Matria

 

 

 

on doit en produire dans le monde plusieurs milliers tous les ans, c’est vrai qu’ils ne sont pas tous non plus tellement bien – la plupart est merdique je dirais – mais ça en laisse encore quelques centaines à voir – un par jour peut-être ? – les études étaient faites de trois ou quatre par jour, pas tous les jours, mais très souvent – au moins un – l’entrée par la sortie au Balzac ou ailleurs (en école de cinéma, on peut encore prétendre aux exos mais pas à la fac) – toujours est-il qu’on en rate et celui-là est passé au travers : le voilà.
C’est une histoire peut-être banale de nos jours : une histoire de prolos ce qui n’est pas si fréquent cependant. Balotté.es, éreinté.es, étrillé.es. Mais vivants. Encore et toujours. Ici c’est une femme. Elle

c’est Ramona (Maria Vazquez – rôle en or, interprétation splendide) n’a que son corps : le travail en usine de conditionnement de poissons; puis aussi sur un bateau de pêche (plus infiormel)

puis encore ailleurs à la maison – la troisième journée

(oui, on dirait Jeanne Dielmann, oui) – une fille d’un autre lit comme on dit, presque adulte, à qui elle veut payer des études; un homme à qui elle se refuse – en vrai c’en est trop, elle n’en peut plus

vraiment : elle fume (trop), elle boit (un peu trop aussi) – et puis les choses étant ce qu’elles sont, voilà qu’elle envoie paître son patron d’usine qui veut baisser les tarifs horaires (les choses sont ce qu’elles sont et les prolos n’ont qu’à affirmer leur loyauté : sinon, c’est la porte et elle est ouverte : si le salaire ne permet pas de vivre, nous ne sommes plus salariés mais esclaves, comme on sait). On pense (oui) au Daniel Blake de Ken Loach (2016) : Ramona cherche du travail, sonne ici, va voir pour le chômage, visite l’agence de placement, retourne ailleurs cherche encore – la vie étant ce qu’elle est, Ramona a une amie – elles se retrouvent, boivent et envoient paître des hommes qui aimeraient bien aller plus loin, rient ensemble

se disputent – puis

défaillent, pleurent – la pluie – le désespoir

et puis cherchant quand même, arrivant chez un homme, veuf vaguement timide

bougon – mais elle, forte et puissante même dans son empathie spontanée (son amitié avec le chien du veuf, puis son aide lorsqu’il veut changer de forfait téléphonique) – puis son travail, qu’elle fait avec constance – puis une espèce d’intimité qui se créée

un tournant certainement – sa fille fait aussi quelquefois des siennes

ce n’est pas qu’elle n’ait plus besoin de sa mère mais elle veut vivre sa vie, et Ramona comprend – particulièrement formidable dans ce film quelques fois des plans qui durent (ici, une merveille : elle s’assoit, un banc, un jardin public, et elle fatiguée sans doute, attendant que son patron revienne pour le reconduire chez lui

assise elle attend – très lent travelling avant 

puis attend encore, ferme les yeux – le temps – et la camera s’approche, lentement, d’elle – lentement…

Et puis et puis… le film continue et la vie reprend – reprend – et reprend encore…

 

Matria, un film espagnol (la Galice et l’océan) réalisé par Alvaro Gago (un premier long métrage (si on peut se permettre) : très prometteur)

 

 

04/01/2025

 

 

En notant la date, je me rends compte qu’il me reste (attends je compte…19-4 ça fait 15) 15 jours et 15 nuits pour monter un dossier. Je suis déjà débordée de partout, surtout des bras, de l’épaule aux pouces en passant par les coudes qui, depuis hier surtout, me brûlent de l’intérieur.

Blanche me rassure sans cesse. Blanche me prend dans ses bras et me dit de me détendre, que le calendrier que j’avais mis en place en octobre ? est simplement en train de s’actualiser, que je ne suis pas « en retard ». Toujours l’image de ce lapin au monocle et à la montre énorme, avec ses vêtements que j’envie. Tiens je m’en rends compte aujourd’hui, la tenue dont je rêve, finalement, ressemble beaucoup à celle du lapin dans la version de Walt.

