Un peu âcre

 

 

 

ces temps-ci je l’avoue, disait Nougaro, j’ai la gorge un peu âcre
C’est en effet mon cas.  Ce ne serait qu’une humeur passagère, mais non, c’est tout le temps, toujours, surtout peut-être lorsque les machines se mettent à prendre le pouvoir (je tente un billet sur une expo pendant le week end et la machine se plante, sans cesse, et continue encore – je migre, je m’en vais – je reviens,j’y parviens)*; j’ai trouvé ces quelques images, elles m’ont permis de voyager assis sur ma chaise, devant mon bureau, mon clavier mon écran (tout ce qui peut nous appartenir, c’est curieux – ces possessions qui nous possèdent). Je lisais tout à l’heure qu’une escouade de bâtiments partirait de Gênes bientôt pour tenter de forcer le blocus que des fascistes (pour ne pas dire des nazis) imposent à Gaza. Gênes c’est une des colonnes des Brigades rouges mais c’est aussi Carlo Giuliani, mort à 23 ans assassiné par balles de policiers (jamais inquiétés, lesdits gardiens de l’ordre et de la paix…), lors du contre-sommet du G20, en juillet 2001. Mort pour quoi ? Pour l’exemple
Quel exemple ?
Qu’en a-t-on retiré ? Qu’en avons nous appris ? La raison d’état, voilà tout. Comme s’imposent à moi, souvent, des images, celles-ci me sont revenues
Elles sont dues à une photographe dont je pose ici une image   

probablement une photo de stock – la complaisance sans doute de la presse pour ses servants – mais ça ne fait rien, une femme formidable – elle a disparu ces dernières années, mais restent ses photos. Letizia Battaglia.
Sans doute a-t-elle une certaine actualité (une exposition à Arles au festival du photojournalisme crois-je savoir) (anéfé) (je propage : est-ce propagande?)

je m’en tamponne, je propage

la même – je baigne dans l’Italie la mafia les meurtres les embuscades les enlèvements la mort à tous les coins de rue – personne ne m’y force en effet – je me dis « il faut se fier aux ami.es, pas spécialement aux muses » – et pourquoi se fier? Il nous faut croire, je suppose (seulement, moi, à part la musique, je ne vois pas en quoi). Il vaut mieux se fier aux ami.es (pas les faux)** – je l’agrandis

elle sourit (j’ai un truc avec les photographes – et avec la photo) je la centre je la pose (les droits tsais – comment s’appelait-il, ce photographe de plateau dont on a oublié le travail ? tu sais bien,celui qu’on avait fait sur le film de Chantal Akerman, la comédie musicale, tu te souviens ?) (j’en fais quoi, de ces droits ?) (on verra bien) – ces images-ci glanées par capture d’écran – je te les retaille, je te les contraste, je te les publie – on ne va pas pleurer mais ça le mériterait. Ici celle d’un juge protégé

sur le toit du tribunal de Palerme – là une femme dont on vient de tuer le mari

(ce sera la dernière photo de la mafia et de ses alentours produites par Letizia Battaglia – trop de sang, trop de mort, trop de peines de larmes trop de tueries de massacres – la guerre en temps de paix ou pas – celle-ci encore

et d’autres, des femmes beaucoup – ici l’enfant au ballon

le regard, la minceur, le billet de banque plié dans la main – un tueur à gage

dans images pour la publication desquelles elle, Letizia, risqua sa vie – alors comme elle n’en a plus, que son âme si possible repose tranquillement quelque part, au calme – tranquille et sûre – mais aussi, cependant et pourtant parce que grace à ce petit passage chez elle, je continue mes affaires – j’ai trouvé celle-ci

ah on n’y voit rien, huit hommes qui semblent sourire – je reproduis quelque chose qui sera dans le livre, j’espère

bord cadre, à gauche en amorce et de profil l’un des capo di tutti capi Nino Salvo – le type au premier plan, disons, premier ministre de l’Italie a juré sur sa vie, les yeux de ses enfants, l’honneur de sa femme et de sa mère, ce type dont le col de chemise dépasse à peine de celui de la veste, dont on discerne les boutons de manchette, ce type qui a connu pie 12, jean 23 paul 6 et d’autres de la même corporation pour les avoir serrés dans ses bras, a juré donc sur ce qu’il avait de plus cher et de plus précieux au monde, et peut-être même sur la bible, les yeux dans les yeux de son dieu, juré de n’avoir jamais de sa vie entière et peut-être même dans l’au-delà, jamais au grand jamais rencontré le Nino en question. Accusé, condamné, il a été absout : il y avait prescription lors de son procès en appel – le voilà lavé de tous soupçons de collusion avec cette chose notre. Mais d’abord sienne… Andreotti, Giulio – 1917, 2013.
rien, jamais, ne rien croire des politiques
en mémoire de Letizia Battaglia, l’une de mes héroïnes les plus chères de ce monde (il y aussi dans ce panthéon Colette Magny, Mercedes Sosa et Violeta Parra)

