’est plus en haut, on est un peu perdu), retour au système référentiel normal

gsw-bakirkoy-4

toits rouges, on les aperçoit si on se positionne près du stade de sport

gsw-bakirkoy-5

de plus près je ne puis.

Mais plus loin, et plus avant dans notre monde qui communique, on parvient à un site. Il s’agit d’une présentation commerciale comme une autre au fond : on informe sur ce que se trouve à l’intérieur, par des photos afin de faire connaître (mais à qui sinon aux personnes libres ?) où sont enfermés leurs proches, j’imagine… Entrée :

entree

(les traductions sont du robot), vue de dehors :

prison-1

(quelle photo…), puis les salles diverses, d’autres la cantine (le restaurant : les nappes…)

restaurant

la salle de spectacle (sans doute sous les regards d’Ataturk ?)

salle-de-spectacle

salle de travail :

salle-de-travail

dentiste :

dentiste

(on voit aussi l’infirmerie, la salle où ont lieu les visites, d’autres encore) la bibliothèque

bibliotheque

le salon de coiffure :

salon-de-coiffure

toutes sortes de choses qui se tiennent dans des pièces fermées de grilles, mais le plus formidable, bien sûr, comme on le voit, c’est que sur ces photographies, il n’y a personne…

En Turquie, les prisons sont pleines.

Tu sais quoi, ce monde-là, celui qui se permet de donner en spectacle des lieux où des détenues subissent des peines, sont privées de la moindre des libertés, ce monde qui exhibe ces lieux, ce monde-là (n’)est (pas) le mien.

Dur de s’en rendre compte.

Je préfère regarder d’autres images plus représentatives de la beauté du monde : j’ai longtemps cherché dans mes tentatives d’illustrations des aéroports (ceux visités par l’avion solaire notamment) des avions en vol. C’est ici que je l’ai trouvé, alors pour elle, pour elles toutes, et pour eux, pour eux tous, emprisonnés par des lois iniques, absurdes et inhumaines ici cet envol

avion-envol-istanbul-2

et une vue du même réalisé en trois dimensions

avion-envol-istanbul

Tenir, tenir encore et ne pas lâcher.

Diacritik relaie tous les jours des textes d’Asli Erdogan, une pétition est lancée pour sa libération.

Sur L’aiR Nu une page initiée par Anne Savelli qui donne à entendre d’autres textes.

Pour ne pas les oublier, ni elles, ni eux.

Série sorcières #4

 

 

Au début, ils étaient dix neuf (les photos, on les trouvera) puis ils ne furent que dix à être « entendus » par cette commission (les enfants, tu sais comme ils sont adorables et pertinents surtout, appelleraient certainement ça la grosse commission) (les guillemets à « entendus » parce que personne ne risque d’entendre ou d’écouter ce que ces gens ont à dire : le juge John Parnel Thomas fait taire, point). Et les dix, les voici avec deux de leurs avocats

12 Dec 1947, Los Angeles, California, USA --- Cited for Contempt. Los Angeles: Nine of Ten Hollywood writers, directors, and producers cited for contempt of Congress, await fingerprinting in the U.S. Marshall's Office after they surrendered. They are (left to right), Robert Scott, Edward Dmytryk, Samuel Ornitz, Lester Cole, Herbert Biberman, Albert Maltz, Alvah Bessie, John Lawson, and Ring Lardner, Jr. Dalton Trumbo is scheduled to appear shortly. These are the men who refused to state whether or not they are Communists when questioned by the House Un-American Activities Committee in Washington recently. --- Image by © Bettmann/CORBIS
12 Dec 1947, Los Angeles, California, USA — Cited for Contempt. Los Angeles: Nine of Ten Hollywood writers, directors, and producers cited for contempt of Congress, await fingerprinting in the U.S. Marshall’s Office after they surrendered. They are (left to right), Robert Scott, Edward Dmytryk, Samuel Ornitz, Lester Cole, Herbert Biberman, Albert Maltz, Alvah Bessie, John Lawson, and Ring Lardner, Jr. Dalton Trumbo is scheduled to appear shortly. These are the men who refused to state whether or not they are Communists when questioned by the House Un-American Activities Committee in Washington recently. — Image by © Bettmann/CORBIS