Je ne suis même pas sûre au moment où j’écris ces lignes de m’être correctement, administrativement parlant, inscrite au CAP. Je dois les appeler lundi matin, parce que pendant les fêtes, je n’ai même pas essayé. Je me dis qu’il faudra bien un jour que je me relise avec le logiciel que j’utilise pour écrire, pas encore obsolète, et corriger toutes ces répétitions, surtout le mot « même » d’ailleurs, mais peut aurais-je des surprises sur d’autres mots. Puis je ne le fais jamais. Ou quand je retrouve une erreur ou un manque de mot, quand enfin je me relis, comme sur le dernier texte ou il manque un « pas », je ne corrige pas. Je laisse tel quel. Parce que j’ai un peu peur de dénaturer ce qui est arrivé « comme ça ».

A quoi bon tout ça ?

Je viens de regarder trois vidéos sur « les patients de la Saumery » et des interviews du docteur Jean Oury. J’ai un peu peur de dénaturer tout ça aussi.

Hier soir, je suis tombée sur une vidéo expliquant le delta pouvant exister entre les séries sur les sectes et le vécu d’une psy, experte auprès des tribunaux français. Quand elle a fait le portrait qu’elle pouvait en faire d’après son expérience d’un « gourou moderne », typé coach de vie ou naturopathe, j’ai encore senti ça, le « même ».

Je me souviens me retrouver dans le bureau d’une prof à la fac, dans un rdv à ma demande pour essayer d’y voir plus clair entre ce que la fac pouvait me donner de visibilité sur mon présent et les potentiels « futurs » et mes propres potentiels, présent ou à venir. A un moment, comme ça peut m’arriver parfois quand je me sens à l’aise avec quelqu’un, je déclare : « oui, je pourrais monter une église, c’est pas très difficile, d’ailleurs il y en a une qui s’est monté dans ma rue…il suffit de donner aux gens ce qu’ils veulent, il  n’y a rien de compliqué…mais ça ne m’intéresse pas. » Il fallait entendre, et elle l’a entendu comme j’ai pu le vérifier dans son regard quelque peu hallucinée : « le challenge n’est pas très haut… la preuve, y’en a plein qui y arrivent. Moi je veux faire quelque chose de…plus fort que ça. Qu’il n’y ait que moi pour réussir à le faire, je veux réussir quelque chose que personne d’autre que moi ne peut faire.».

Je prends une énième pause/clope. Je pense, je repense. Je tourne. J’ai de bonnes pistes, de très bonnes mêmes.

Les symboles. On a perdu la majorité des symboles. Ils ont presque tous été remplacés, lentement mais surement par d’autres. Pas par un groupe d’élite suprémaciste voulant s’aliéner une population hypnotisée par les nouveaux symboles mis à disposition. Mais par soi-même, dans un mouvement beaucoup plus naturel qu’il n’y parait en regardant les infos. C’est le moment où, en bonne presqu’académicienne que je suis par diplôme, j’ouvrirais toutes sortes de parapluies nommés et nommants : Claude Lévi-Strauss, Jakobson, Bergson, pour qui j’ai une tendresse infinie, pour finir par mon chouchou Gaston (Bachelard). Peu de femmes, voire pas. Moi, j’men fous, je ne me sens ni homme, ni femme. Mais je comprends que dans les choix de représentation de la société tels qu’ils sont encore aujourd’hui, il y a très peu d’individus que la société a décidé de ranger dans une certaine catégorie qui apparaissent. Comme d’autres, catégories. Mois, on s’en fout.

Oups, je viens de me souvenir que j’ai besoin d’un four et de plaques vitro.

Tu as volé l’orange!

Par-delà les mots des maux

Par-delà les maux des mots

Qui a volé l’orange du marchand ?

Percer et voir implique d’affronter des paradoxes qui peuvent rendre fous si on a pas eu le temps d’accepter certains dépassements de réalités, quels que soient les noms qu’on leur donne le temps d’accepter qu’un nom est encore illusoire : l’Argent, Dieux, la Célébrité, etc.

Je me souviens de ce moment où j’ai enfin atteint le niveau académique qui me permettait de choisir gravement entre branche molle ou dure de la recherche, comprenez par-là recherche en « Humanités » ou en « Linguistique ». Lasse, je me suis considérée, voire conne-sidérée, un peu vieille pour poursuivre une étoile trop lointaine. La Linguistique, que je poursuivais de mes désespoirs assidus de naissance, me sembla à ce moment-là, inatteignable, voire ina-teigne-able. J’ai bien cru l’avoir enterré ce jour-là. En fait, je n’y ai pas cru du tout, ni cuit d’ailleurs. Je savais bien que ce n’était que parti remise, encore une fois.