 

 

* :  le numéro 114 d’Oublier Paris

** : comment, en effet, les reconnaître hein

des précisions sur ces images et le travail de Letizia Battaglia , dans le poste radio paris : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/allons-y-voir/noir-sur-noir-ce-que-voit-letizia-battaglia-5473544

 

Boucle

 

add. du 18 avril : j’ai suivi de tels ateliers (différents, semblables, mêmes dispositions disons) dans le cadre de mélico – j’en ai rendu compte, notamment (mais plus tard) dans ce billet qui évoque l’un des participants, Pierre Baldini ainsi que Maryse Hache, tous deux participants aussi de ces ateliers-là. Les choses vont comme elles vont : je leur dédie ce billet-ci. À toi Maryse, et à toi Pierre

 

 

Samedi dernier était organisé par une bibliothèque du dixième arrondissement un atelier d’écriture. François Villon, pour tout dire. La base en était une promenade dans les rues proches du quartier. On partit, puis on revint. On se mit à écrire.
Ici mes remerciements à l’institution et à Philippe Diaz qui organisait l’événement.

 

 

 

Le type stationnait devant l’entrée, il était en mauve, un gilet et une chemise dans les roses. Il fumait, il ne semblait pas attendre, il fumait, il pensait un peu et les gens devant lui passaient sur le boulevard . Un autre vendait là des livres, Sophia Loren et Simone Signoret, la pluie commençait à peine, les gens se pressaient vers le métro, la bouche, les travaux, les tuyaux, les tas de sable et les barrières. Sur la place, le kiosque vantait une brochure, une femme dans un chemisier rouge se penchait vers le monde, souriait un peu. À peine. Une autre Simone, de Beauvoir celle-là, elle regardait au loin. En arrivant sur la place une heure avant, devant le siège qui fait penser à Brasilia et de là à l’Homme de Rio, un tournage, des types en costumes un lien rouge autour du cou, des femmes en tailleurs avec au cou le même lien rouge les mêmes badges les mêmes photos. Ça discutait, ça portait une flûte de champagne à ses lèvres, ça riait. Plus haut le garage était ouvert, une image d’une voiture qui se voulait ancienne , le contrepoint de celles à vendre, énormes, qui stationnaient là, tous feux éteints rouges ou noires derrière des vitres épaisses. On descendait de la butte, on avait croisé en haut des marches un graffiti mauve qui assurait d’un gros chiffre 1984 sur un mur gris. La rue était en pente, un type en bermuda mendiait devant la palissade, un terrain vague, une maison fermée. La promenade était passée par une petite place, une espèce de rond-point où aboutissaient deux ou trois autres rues calmes, tranquilles, aucun commerce, rien sinon des touristes qui s’exprimaient un peu en allemand peut-être, qui prenaient quelques photos, des maisons, petites, différentes les unes des autres, des genres de villas cossues, sur une porte un grand MERCI en jaune sale glissait en s’effaçant. Une femme dans les oranges garait là son scooter, des lunettes de soleil un casque des baskets un pantalon et des cheveux du même ton, une dizaine de personnes semblait former là une espèce de groupe, ça venait de monter les volées de marches qui aboutissaient, vingt ou trente mètres plus bas à l’avenue. Là se trouvaient les commerces, de bouche des pizzas sensationnelles à deux pour le prix d’une seule, une boulangerie, une charcuterie-triperie, un plombier-serrurier, un restaurant marocain ou quelque chose et deux tailleurs, c’était frappant, deux tailleurs, l’un pour hommes – des vestes de couleurs vives, sans doute pour des occasions spéciales, particulières, uniques mariages, baptêmes, anniversaires – l’autre pour femmes, dans les mêmes dispositions, des robes chatoyantes brillantes chamarrées. De l’autre côté de l’avenue, des écoles, des arbres, une épicerie. Un passage conduisait à d’autres marches en bas desquelles les prunus perdaient leurs pétales. C’était une rue intérieure qui sur elle-même tournait, une cité bordée d’immeubles hauts et blancs revêtus de céramiques blanches et au dessus le ciel, encore bleu un vague vent doux calme tiède tranquille. La rue passait sous un de ces immeubles et c’est là que se réunissaient trois ou quatre types qui fumaient, qui discutaient, une musique empêchait qu’on perçut leurs paroles, eux vous ignoraient, vous n’existiez pas, vous n’apparaissiez même pas, tout à leur monde qu’ils étaient. Vingt ans à peine, tout en noir, casquettes barbes lunettes de soleil, et juste à côté un bar où d’autres jeunes gens riaient, un kebab tournait plus loin comme l’enseigne bleu-banc-rouge du barbier. Des pigeons, des arbres en fleurs, des voitures de police hurlant pour pouvoir passer, des vélos encore et encore, des odeurs de pollens de cuisine de fritures et au loin, là-bas sur la gauche, ce type tout en mauve qui attend, devant l’entrée, et fume une cigarette, c’est à peine s’il pense une moue sur le visage et sa chemise, dans les roses