(je me demande si c’est joli joli de poser une photo comme ça de chez truc en copyright : si c’est pas beau je la recadre, y’a trop d’air gauche cadre, t’inquiète) en tout cas, on les voit là, ils ont tiré un film de cette aventure (si on peut appeler ça une aventure, une descente aux enfers intitule cet épisode l’auteur du livre en référence) réalisé par John Berry (visible ici), en 1950, dix (la plupart scénaristes) à ne pas vouloir répondre à la question de savoir s’ils sont, ont été, ou seront communistes. Ne pas répondre, c’est une insulte au tribunal : sanction, la prison – une année. Et en sortant, être certain de ne pas retrouver de travail (et donc prête nom, embrouilles et  départs souvent soit vers la côte est soit ailleurs, en Europe – Londres ou ailleurs). Charlot n’en est pas revenu (merci, les états).

On sait qu’ils ont été dénoncés par le FBI (en ouverture de ce billet, l’image bonhomme de son chef : Hoover, 48 ans de maison) lequel avait aussi la possibilité de se renseigner ailleurs, dans une certaine presse, par exemple le Hollywood Reporter, en la personne d’un certain Billy Wilkinson (ici à l’image avec Norma Jean Baker (en spéciale dédicace à Anne Savelli) alias Marylin Monroe (fin des années 50 je suppose) et avec Cary Grant -en 34, date de son  portrait).

1934-billy-wilkerson-directeur-hollywood-reporter-1-liste-de-supposes-communistes

Délation, mensonges, suspicion, un tas d’ordures, deux ans après la fin de la guerre et les bombes atomiques, l’extrême droite au pouvoir, et la haine des communistes en action. On n’a pas à juger, certes. Seulement des centaines de vies ont été, de ce fait et dans les années qui vont venir, gâchées, brisées, foutues en l’air par ces gens. On ne juge pas, mais que reste-t-il aujourd’hui du maccarthysme ? (le sénateur qui mettra tout son zèle au service de cette chasse, et qui finira alcoolique en 58, mort dans sa haine) eh bien, voilà tout. Les états unis, le sud raciste, un mur contre le Mexique qu’on construit à nouveau, encore et toujours, et encore, le peroxydé facho aux commandes (et écrire ces mots blesse, on espère dans un sursaut, quelque chose mais quoi ? l’élection est légitime, même s’ils sont moins nombreux à avoir voté pour lui…)

Ils étaient dix neuf à être convoqués par cette commission qui n’en écoutât que dix. Puis, des centaines de types et de femmes furent interdits de travail dans le cinéma c’est aussi simple, stupide et ignoble que ça. Demain, l’administration de la pourriture sortie des urnes censitaires des US déclarera que la population devra se déclarer musulmane ou non, sous peine d’amende, ou plus encore. Demain, au pilori, jettera-t-on d’autres humains, seront -ils lapidés comme dans les pires dictatures (on pense à « Timbuktu » (Abdherramane Sissako, 2014), on pense à Pierre Fresnay dans « Le corbeau » (Henri-Georges Clouzot, 1943), on pense à Joseph Losey et à tant et tant d’autres…) ?

Episode frappé au coin de l’actualité (aujourd’hui, on nous assomme de « résultats » d’une consultation où l’emporte, dit-on, la plus obtuse et fermée des opinions – anti-avortement, pro-abolition de l’impôt sur la fortune, anti-code du travail, pro-entreprises décomplexées, laquelle vit en château et se goinfre – de rillettes, probablement). Et probablement aussi, dernier épisode de cette série témoin de la bêtise et de l’obscurantisme.

Vive le cinéma.

 

 

 

 

Série sorcières #3

 

 

 

La suite des témoins à charge, qui fait la part assez belle aux producteurs de l’époque, commence par l’apparition de Jack Warner

jack-warner(1892-1978) qui avait trois frères (Harry, Albert et Samuel) (il les a évincés et escroqués : esprit de famille, sans doute… Harry en est mort), tous dans les débuts dans cette même affaire de cinéma (on dit « la Warner » comme la « Metro Goldwyn Mayer » ou la « Fox »), les voici ces quatre millionnaires (homme/blancs/cravates…)

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difficile de trouver ce type de dessin sympathique, mais que fait-on ici sinon divulguer des visages (plutôt) inconnus de gens qui exprimèrent leur haine du communisme, leur défiance vis à vis d’une idéologie dont, en effet, on avait à se méfier ? Une façon de dire qu’on appartient au « monde libre » ? L’autre ne le serait pas, ou moins ?