 

Je viens de compter, on vient d’enchainer 20 jours non-stop à la Détente. Aujourd’hui, on a décidé, toutes les deux, de se reposer. Pour se donner un peu de force pour la dernière ligne droite. Dont on ne sait même pas trop où est la fin, le 03, le 11, novembre, décembre. Je me souviens que sans vraiment savoir ce que je faisais, j’ai parlé de calendrier sur la moitié d’une des trois parties du fameux mémoire de Master 2. J’avais été très loin dans la recherche, mais je n’avais rien trouvé de ce que je cherchais. Je n’avais pas trouvé Le calendrier que je cherchais. C’était pas faute d’en avoir trouvé, des grégoriens, des lunaires, des anciens, des atomiques…mais rien n’y faisait, aucun ne m’avait satisfait, déjà. Et je crois bien que je n’en avais fait aucune conclusion d’ailleurs, déjà.

Il est 6h53, le mardi 29 octobre 2024, j’ai 14, 567 tâches administratives à peaufiner dans 3,14etc. domaines, et je suis là à écrire sur l’ordi, même pas avec un stylo.

Pause-clope.

Qui a volé l’orange du marchand ?

« Mais mademoiselle, personne ne va rien comprendre si vous mettez le troisième étage de la fusée sans rien avant !!! la fusée ne décollera même pas !!! »

Au moment où j’écris ces lignes j’ai le poignet droit qui saigne un peu à l’intérieur. C’est comme ça que je le ressens, une coupure à l’intérieur, juste en bas de la ligne de vie comme disent les diseuses d’aventures.

Je me souviens de cette fois où, sur un souk marocain, ma mère a cédé à une de mes deux petites sœurs et leur a permis de se faire dire la bonne aventure par une vieille femme assise sur un voile gigantesque dont je me souviens le rouge surtout qui cinglait sur le jaune du reste de l’environnement d’un souk presque vide déjà vu l’heure tardive. Je ne vois même plus qu’elle, la diseuse, assise à terre, et mes deux petites sœurs passant chaque une leur tour, assise devant elle, si petite, si « innocentes », elles. Et leur père qui leur traduisait le dialecte de la diseuse.

Mes yeux se sont affolés quand j’ai vu dans les yeux de l’une d’elle la « croyance ». Elle a bu chaque mot comme un nectar magique. L’effroi sous ma peau, ce n’était pas la première fois que je sentais ce liquide froid et bleu me parcourir sous la peau, mais c’était la première fois que j’essayais de le combattre. De trouver un moyen de prévenir, des yeux, ma mère, leur père, le sable, n’importe qui ou quoi pour que. Mais rien ni personne n’a rien vu.

« Tu rencontreras un beau prince qui te rendra heureuse et te couvriras de richesses ». Depuis je sais. J’ai fait depuis ce que j’ai pu, mais je ne pouvais pas grand-chose. Au moment où j’écris ces lignes à l’ordinateur, je sais. Je sais qu’elle est encore assise devant cette diseuse, hypnotisée par ses mots. Je ne peux rien faire, alors le matin je la mets dans la boucle, tous les matins. C’est tout ce que je peux faire. C’est mieux que rien, surtout pour moi, et je ne m’illusionne plus du reste. C’est tout ce que je peux faire.

Parfois je me demande pourquoi j’entend ce que j’entend et surtout pourquoi je suis la seule à les entendre ? A quoi ça sert ? Si je ne peux rien en faire ? Si je ne peux prévenir personne ? si je ne peux protéger personne ? A quoi ça sert si je ne peux pas protéger ma petite sœur ?

Alors j’ai choisi « Humanités ».

Il me restait encore un peu d’espoir à ce moment-là. Il me restait encore quelques matins à passer.

Plus exactement, j’ai choisi « Littérature », contre toute attente, surtout les miennes. Mais j’ai senti quelque chose. C’était au moment de choisir un directeur de recherches. J’ai choisi en fonction d’un être qui, je le sentais, me permettrait de passer un obstacle. Lui avait des « trésors » qui seraient bien plus utiles, pas dans l’immédiat, mais plus tard, bien plus tard. Tellement tard, que l’heure n’est pas encore venue, je le sais. Mais elle viendra, je le sais. Je le sens. Donc je le sais.

Peut-être que je ne suis moi aussi qu’en train d’attendre mon beau prince, peut être que je me fourvoie à essayer de libérer les « Humanités » de l’humanité, peut-être que tout cela n’est rien, mais au moins j’aurai essayé, même mal, même de travers. Après tout, moi aussi « j’y crois ». Peut être aussi que je n’aurai fait que m’entraîner pour une autre fois, va s’avoir.