 

En passant, on a constitué un album dont je ne me souviens pas vraiment m’être servi pendant la rédaction – j’ai regardé quelques images, je les ai taillées à la mesure des personnages et je les présente dans l’ordre de la narration

add. du mardi (le 15) suivant (qui ne sourit pas qu' »à peine », d’ailleurs) :

 

Matria

 

 

 

on doit en produire dans le monde plusieurs milliers tous les ans, c’est vrai qu’ils ne sont pas tous non plus tellement bien – la plupart est merdique je dirais – mais ça en laisse encore quelques centaines à voir – un par jour peut-être ? – les études étaient faites de trois ou quatre par jour, pas tous les jours, mais très souvent – au moins un – l’entrée par la sortie au Balzac ou ailleurs (en école de cinéma, on peut encore prétendre aux exos mais pas à la fac) – toujours est-il qu’on en rate et celui-là est passé au travers : le voilà.
C’est une histoire peut-être banale de nos jours : une histoire de prolos ce qui n’est pas si fréquent cependant. Balotté.es, éreinté.es, étrillé.es. Mais vivants. Encore et toujours. Ici c’est une femme. Elle

c’est Ramona (Maria Vazquez – rôle en or, interprétation splendide) n’a que son corps : le travail en usine de conditionnement de poissons; puis aussi sur un bateau de pêche (plus infiormel)

puis encore ailleurs à la maison – la troisième journée

(oui, on dirait Jeanne Dielmann, oui) – une fille d’un autre lit comme on dit, presque adulte, à qui elle veut payer des études; un homme à qui elle se refuse – en vrai c’en est trop, elle n’en peut plus

vraiment : elle fume (trop), elle boit (un peu trop aussi) – et puis les choses étant ce qu’elles sont, voilà qu’elle envoie paître son patron d’usine qui veut baisser les tarifs horaires (les choses sont ce qu’elles sont et les prolos n’ont qu’à affirmer leur loyauté : sinon, c’est la porte et elle est ouverte : si le salaire ne permet pas de vivre, nous ne sommes plus salariés mais esclaves, comme on sait). On pense (oui) au Daniel Blake de Ken Loach (2016) : Ramona cherche du travail, sonne ici, va voir pour le chômage, visite l’agence de placement, retourne ailleurs cherche encore – la vie étant ce qu’elle est, Ramona a une amie – elles se retrouvent, boivent et envoient paître des hommes qui aimeraient bien aller plus loin, rient ensemble

se disputent – puis

défaillent, pleurent – la pluie – le désespoir

et puis cherchant quand même, arrivant chez un homme, veuf vaguement timide

bougon – mais elle, forte et puissante même dans son empathie spontanée (son amitié avec le chien du veuf, puis son aide lorsqu’il veut changer de forfait téléphonique) – puis son travail, qu’elle fait avec constance – puis une espèce d’intimité qui se créée

un tournant certainement – sa fille fait aussi quelquefois des siennes

ce n’est pas qu’elle n’ait plus besoin de sa mère mais elle veut vivre sa vie, et Ramona comprend – particulièrement formidable dans ce film quelques fois des plans qui durent (ici, une merveille : elle s’assoit, un banc, un jardin public, et elle fatiguée sans doute, attendant que son patron revienne pour le reconduire chez lui

assise elle attend – très lent travelling avant 

puis attend encore, ferme les yeux – le temps – et la camera s’approche, lentement, d’elle – lentement…

Et puis et puis… le film continue et la vie reprend – reprend – et reprend encore…

 

Matria, un film espagnol (la Galice et l’océan) réalisé par Alvaro Gago (un premier long métrage (si on peut se permettre) : très prometteur)

 

 

Il reste encore demain

 

 

 

Le style ou le registre de la rédaction est passé par l’absurde, l’obscène ou/et le vulgaire – c’est exprès sans que je sache vraiment si c’est parce que je trouve les personnages masculins particulièrement abjects – pratiquement tous, je le crains – ou parce que le film dépeint des actes qui me sont odieux – on disait dans mon jeune temps et le milieu social ou la classe ou la société ou le groupe : enfin la famille « on ne frappe pas une fille, même avec une fleur » – ça n’empêchait pas qu’on se chamaille (deux sœurs un frère et moi) (le plus petit-le petit dernier – le préféré disaient-il et elles) – je n’ai jamais vu mon père frapper ma mère – d’ailleurs ils ne frappaient guère leurs enfants – il doit y avoir une relation… Ici, on ne frappe pas les enfants, semble-t-il, mais c’est la femme qu’on dérouille…Une torture

