Jusqu’au bout du monde

 

(ce n’est pas tant que ce film ait besoin qu’on en parle-grand prix du jury à Cannes cette année ça va plutôt bien pour lui – sans compter la pléiade de vedettes -elles sont cinq qui tiendraient seules chacune un film à bout de bras et hors de l’eau-, mais c’est cette façon de parler le français qui fait avancer le truc : le cinéma des US des fois ça va bien) (on ne parle guère du cinéma indien, tu vois, philippin ou je ne sais pas trop ces industries d’autres pays – a-t-on le droit de dire « je ne sais pas trop » j’ai peur que non, il faudrait chercher, j’ai pas le temps je ne sais pas où et les semaines succèdent aux précédentes) (en même temps, c’est aussi une affaire un peu sotte que de parler d’un film qu’on a vu : il faudrait faire l’inverse) (tant pis) 

Ce sont donc cinq rôles, un premier disons

gaspard-ulliel

(Gaspard Ulliel, Louis) et quatre autres (seconds ?). Les voilà tous autour de la table, on ne voit guère Vincent Cassel -il est en bleu – c’est le fils à Jean-Pierre- il jouait dans la haine il y a vingt ans -ici Antoine)

famille-a-table

il s’agit d’une famille (point de père : est-il seulement celui des trois, ou y a-t-il un secret ?), on reconnaît la mère (Nathalie Baye, en brune : Martine) puis sa fille ( Léa Seydoux, en tatouée dite Suzanne) au fond le fils par qui le scandale n’arrivera pas (Gaspard donc), l’aîné des enfants donc Vinz, et un peu de dos la bru (Marion Cotillard, Catherine). Il y aura bien un petit rôle de silhouette dans la scène de lit mais on l’oublie bien qu’il soit au centre du mutisme qui s’emparera de Louis – ou alors celui-ci (son mutisme) était déjà programmé (mais auquel cas il n’y aurait point de film). Louis vient annoncer sa mort prochaine à sa famille qu’il n’a pas vue depuis douze ans. Il ne l’annoncera pas (n’y parviendra pas, probablement), mentira sans doute en disant qu’il reviendra souvent, puis s’en ira. Unité de temps, de lieu, d’action (on passe sur les flash back qui mettent en scène Louis, un peu Antoine, un peu pas mal Pierre -son ami d’enfance, amant, amour, qui vient de mourir).

C’est un film qui reprend la trame d’une pièce de théâtre écrite par Jean-Luc Lagarce (librement adapté, dit-on)

jean-luc-lagarce

mort du sida en 1990. Ressent-on quelque chose de ce théâtre , sans doute (le carton de début dit « quelque part, il y a quelque temps » sans autre forme de précision), une espèce d’huis-clos, quelque chose de la contrainte, de l’autobiographie ? Peut-être, mais en sortant de la salle (où était-ce ? sur le quai de Seine, vu que le film est co-produit par cet exploitant-prod-distrib), je me disais que le pacte qu’on a avec un film était rompu : on sait que Louis va annoncer sa maladie sa mort prochaine qui lui vient d’elle – ou invente-t-on ? je ne sais plus exactement…- , mais puisqu’il vient dans ce but revoir sa famille (comme une dernière fois) tout tient sur cette annonce, une espèce de suspens peut-être; comment va-t-il s’y prendre – on voit bien ses réticences et ses difficultés, il en parle avec son amant-ami-mari au téléphone (est-ce bien un homme au bout du fil, je ne sais pas bien : il faudrait réentendre pour déterminer l’indice qui nous conduit à le savoir, ou le croire) – mais d’annonce, point.