Aujourd’hui donc, pas de pains perdus, surtout pas de service. J’ai des fourmis dans les doigts tellement j’ai froid à taper sur le clavier. Pourtant je n’ai pas fini, il m’en reste encore au moins un morceau ce matin. Après je pourrai me reposer un peu.

Je me suis inscrite au CAP cuisine pour mai prochain et à un stage de cuisine pour adulte en décembre. J’avais un programme en tête. Je devais passer le mois d’octobre à m’occuper des légumes. Pour ce faire, j’ai, le jour de mon anniversaire, demandé à Blanche de m’offrir mes premiers couteaux. Je voulais faire les choses « bien », dans l’ordre. Lasse, le magasin dans lequel nous sommes allées, spécialisé, n’avait rien d’enchantant pour un rituel. J’ai quand même fini par choisir quatre couteaux, dont mon préféré, le filet de sole. Je ne sais pas pourquoi, mais je sais que je n’aurai pas de problèmes avec les viandes et les poissons. Par contre les légumes. Et ce couteau éminceur de vingt centimètres. C’est lui qui me fait peur.

Le lendemain de l’achat, j’ai ramené mes nouveaux couteaux à la Détente, pour pouvoir m’y entrainer le moment venu. Lasse, le moment n’est pas encore venu, et nous sommes le 29 octobre. Et ces couteaux me font toujours aussi peur.

Quelques jours plus tard, nous trainions ailleurs, dans un autre magasin aux couleurs apprêtées pour la vente cette fois. J’y trouve très facilement la douille à St Honoré qui me manquait, mais j’oublie encore de prendre les poches qui vont avec. Tant pis, je vais finir d’user celle que j’ai acheté il y a six mois.

Juste avant de partir, et alors que Blanche avait déjà réglé les achats, je tourne autour d’une table dont la pancarte « -50 % » ne m’avait pas encore imprimé le cristallin. Je tourne autour d’un grille-pain gigantesque et rouge totalement inadapté sauf à vouloir impressionner quelques invités matinaux. Sous un autre appareil dont je ne me souviens  même pas, je vois dépasser le manche d’un couteau. Je le reluque quelques secondes avant de me décider à essayer de le prendre en main.

Détail important : j’ai des mains d’enfant. Je veux dire, vraiment. Déjà quand je travaillais aux huîtres, il fallait que je me fasse commander mes gants taille 6 pour être sûre d’en avoir tant j’étais la seule à avoir de si petites mains. Ce qui fait une grosse différence quand il s’agit de choisir des couteaux. Je voulais les plus légers possible, espérant là encore qu’ils me blesseraient le moins possible. C’est pour ça que j’avais choisi les couteaux de la marque espagnole. Ils étaient plus légers. Mais je les avais rangés pour ne jamais les ressortir. Celui qui était sur la table, quand je l’ai pris en main, j’ai tout de suite senti qu’il n’était pas léger. Mais j’ai senti autre chose. Il n’était peut être pas léger, mais tellement équilibré, on aurait dit qu’il était fait à ma main, ou presque. Bien sûr j’ai encore demandé à Blanche de me l’offrir, mais cette fois en rentrant, j’ai chopé le premier légume à couper pour l’essayer. C’était un oignon. Et qu’il était fluide le mouvement, que j’étais à l’aise. Je ne l’ai pas réutilisé depuis cependant. Les deux tendinites au deux bras me font encore un peu peur. Mais je sais que ce n’est pas lui qui me blessera. Il ne reste plus qu’à ce que je ne blesse pas moi-même.

Mal écrit ?

Certes, certes.

Mais écrit tout de même, jusqu’au bout de ce matin. Il est 7h59. Et les épaules me commandent d’arrêter pour aujourd’hui. C’est déjà pas si mal.

TDEDULP spéciale dédicace Perec #42

 

 

toi qui entres ici (comme dans un moulin) une image par minute et plus pour tenter d’épuiser ce carrefour – pour ne pas oublier, jamais – vive la vie vive l’espoir

installation – commande (un kir à 5e50 quand même) (on ne plaisante guère au Carillon) un carrefour de mémoire terrifiante – c’était le but recherché, ça n’a pas marché : on est là – pourquoi là, parce que – complétée d’une autre raison – on recommence : hommage à G org s P r c – en quelque soixante dix et plus images – Paris, plutôt debout – il est midi

les bâtiments sont ceux de l’hôpital (à genoux) bâches jaunes en accord avec la marquise du petit Cambodge -(les nuées sont des gouttes d’eau de la vitre du bar) –  passe le camion du service d’aide médicale d’urgence – midi 2 (intérieur jour)