 

ça se passe dans l’immédiat après-guerre (fin mai-début juin, 46) et ça se passe à Rome (il reste des traces du régime précédent, tsais), une histoire de famille

il y a une chose (un truc –  une ellipse peut-être – quelque chose) qui n’est pas passée sous silence exactement mais qui ne se résout pas – c’est cette façon de cogner sur les femmes : dès le premier plan, elle (interprétée par Paola Cortellesi, aussi réalisatrice) prend une torgniole comme si de rien n’était : elle c’est Délia, et on ne sait pas, ce coup cette gifle : une insomnie, un mauvais rêve ? un refus de passer à la casserole ? (cette dernière éventualité (imagée pour rester dans le ton de l’époque et du lieu) est très peu probable : Délia ne se refuse pas – une épouse parfaite…) (on ne sait si elle envisage cet acte comme une preuve d’amour – elle regarde la table de nuit, quelque chose , une poussière, l’émeut et son mari besogne (hors champ, certes) – Délia a trois enfants dont une grande fille laquelle devrait prendre un parti assez  impressionnant – c’était ily a quatre vingts ans en Italie, ça (le mariage) a toujours été la seule porte de sortie, comme en Inde où, de nos jours encore, les promises se suicident… –

un mariage d’amour et de raison –

cependant, le type en question est plus ou moins héritier non seulement de finances appétissantes (d’où vient cette fortune, c’est une autre affaire) mais surtout d’une façon de faire ou d’être, c’est difficile à dire – ça s’appelle cependant le patriarcat, la soumission de la femme à l’homme – point barre – sinon on cogne, c’est compris ? Faut-il faire un dessin ?


Alors Délia est là, qui bosse comme une damnée, du matin au soir – ménage repas de midi des enfants et du mari soins à domicile prolo mal payée dans une fabrique de parapluie

couturière courses (la deuxième en partant de la droite, c’est elle, elle attend, droite)

repas du soir pour le mari et les enfants vaisselle soins –   il est tard le soir – et Délia va dormir
Mais elle vit et marche – et vit, a des amies

un ancien amour

(c’est fini, tsais) – elle vit,  croise un militaire

ne comprend pas son langage – Délia va marier sa fille, c’est formidable, un parti tellement enviable – qu’on lui envie dans la cour – Délia vit au sous-sol, elle s’occupe aussi du père de son mari – elle n’a pas une minute, elle parle un peu – et son mari cogne – Délia ne dit rien, ses enfants comptent avant tout – Délia ne se taira pas.


Le jour des fiançailles, comme un acte manqué

tu veux que je te dise, c’est plus fort qu’elle  et c’est parce que c’est elle, et elle femme. Ell ne laissera pas faire.

 

C’é ancora domani (Il reste encore demain) (Paola Cortellesi, 2023) un (premier) film courageux, en noir et blanc certes.

 

 

Bye bye

 

(jte parie que la petite au milieu, c’est Hiam – si elle passe ici, elle me dira)

après tout ça ne fait rien, on peut bien faire une déclaration d’amour à une actrice (ou à n’importe qui d’autre d’ailleurs) – on est fondé même à le faire : qu’est-ce donc sinon notre humanité légitime ? Les abeilles à leur reine, les fourmis à je ne sais qui, les aigles à leurs aiglons – l’empereur, la destruction de l’église remplacée par les nouvelles procuraties aujourd’hui musée à Venise et le rapt des chevaux – une déclaration d’amour voilà tout – que vient faire Venise ici ? je ne sais pas le dire mais elle vient (au Festival de Venise, (on dit la Mostra) ce film a été présenté l’année dernière – mais ce n’est pas trop pour ça non plus) – j’attends d’y retourner probablement – non mais c’est quelque chose comme Salonique ou Beyrouth, quelque chose comme Tunis ou Alger, les îles de la Grèce, cette mer et ces autres, Adriatique oui Égée – ces mots-là – et donc voici cette femme adorée

L’actrice et réalisatrice palestinienne Hiam Abbass pose lors d’une séance photo à Paris le 13 février 2024. (Photo de JOEL SAGET / AFP)

regard camera – veste, pas si souriante qu’on pourrait croire – les images parlent-elles d’elles-mêmes ? – une alliance crois-je voir – dans le film elle regarde par ici, par là