Vint ensuite un autre patron d’un des grands studios, celui à la lionne qui rugit « c’est l’art qui reconnaît l’art » -quelque chose comme ça- Louis Burt Mayer (1884, né à Minsk- 1957)

louis-b-mayer

on s’emploie à dire son existence, sa foi, sa dignité – difficile de ne pas souscrire à ce type de discours, mais pour quoi faire ? Dire et dénoncer… (où est Spyros Skouras, président de la Fox ? je ne sais…) (mais on va cependant poser une photographie de lui – un peu déboutonné…- accompagné de Marylin Monroe en spéciale dédicace à Anne Savelli qui travaille sur le sujet

spyros-et-norma-jean

de la seconde blonde, je ne connais point le patronyme…).

Vient la seule femme à paraître Ayn Rand (1905-1982) auteur d’un best seller, ex-soviétique, qui apporte à cette barre des injonctions :

ayn-rand1905-1982

ne pas dénigrer les industriels, ni la libre entreprise et l’individu indépendant, ni la richesse, ni le profit, ni le succès… C’était au siècle dernier, il n’y a pas soixante dix ans (soit l’âge du nouveau président us soutenu par le klan, lequel correspond tant à ces injonctions…). Viendront ensuite des célébrités, ici Gary Cooper (1901-1961)

Portrait of American actor Gary Cooper (1901 - 1961), dressed in a cowboy hat and a short-sleeved shirt, 1950s. (Photo by Hulton Archive/Getty Images)

puis voici Robert Taylor qui danse -l’autre type viendra plus tard à la barre, Ronald Reagan –

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(c’est aussi qu’on aime s’amuser) (le regard de la cavalière de Reagan est à mettre au compte de l’amour qu’il inspirait alors), il y aura aussi Leo MacCarey (1898-1969, réalisateur producteur de nombreux films de Laurel et Hardy)

leo-mccarey-11898-1969

puis Robert Montgommery (1904-1981)

montgomeryrobert-1904-1981beau mec non ?(enfin les photos aident, et les comédiens savent se tenir) des idées frelatées trois ans après la fin de la guerre, des bombes atomiques, inspirées par les pires idées qui puisent être, en droite ligne des coups les plus tordus (ici par exemple -la photo doit dater du début des années soixante dix, Richard Nixon et John Edgar Hoover (1895-1972)

hoover-et-nixon

le type à la tête du FBI -federal bureau of investigations – durant 48 ans quand même…) : marigot ou simplement rouages de l’Etat, coulisse du pouvoir ? (on a vu, il y a très peu, ce que ce bureau fédéral de renseignements avait en tête vis à vis d’Hillary Clinton, par exemple : mais nous avons, nous autres, à nous méfier aussi du « tous pourris » qu’emploient si aisément ceux qui lorgnent ces mêmes pouvoirs…). Outre ces deux promis à (comme on aime à dire) la « magistrature suprême » du pays US, à la barre viendra

georges-murphy-1902-1992

un certain Georges Murphy (acteur, 1902-1992) puis encore celui-ci (qu’on vit dans « Les Sentiers de la Gloire » par exemple (Stanley Kubrick, 1957)

adolphe-menjou1890-1963cet Adolphe Menjou (1890-1963). Enfin, vint à la barre Walt Disney (producteur, 1901-1966) qui nous a donné un autre donald (cette photo date de 1954) (entre ce deuxième canard, le type d’Ankara qui emprisonne à tour de bras, et celui du kremlin qui se débarrasse des journalistes gênant -voir Anna Politovskaïa – on a un trio contemporain qui me fait furieusement penser à celui qui s’exerçait dans les années 30 en Europe, bénito, adolphe et antonio – l’histoire ne répète pas, mais bégaye-t-elle ?)

walt_disney-1954

Ici donc, cette galerie de types tous plutôt souriants, qui témoignent devant cette cour des activités anti-américaines qui, bientôt, va en condamner d’autres à la prison (les « Dix d’Hollywood » qu’on verra dans le billet suivant) pour des idées qui ne leur plaisent tout simplement pas (en spéciale dédicace à Asli Erdogan, emprisonnée en Turquie, contre laquelle est requise la prison à vie…) (et à Olivier Bertrand, en ce samedi 12 novembre, journaliste en garde à vue dans le sud de la Turquie – il a été libéré dimanche 13 novembre).

 

Suite et fin de la série : #4