midi 3, sous l’œil (ébloui) des caméras

cette dame qui s’arrête, stationne un moment

puis passe

s’en va – midi 6 les livreurs en mobylette

ou en vélo électrique (comme si ça ne polluait pas) – midi 8

on passe-on marche – on va manger – la plaque blanche aux victimes des attentats odieux  (lâches, minables, abjects) du 13 novembre 2015 – droit cadre, l’un des héros du jour – midi 10

midi onze

puis douze

puis treize

treize encore

puis 14 (il est parti)

 on pourra vérifier l’omniprésence des ninos – des gens  – des passants – 18

puis 19 – panoramique à 90 degrés : sur la petite place (sans doute intitulée) un banc, et sur le banc, téléphonant

midi 20, partie et remplacée mais sur l’autre assise

midi 21 attente puis où est-ce déjà ?

plutôt par là (22)

(il s’en va livrer) voyons voir – un bus (23) 75 (et non 29 comme le Roubaud) comme un ange passe

va vers son destin (ainsi que les humains) – calme apparent (26)

(28) (une demi-heure déjà?) on s’en va

pour la livraison

on pense à ce film, Lunchbox (Ritesh Batra, 2013) – vigilant peut-être mais sans le point pour ne pas divulguer (30)

un certaine idée de la défense – midi trente c’est l’heure de manger

on va attendre un moment – la pointe – (32) – j’crois bien que c’est par là


possible,probable, sans doute – allons (33)

un extrait (notes procès moquette) du cahier où sont prises les notes – à un moment, elles seront retranscrites mais pas tout de suite – des images d’abord : nature morte aux trois plaques (34)

juste un petit moment

d’autres gens (35)

intérieur jour, chat noir du Carillon – (36) en attente des plats préparés

et passage d’un être au nino (barbe & baskets – tatouages & vélocipède) – (37)

attends à quoi tu penses? – (38.2)

le bruit les sirènes l’urgence –  (39) « I’m back »

(39.2) pano : en attente

(39.3) et puis avec ça ?

ça avance – respirez soufflez – (40)

(les types fument sur le trottoir, attendent que le temps s’en aille) – (40.2)

passe par ici, reviens par là – (41)

savoir recevoir – la rue Bichat (c’était un chirurgien, je crois bien) a changé de sens de circulation – j’ai oublié de le préciser – c’est de mémoire – j’oublie (42)

c’est fait – quoi d’autre ? (42.2)

à nouveau – encore ( 42.3) respirez – soufflez –

allô ? non mais allô quoi  ? t’es où ?

hein ?  le 75 à nouveau

puis encore, on se demande

attendre repartir revenir – (45)

je viens

je suis par là, oui

(46) le 75 encore

plus le chien, le selfie, le caddy, la capuche le bonnet le soleil

livraison boite aux lettres pantalon rouge et chaussures blanches – (46-7-8)

kestum’veux toi ? je m’en vais clopant – le soleil aussi

attacher son vélo – capuche  boite aux lettres tête de potelet – (voilà qu’il est moins dix)

certes –

on commence à avoir faim –  (51)

ça va venir ou c’est déjà fini – (51.2)

qu’est-ce qu’on serait sans nino ? attends un peu

(ce sont les très gros plans qui me plaisent – image arrêtée déjà fugace et passée)

plus de soleil – clopo – où tu vas ? (52)

bon on s’y retrouve ? Oui, j’y vais

des sourires jusqu’à la nausée – laisse

manger avec des baguettes, repérer le paparazzo, continuer à penser

réunis là le temps d’une image – avancer droit devant soi, la vie – passe passe (53)

le temps de se retourner et puis (55)

où est-ce déjà ? – je ne sais plus (57) intérieur jour

on en reparle dans deux ans (59)

ce bougé…

Puisque passe le temps, passeront les années – j’aurais du me dire « tiens j’en prends 53 » je n’en garde que, je laisse les autres – les gens , disponibles,qui vont et vaquent – bon appétit)

 

Huis clos

 

 

 

On a déjà parlé ici de ce réalisateur, Leonardo Di Constanzo, de sa façon de donner à voir les marges du monde – je ne sais pas si le monde n’en est pas complètement constitué, de ces marges : où est-il le standard, le mainstream, l’ordinaire et le normal ? Je me demande… Ici un microcosme

 