Hiam et Lina à Deir Hanna

(au premier plan, sa fille, Lina, qui réalise) – elle dit « là c’est la Jordanie, (un quart de tour à gauche) là c’est la Syrie (un quart de tour encore) là le Liban » – et voilà que tout est dit – les deux reviennent en Palestine, en Israël, enfin par là – on évoque la catastrophe, 1948 et l’héritage des vainqueurs, des alliés, l’héritage… – nakba dit-on – on revient : regarde, ici, une photo de trente ans d’âge au minimum (c’est ce regard, magnifique, ce regard qui me fait tomber en amour, tu vois)

Um Ali, Lina, et Hiam

ce léger déplacement pour être dans la photo, près de sa mère – cette volonté de proximité (après c’est certain que je retrouve ma mère, c’est certain, je me souviens qu’elle me disait « je ne t’ai donné qu’un seul prénom parce qu’ils m’emmerdaient avec ceux qu’ils voulaient que je te donne » – je me souviens  brune cheveux bouclés regard aiguisé humour ravageur) (ses lunettes sur le tard…) – oui pourquoi pas, une mère d’adoption ? (bon, la mienne était de 26; elle Est de 60 mais qu’est-ce que ça change ?)

Avant première du film Bye Bye Tibériade de Lina Soualem, avec Hiam Abbas, au cinéma L’Alhambra à Marseille, le 22 novembre 2023

les voici les deux – ça n’a pas d’importance, ce qui en a en revanche c’est ce film qui dépeint quelque chose comme une région du monde

il s’agit d’un lac, celui de Tibériade aux alentours duquel cette femme-là, Hiam Abbas, a grandi – cette région du monde, tourmentée violentée – mais ça n’est pas l’essentiel, non, l’essentiel c’est qu’elle s’enfuit, qu’elle veut vivre, sa vie une vraie vie d’amour – avec quelqu’un d’autre que le père de cette jeune femme qui réalise –  mais ça n’est pas ce lien sa fille, sa mère, ses images ce lac et cette maison – la folie des hommes… Oui, cette folie-là, celle des guerres, des pogroms, des éliminations évacuations exterminations –  la même chose, toujours…   Et c’est sa fille qui la fait revenir, elles reviennent ensemble toutes les deux – retrouvent des sœurs, des mères – une histoire de famille.

Magnifique.

 

Bye bye Tibériade un film réalisé par Lina Soualem (ici le dossier de presse) avec Hiam Abbas (quelle beauté…)

 on doit aussi à la vérité de dire que Hiam Abbas est réalisatrice et que le film qu’elle réalise en 2012, Héritage se trouve être une production franco-israélo-turc, ce qui n’est pas rien.

Aya

 

 

 

je renoue sans doute avec les prénoms (j’en ai quelques uns dans le registre du cinéma – comme Chantal par exemple, ou d’autres) – ici aussi dans l’actualité dans laquelle je tente d’oublier qu’il faut travailler à l’écriture – des images des faits peut-être, ici rien n’est dit : simplement un dîner fin février entre le premier magistrat chef des armées de ce pays et une chanteuse qui vécut à Aulnay-sous-bois – après avoir vu le jour au Mali semble-t-il – on s’en fout un peu, la nationalité comme la patrie est et a toujours été frelatée – citoyen du monde sans doute seulement et c’est déjà beaucoup – naturalisée française – je me souviens de mes grands-pềres – lequel dîner a donné lieu à des hypothèses (j’aurais aimé connaître le menu) – elle chanterait durant la cérémonie d’ouverture des olympiades (quantième 33 – dites-le, pour voir) et c’est alors que se déchaînèrent les ordures (d’ailleurs – à titre personnel, uniquement ici – j’ai entendu dire qu’on sortait, dans l’institution où j’ai bossé comme un âne durant trente ans, les ordures (initiales kz) et j’ai apprécié ce fait – depuis le temps que le type malœuvrait (directeur harceleur à gerber) – ces temps-ci quelque chose de pourri dans l’air – il n’en faudrait pas parler et taire ces faits, ainsi qu’on taisait ces actions aux siècles derniers – non – comme ça l’a passablement ému, j’ai gardé quelques images – nous verrons (j’ai entendu dire que la fille du borgne (mais néanmoins tortionnaire) (promise à un avenir radieux : seulement non) était monté à l’assaut au sujet de cette chanteuse, alors ici les images que je propose sur le même registre que  celles d’actualités – et un même mode opératoire

(après, il n’est pas certain que ce genre de promotion joue en sa faveur, je reconnais) (on disait, dans le temps, à l’ancienne : « la plus belle fille ne peut donner que ce qu’elle a »-  bah)

(FILES) La chanteuse française Aya Danioko, alias Aya Nakamura, pose lors d’une séance photo le 19 novembre 2020 à Paris. Nakamura est nominée pour l’Artiste féminine de l’année lors de la prochaine cérémonie des Victoires de la Musique de la musique française, qui se tiendra le 9 février 2024. (Photo de JOEL SAGET / AFP)

un nombre impressionnant (mais qu’est-ce que le nombre…?) de téléchargements – des suiveur.es comme s’il en pleuvait, des milliards bientôt – mais aussi, beaucoup (quantité n’exclue cependant pas qualité) de présence