On dira c’est l’incommunicabilité qui est mise en scène. Bof. Mais en français, en tout cas. Ca rappelle un peu ce qu’on disait des personnages du nouveau roman à une époque (qui brisait, parfois, le pacte avec le lectorat). Ca rappelle aussi ces films qui disposent d’une fin qualifiée d’ouverte (c’est au spectateur comme il l’entend de finir). Ca ne me plaît pas. Ca n’a pas d’importance, c’est vrai, mais c’est dommage (les acteurs, même Vinz/Toineau, ont quelque chose qui indique une direction forte et maîtrisée) parce que ça n’aide pas à croire en ce cinéma-là, or le cinéma, c’est l’art de l’illusion par excellence, et donc de la foi…

Cuisine équipée sur mesure

Il existe des catalogues de cuisines équipées, dont on choisit l’ensemble des éléments sur mesure. Découvrez un catalogue unique de vraies cuisines tendances : cuisine brillante, cuisine matte, cuisine esprit bois. Ce catalogue interactif met à votre disposition une sélection de cuisines contemporaine, design, moderne. Dans la maison-témoin, la cuisine est équipée pour correspondre parfaitement à l’image qu’on veut donner aux clients potentiels, sur mesure. Confiez vos rêves à l’un de nos 200 concepteurs de cuisine en magasin. Avec nos 100 modèles et 10 000 combinaisons différentes, vous êtes certains de pouvoir composer avec lui la cuisine idéale, celle que tout le monde va vous envier !

Couleur d’ambiance : neutre, chaud ou froid ? Je choisis neutre. Pour l’aménagement de la pièce, ma préférence va vers un design moderne, original avec une forme de L. et un îlot central. Pour les matières et les coloris, je retiens clair et mat. Avec une surface et coin repas pour 4 personnes. Une cuisine aux tons neutres qui jouent avec les matières (façades acryliques brillantes, plan granit aspect cuir, bois, inox…). Conception et réalisation de niches décoratives sur mesure pour donner un peu de vie à l’ensemble. Et l’implantation d’un îlot central pour la convivialité et l’espace repas.

Dans ce décor aseptisé, si des aliments devaient être exposés dans les placards (boites de conserve, bouteilles de toutes tailles, pots de confiture, de condiments) ou sur les étagères (fruits, légumes, herbes aromatiques) pour donner à l’ensemble un cachet supplémentaire, un supplément d’âme, voire ajouter de la vraisemblance, ils seraient similaires à ceux des vitrines des restaurants japonais, une pâle imitation de la réalité, en plastique coloré. J’imagine parfois qu’un vendeur aura un jour eu l’irrépressible envie de manger son sandwich entre deux visites de clients, et n’aura pas pris le temps de sortir de la maison pour le faire, laissant sans s’en rendre compte quelques miettes sur la table de travail, miettes qu’un visiteur en les voyant trouvera sales, indécentes et déplacées, dans cet univers aseptisé, où tout est rangé, calme et propreté.

l’îlot central

Entre la cuisine avec sa table de petit déjeuner et le coin-repas avec son îlot central, la maison hésite entre deux styles distincts, deux manières de vivre offertes aux adeptes du cuisiner tranquille et du petit déjeuner en catimini, qui n’exclut pas le must de nos cuisines contemporaines, l’îlot central, ici uniquement à fonction de table surélevée avec tabourets hauts, et qui n’est plus central que du coin-repas.

Quelque chose d’une tour de contrôle des calories, voir de haut les menus dans l’assiette, que certes on mange encore ensemble, on s’assied à la même table, mais on se surveille. L’îlot central comme quart operator, celui qui divise  les portions, et qui dans la lumière forte d’un laboratoire transforme l’ordinaire pain quotidien, le frichti de nos grands-mères, le repas qui tient au ventre, l’avachissement sur un coin de table des fins de repas en un acte maîtrisé du corps, la bouche qui escompte ses bouchées, la colonne vertébrale roide, un certain inconfort du siège précipitant la durée du repas, le vingt-minutes chrono accordé à la nécessité de se nourrir, la lenteur de la satiété remplacée par l’esthétique du décor, on se met en scène mangeant, on mange dans le magazine de déco, on est contemporain, c’est-à-dire sain, sobre et rapide, traitant la nutrition comme on gère l’agenda, coincée entre un rendez-vous et un loisir structuré. L’îlot central, que seule cette position de surplomb sur le repas serait désormais la manière de manger.

Christine Simon