Le film commence autour d’un feu (au vrai il y a eu trois ou quatre plans (au générique de début) de la montagne environnante, en journée) : il fait nuit, des hommes, une demi-douzaine, boivent de la bière et rient aux souvenirs des jours de pêche – ça se passe en Sardaigne semble-t-il – ça pourrait se passer n’importe où – des hommes qui vont s’en aller, le lendemain ferme la prison dans laquelle ils travaillent tous.
Mais non.
Ils vont y rester encore un peu : on ne trouve pas d’endroit où enfermer une douzaine de (re)pris de justice. On dira au plus aguerri d’entre les matons (interprété par Toni Servillo) de garder la boutique – il est aussi le plus patient – le merveilleux dans le film c’est qu’il n’est pas tellement fait pour le rôle (je veux dire : pas l’acteur mais le personnage) mais que, petit à petit, il l’endosse sans trop de gêne ni de difficultés. Plus merveilleux encore, peut-être, c’est que le film parvient à nous faire comprendre que la prison est une fiction, une erreur grossière de l’humanité pour tenter de faire quelque chose des profondes tendances de ceux qui la constituent – la haine, peut-être, l’amour aussi sans doute, la présence des autres, la solitude, la paix – enfin chacun.e verra, à son propre avis.

En tout cas, à voir, sans aucun doute.

Ici les matons sur le plateau

l’administration pénitentiaire a des défauts : ici par exemple, la cuisine a très mauvais goût : les prisonniers font grève, voilà qui risquerait de mal tourner. L’un d’entre eux, pourtant, l’un des plus respectés aussi, se propose de faire la cuisine (des pâtes essentiellement, avec des polpettes, de la viande, du veau comme on veut) (le rôle du cuisinier est tenu par Silvio Orlando)

et ce qu’il y a c’est qu’on ne le lui refuse pas…
Un autre coup du sort, peut-être, est la venue d’un orage : plus de lumière – que faire ? On se réunit

on discute, on négocie entre gardiens, on cherchera des lampes tempête on éclairera la scène, on mangera tous ensemble…
Sans colère ni violence, sans effusion de sang ni coups – quelque chose comme de la bonne volonté


de la volonté d’être digne – une histoire simple si on veut

À la fin, on apprend des choses, des relations, des éclaircissements, des faits simples et directs, qui nous entraînent jusqu’à nous faire comprendre que les rôles sont peut-être, est-ce destin, est-ce hasard, on ne sait

les rôles tendent vers l’égalité

 

Ariaferma  un (très beau) film de Leornado Di Constanzo

 

les cigognes de Mikhaïl Kalatozov

 

 

 

 

 

Parler de cinéma (soviétique c’est vrai) – une palme d’or en 1958 à Cannes – plus de soixante ans de ça, président du jury : Marcel Achard – la fin de la guerre date de treize ans – le lyrisme : par exemple ce plan, elle court

elle court encore

elle cherche son amoureux

c’est que la guerre commence (il y part, il y est parti)

l’armée qu’on dit rouge et ses chars (travelling bas haut – à la grue sûrement)

elle court encore

elle est sous le titre du film (au dessus du « d » de quand) (c’est une surimpression d’un film annonce – sans doute à la faveur d’une sortie en dvd, un marketing de maçon – lapalissade – en temps de réclusion inique) cependant le plan : une prouesse de mise en scène et en place – les figurants, les chars, la poussière l’héroïne : une merveille, du cinéma tout bonnement – une histoire d’amour

ils s’aiment (mais ne) et se promettent (pas encore) leur vie (presque : un billet qui n’arrive pas à destination (un peu comme dans Cinéma Paradiso (Guiseppe Tornatore, 1988) et le fil se rompt) (une tragédie – une tragédie que la vie, que la guerre…)

pourtant

il la raccompagne chez elle

elle s’en va

mais elle ne le retrouvera plus – noir et blanc sublime (elle épousera un couard (le cousin du précédent), mais c’est elle le centre du film et de la narration)

la guerre

où la mort rôde, la guerre et l’horreur – puis reviendra la paix

sans lui, sans doute… Une vraie merveille

Elle c’est « Tatiana Samoïlova (qui) sublimée par les trouvailles visuelles de Sergueï Ouroussevski (le chef op, formidable) , crève l’écran » (je cite quelques mots trouvés je ne sais plus où).

Quand passent les cigognes, un film de Mikhaïl Kalatozov (son image en entrée de billet) 1958

à voir du même (avec le même chef op) Soy Cuba (l’arrivée au pouvoir du Lider Maximo, en pays frère…)

dans le même registre (la guerre et ses horreurs, comment tenter d’en rendre compte) au lyrisme sublime aussi (mais en couleurs) « Le temps d’aimer, le temps de mourir », Douglas Sirk 1958 (même année…)

 

 

 

Tirez sur le pianiste !