La chanteuse française Aya Nakamura arrive avant la présentation de la collection Givenchy Femme Automne-Hiver 2023-2024 lors de la Fashion Week de Paris, à Paris, le 2 mars 2023. (Photo de Geoffroy VAN DER HASSELT / AFP)

chacun (comme chacune) fait ce qu’il (ou elle) peut – je ne suis pas certain non plus d’apprécier ses chansons –

La chanteuse française Aya Nakamura arrive pour la présentation des créations Schiaparelli pour la collection Prêt-à-porter Femme Automne-Hiver 2024/2025 dans le cadre de la Fashion Week de Paris, à Paris le 29 février 2024. (Photo de Miguel MEDINA / AFP )

elle aime la mode, suit les collections des grands couturiers – en vrai,quelque chose de neuf sous le soleil ? -peu je le crains… – le même jour

(FILES) La chanteuse française Aya Nakamura arrive pour la présentation des créations Schiaparelli pour la collection Prêt-à-porter Femme Automne-Hiver 2024/2025 dans le cadre de la Fashion Week de Paris, à Paris le 29 février 2024. Une enquête a été ouvert à la suite de publications racistes visant la chanteuse française Aya Nakamura, a indiqué le parquet de Paris. (Photo de Miguel MEDINA / AFP)

cette façon de changer d’apparence….

Peut-être.

En tous cas, on salue.

 

 

 

 

 

 

 

 

le fleuve, le pont, un couple

 

 

à O., qui vers début janvier (le 12) mais au siècle dernier, en 16, naquit

 

 

ah si elle avait été encore de ce monde, elle aurait été aux première loges – encore que, depuis quelques années (oui) l’immeuble soit en travaux – ça commence à se terminer (et sans doute travaille-t-on  assez fort pour une ouverture vers juin si tu veux mon avis) – ici un état de l’avancement

puis là le petit métier du bâtiment (cosmétique : fausse pierre de taille – mais faut ce qu’il faut)

(sur l’honneur, je m’engage à renseigner le tarif des chambres dans quelques mois – il parait que certaines de ces officines ont vu iceux-ci multiplié par vingt pour les semaines de fin juillet début août en cette magnifique ville-lumière) (pourquoi se gêner ?) – mais en vrai non, je passais par là et il faisait beau – je passais juste quand je les croisai

en vrai il y aura du monde

mais pour le moment, c’est calme – on a le temps

un regard vers l’est – pour se repérer – peut-être sans vouloir s’imposer

passer le pont du Carrousel

l’hôtel n’est plus à l’image, mais je me retournais, la voyais à sa fenêtre (troisième puis premier étage) lui faisais signe (à la prochaine)

– ces deux-là  bonnets et carte –

voyons voir – au dessus de l’eau

d’autres se prenaient en photo, peu de monde – il n’y avait pas là la gitane qui,parfois, trouve sur le pont une merveilleuse bague en or – elle la trouve là, et veut vous la vendre, cette merveille – mais non – eux se consultent

un regard au bateau-mouche qui passe sûrement – je n’ai pas d’image – je me souviens juste d’elle – je marche je me retourne, je n’y viendrai plus dans cet établissement – je me retourne, l’eau qui passe ici se retrouvera bientôt sous le pont Mirabeau – elle passe –

il y a quelques années (et plus de cinquante lorsqu’elle me prêta sa chambre pour l’examen Louis-Lumière qu’on appelait Rolin – non, mais je l’ai manqué) je me souviens et quand même

non, mais d’elle, oui

 

cette dernière image est une magnifique œuvre due à Christine Jeanney (merci encore…!)

Des jours parfaits

 

(mercredi, c’est cinéma – à peine en retard – merveille…) 

 

quelque chose avec le corps
et la propreté
et les lieux où s’exerce une espèce de nécessité
qu’on soit gueux ou roi
je me souviens de mon père qui répondait
« là où les rois vont à pied » à la question
où tu vas ?

c’est de l’autre côté du monde

ces lieux-là

j’en ai cherché/trouvé quelques uns

une autre façon de concevoir l’hygiène

(souvent, en voyant des touristes japonais ici, la stupeur me prend

en mesurant la différence qui existe entre ici et là-bas

et la propreté de ces lieux d’aisance – seraient-ce ceux des bars et des cafés) – j’ai pensé au Dernier des hommes  (Friedrich Wilhelm Murnau, 1924) où l’entrée du héros en ces lieux représente la déchéance la plus complète…) – et puis l’histoire commence

c’est à Tokyo – cette tour se nomme SkyTree Tower dans la vraie vie (DL2V) si ça veut dire quelque chose (? la réalité ?)

(tour de l’arbre au ciel – de l’arbre du ciel) (quelque chose avec les arbres en tout cas) ici le héros (Hirayama) il est à vélo sur le pont qu’on voyait plus haut – ainsi passe-t-on de la réalité à la fiction

c’est un homme heureux (il y a une chanson comme ça) – il travaille (ici sa petite voiture bleue dans laquelle il range ses affaires (la jeune fille blonde est une amie de son collègue)

son métier : nettoyer

les toilettes publiques – ici son aide/adjoint/ami (jeune, plus ou moins amoureux, plus ou moins désargenté)

Hirayama a un quotidien très réglé – écoute de la musique

se lève se lave se vêt – part travailler

regarde le ciel – prend un café au distributeur – bosse

avec rigueur

et déjeune d’un sandwich triangle dans un parc où il prend (parfois) des photos

à l’aveugle

des arbres des feuilles des branches et des lumières

puis il les classera une fois développées – ça sert à quoi, tout ça ? – pendant le week-end il  va au sauna

sa nièce vient un jour le voir

non un soir plutôt – peut-être fugue-t-elle ? fuit-elle quelque chose ?  peut-être, il l’emmène avec lui au travail – ils déjeunent – prennent des photos (c’est Hirayama qui lui a offert le même appareil que lui) –

des images des arbres – la joie de vivre – de se connaître – d’en être ravis – il y a cette jeune fille blonde, donc amie de son aide,

qui un jour vient le voir, lui demande d’écouter cette musique (la bande son est magique) sur une cassette audio du siècle dernier – ils écoutent ensemble dans la voiture – elle lui demande si lui et son aide ont parlé d’elle – la musique

l’émotion – si forte – si belle – elle se penche vers lui vivement

lui donne un bisou

s’en va – une des plus belles scènes de cinéma de tout l’univers –

oui – et d’autres histoires, bien d’autres – à voir… sa lecture

juste une merveille

 

 

 

Perfect Days un film (magnifique, magnifique, magnifique) de Wim Wenders ( Hirayama interprété par Koji Yakusho prix d’interprétation masculine au dernier festival de Cannes; la jeune fille blonde : Aoi Yamada; la nièce : Arisa Nakano; l’aide : Tokio Emoto – etc etc…)

 

Toiles

 

 

Il ne s’agit que d’images et de représentations, glanées ici ou là (souvent posées par mon frère quelque part, ici là ou ailleurs) je les capture grâce au bouton impécr syst  qu’il y a là, je les pose dans un dossier toiles le vic sur le bureau du personnal computer puis les retaille, en cherche les titres, parfois, les dates de conception, elles sont là pour faire beau – j’aime savoir qu’il s’agit de répliques au même sens que celles des plaques tectoniques qui se meuvent sur le manteau

En ouverture : The Souvenir Jean-Honoré Fragonard, 1775-78

il y a des moments où il faut décorer ces murs taupe – quand même, cette maison à vendre ou à louer mérite quelques aménagements (bien qu’elle ne soit guère visitée : la crise (on nous préfère inquiets, comme tu sais), la pandémie (hier soir écoutant radio paris (qui ment comme de juste) on m’a annoncé en titre que les cinquante mille cas de maladie avaient été recensés ce jour – en titre gros comme le bras – et dans le développement, que des vaccins sont disponibles – un épidémiologiste ne pouvait pas parler proprement de « vague » mais enfin) (j’ai fermé le poste, qu’est-ce que tu veux), la guerre immonde mené par le mini-tsar ridicule et grossier – tout ça n’est guère favorable à l’investissement, hein…)
Alors décorons : Marc Chagall, Église de Chambon (1922-1926)

ce sont les petites poules qui me ravissent – puis Edward Hopper La plage de Gloucester 1924

joli – continuons avec cet autre Chagall La famille ukrainienne 1940-1943

si, c’est quand même joli, ce rouge (sang), ces couleurs (vives),  ce feu peut-être et ces animaux aussi – est-ce bien décoratif, je crains que non mais je le garde et l’expose – la date du tableau et ce qu’il transporte aussi, je ne veux pas oublier –

un autre Marc, Rothko celui-là dans ses bleus, (sans titre, 1968) pour la route (et en signe à Jean-Luc Godard, qui comme ce peintre-là, a mis fin à ses jours) – puis un 2VG Arles jardin en fleurs 1888

une pure merveille – une autre pure merveille, sans doute plus troublée (et bien différente de ce qu’elle est aujourd’hui) Maurice Utrillo (un de mes préférés) et son Place du Tertre 1910

d’autres encore – celui-ci Piet Mondrian, Along the Hamstel 1903 (magique)

et puis deux images, l’une d’un sous-bois (sans référence, je ne sais d’où je tiens cette image – elle est là, elle correspond comme on dit d’une lettre qu’on attend (ou le « on devrait correspondre, puisque tu me corresponds » du Cabrel)

et pour finir, cette image du robot (la piazetta et ses deux colonnes, Théodore qui me fait souvenir d’un ami, et le lion ailé qui veille sur les murs préfabriqués de la maison)