 

 

 

Reprenons : c’est parti du fait qu’un entrefilet mentionnait que durant ces quelques mois d’arrêt momentané, le monde du cinéma (si on peut dire) comme un bon peu du reste d’ailleurs du monde tout court avait subi cette stase – tous les tournages se sont arrêtés, les gens sont rentrés chez eux ou dans leur seconde maison, reclus comme nous autres (ici, là ailleurs) (à Paris et dans le neuf trois par exemple ça a été plus tendu qu’en campagne, certes) (jte parle même pas des US ou de l’UK, ou de l’Inde ou de la Chine…) – et que durant cette période, la plupart des cerveaux ont continué de fonctionner comme si de rien n’était – les pervers ont cherché à tirer profit de l’affaire, d’autres ont tenté de faire autrement; on a glosé sur « le monde d’après » comme si ça avait un sens – puis on s’est remis à nos occupations (au travail, c’est le fond qui manque le moins disait ce connard de la Fontaine) (évidemment que je suis en colère : qui ne l’est pas ?). L’entrefilet disait (c’était courant juillet ou août je ne sais plus exactement) que machin avait cédé les droits de son catalogue de films à truc – pour donner la chance aux abonnés de truc de voir ces films-là. Je ne suis pas particulièrement fondu des réalisations de ce cinéaste (François Truffaut – il est de 32, il a vingt huit ans au moment du tournage) que je trouve assez hypocrite – mais ça ne regarde que moi – et en tout cas j’avais déjà vu le film chroniqué aujourd’hui (probablement dans les années soixante dix) (je me souviens parfaitement de la prestation comme on dit aujourd’hui de Boby (ne prend qu’un b) Lapointe (Avanies et framboises) – il est de 22).  Machin a donc vendu à truc le droit de diffuser les films du Truffaut à son catalogue (machin a dû racheter le Carrosse j’imagine – j’irai voir, oui *) : et alors ? Bof, rien sinon que donc pendant les suites de la pandémie, truc (qui est, par parenthèses si mes sources sont bonnes, pété de fric) a été voir les producteurs des films arrêtés pour cause de virus à laconcorona pour leur proposer un rachat (il paraît que ça n’a pas marché avec beaucoup) (prix inférieur hein, puisque quand même tout ça s’est arrêté, on va reprendre produire il faut comprendre et voilà…!). Non, je m’en fiche un peu, les affaires sont ce qu’elles sont : et d’ailleurs je pense que le Truffaut n’aurait vu aucune objection à ce que ses films soient diffusés via le réseau de truc, mais enfin il me semble que truc est un peu dégueulasse (il n’est pas douteux que le monde dans lequel il grouillotte le soit tout autant) (c’est celui des affaires, comme c’est celui du cinéma) . Voilà tout 

 

Bon sinon, le film du jour est tiré d’un roman de David Goodis (1956 – il est de 1917, il n’a pas quarante ans) (traduit en série noire en 1957 – traduit par Chantal Wourgaft – son âge je ne sais,elle est décédée je crois), il y a pas mal d’invraisemblances mais on s’en fout un peu. On est assez content de voir du noir et blanc (image : Raoul Coutard – il est de 24, il tape trente-six); on est aussi content de voir Charles Aznavour (il est de 24 aussi, lui) alias Edouard Saroyan, alias Charlie Kolher en pianiste. Il s’agit de l’histoire de quatre frères (ici on en voit deux – gauche cadre, c’est Chico (Albert Rémy (né en 15, 45 piges) – il jouait le père du Doinel (Antoine, donc) dans « les 400 coups » l’année d’avant)

C’est à Charlie qu’on s’attache – il rencontre Léna – son frère Chico est poursuivi par des voyous qu’il a grugé – évidemment ça va mal finir.  Le film date de 1960;  on voit les rues de Paris un petit peu; Charlie

rencontre Léna (Marie Dubois, elle a vingt-trois ans; il en a trente-huit (

dans la – si elle existe – vraie vie) : ce soir-là ça ne se fera pas – il rentre chez lui (il vit avec son frère Fido qui doit avoir dans les douze ans) – sur le même palier vit Clarisse, une respectueuse qui danse là où joue Charlie – elle garde le petit Fido (Richard  Kanayan, doit avoir dans les douze ans – il jouait aussi déjà dans les 400 coups, l’année précédente) quand il revient de l’école, elle lui donne à manger, c’est un peu comme une mère (ou une grande sœur) –