C’est mieux, il semble…

Deux amies

 

 

 

 

juste regardé ce film hier soir (c’était mercredi je crois) – et connaissant déjà les deux réalisateurs pour en avoir apprécié une des œuvres (ici, en cette maison[s]témoin même) (ils n’ont que deux films à leur actif) – dans des dispositions semblables il me semble (la guerre dans son horreur civile militaire et humaine – tristement semblable toujours à elle-même) (aux portes de la Pologne cependant on trie les réfugiés, noirs d’un côté blancs de l’autre – on avait déjà fait pression pour d’autres réfugiés, d’autres exilés, d’autres malheureux qui n’avaient pas la même couleur de peau – les Polonais comme les Hongrois ou d’autres de ces obédiences se servent de l’Europe comme d’un bouclier raciste – et l’immonde du Kremlin (lequel finance ici même l’abjecte fille du borgne) fait semblant d’être du bon côté de la morale) (je m’égare un peu mais dimanche qui vient, on passe aux urnes : on a des choses à faire, et d’importance – quand même le piéjacons de ma jeunesse se fait entendre, au loin) – juste regardé ce film, ça se passe en Géorgie (où l’immonde a déjà tenté et réussi quelques annexions – combien de morts, de blessés combien ? et même le compte, qu’en faire ?) (on ne va pas laisser tomber, mais les bras en tombent souvent – simplement la paix serait trop demander – impossible…) ici non plus, il s’agit de l’histoire de deux jeunes filles, quatorze ans, brunes toutes les deux, amies dans la même classe à l’école – il s’agit du passage de ce rôle plus ou moins d’enfant allant chercher le pain à celui d’adulte plus ou moins mariées…

Deux jeunes filles : à droite Eka (Lika Babluani) et à gauche son amie Natia (Mariam Bokeria)

(au moment du tournage elles ont dans les quinze ans) amies

à l’école ensemble (l’école était présente dans l’autre film aussi – et je crois bien cette Lika aussi (il me semble) (c’est ça en effet) – ensemble pour en revenir

ensemble pour s’amuser et rire

rentrer sous la pluie ensemble

danser parler

l’amour de Natia pour ce jeune homme

Lado (Data Zakareishvili) qui lui offrira

en cadeau (allô Sigmund?) (non, mais ça va) cette arme à feu « c’est pour toi » lui dit-il – afin qu’elle puisse se défendre – qu’elle la protège – (à la guerre comme à la guerre est-on tenté de penser mais le film se passerait en 1992 – il se déroulerait à Tbilissi – sorti en 2013 dix ans après la révolution des Roses) – le film raconte les difficultés pour manger simplement

mais elles passent un peu à l’arrière plan

encore que le pain reste une espèce d’arme, aussi

même si ce « on crève la dalle » semble mensonge. Non, tout est lié : Natia est aimée d’un autre (le type du milieu, Kote (Zurab Gogaladze), ici, avec ses quatre acolytes) (il se trouve au milieu de l’image, il ne fait pas partie spécialement d’un certain « milieu »)

et quelque chose échappe ici : ce groupe de jeunes gens, à peine plus âgés que les jeunes filles, s’arrangent bien qu’elle le refuse

dit-elle – pour enlever Natia et lui faire épouser (crois-je comprendre) de force donc semble-t-il le Kote en question… ce qui révulse son amie Eka

Un vieillard la fera taire à coups de poing.
Obscur côté des mœurs, j’imagine… Et le mariage a lieu, qui donne l’occasion au film de montrer Eka

probablement assez libérée de ces contraintes pour danser et faire rire et mimer peut-être une parade, nuptiale et probablement traditionnelle

moment magnifique qui fige dans la réalité ce mariage plus ou moins forcé… Je ne sais pas, mais la relation qui unit les deux amies a quelque chose de sublime (le film entier est sous cette qualité – c’est seulement dans ces conditions que le cinéma confine à l’art) – d’autres éléments le constituent que je tais mais il montre ce passage, ce gué, ce seuil franchi par ces deux amies entre l’enfance et l’âge adulte – peut-être plus du point de vue de Eka

et cette espèce de maxime qui clôt ce film… c’est à ne pas croire

 

 

Eka et Natia (le titre géorgien : Les longues journées claires; le titre à l’export In bloom (soit En fleurs) ) un film de Nana Ekvtimishvili et Simon Gross (2013)