Charlie et elle se retrouvent dans le même lit, ils sont amants en somme (elle c’est Michèle Mercier (elle a vingt ans) (elle va tourner bientôt  la série des « Angélique » et devenir une espèce de star

du grand écran) (il n’y en a pas vraiment à l’époque de petit) – mais Charlie aime (sans encore vraiment tout à fait le savoir) Léna, et puis les choses allant comme elles vont

ce qui doit arriver arrive

(c’est assez convenu, j’avais prévenu) (conventionnel : les femmes sont jeunes, les hommes plus âgés, tout ça) et puis on parle – un long flashback explique pourquoi Charlie est si triste – alors que Léna elle est si gaie – on apprend que Charlie est veuf de Thérèse

(Nicole Berger, adorable : vingt-six ans au moment du tournage) (elle se tuera dans un accident de voiture en 1967, que la paix reste sur son âme) – Charlie reste peut-être un peu coupable de ce suicide – c’est une histoire triste (elle a couché avec l’imprésario à Charlie afin (peut-être) de lui faire obtenir un contrat (lequel imprésario est interprété par Claude Heymann – qui est de 7, ça lui fait 53 printemps) (elle s’en veut, elle se jette par la fenêtre; Charlie ne l’en empêche pas) – et puis, et puis Charlie tue en état de légitime défense le patron du bar, Léna l’aide à s’enfuir alors la route

et la poursuite par les autres malfrats qui veulent leur argent (je passe sur certains autres détails)

et la fin dans la neige

Il y a cependant en ouverture cette scène qui se déroule dans la rue où Chico s’enfuit et est aidé à se relever par un type qui lui flanque des gifles – le type porte des fleurs à sa femme, et nous explique pourquoi et comment il en est tombé amoureux – c’est la raison du film (comme celle de tous les autres films sûrement), le passant est interprété par Alex Joffé (il est de 18)

un cinéaste (des comédies surtout, films avec Bourvil, Robert Hirsch etc. plutôt qualité française…), acteur et scénariste, père d’Arthur Joffé (je me disais je le connais, mais non, (enfin oui, mais non) je le confonds avec Roland Joffé) – et donc comme un signe vers cette frange du cinéma honnie et vomie par ce qu’on appelait alors « la nouvelle vague »… Et pour finir mentionnons Catherine Lutz dans le rôle de la femme (« plus pour longtemps » dit-elle dans un éclair de préscience de l’avenir) (elle est de ? – elle a dans les 40 ans, là) Mammy, du patron du bar (Serge Davri, il est de 19)

 

(*) : (add. de 9h53) sous le lien, l’article de la Cinémathèque Française indique que « tous les films de François Truffaut seront produits par » le Carrosse sauf celui-ci, plus « Fahrenheit 451 » (1966, d’après Ray Bradbury),  « Une belle fille comme moi » (1972) et « la Nuit américaine »(1973) – ce sont sans doute ces films qui ont été rachétés par machin, donc, et non ceux produits par les films du Carrosse (faudrait voir: y’a du boulot).

#11 bis – résister encore ( plats ronds)

 

 

 

j’ai vaguement le sentiment qu’on veut nous rejouer la même partition – nous faire peur, et encore – afin de ne pas nous laisser libre du peu qu’il nous reste – des masques, des gels, des regards effrayés, soucieux – le monde deviendrait-il semblable à ce qu’en prédisait Stephen King dans son  22 11 63 – après la guerre atomique, on a muté, on n’a plus d’appareil respiratoire – quelque chose de ce genre – on aime avoir peur aussi, mais vu l’épaisseur de la connerie ambiante (ne citons pas leurs noms mais les chefs d’état, non, vraiment…) on serait bien fondé à croire que ça pourrait tout aussi bien se déclencher demain à Hong-Kong, en Corée en mer de Chine, à Chypre, en Pologne ou en Hongrie, n’importe où en Afrique ou ailleurs, finalement – on est peu de choses – pendant ces jours là, les plats ronds

ici du pain perdu – cette plaie de savoir que près de trois milliards d’humains, sur cette terre ne mange pas à sa faim – l’eau manque à un milliards des nôtres – on a laissé les épiceries ouvertes, on a récupéré le pain en trop, un peu d’œuf un peu de lait du sucre –

une quiche lorraine – ces images de plats, de chats, de soi : quels enseignements ?

pas si ronde que ça, la pizza – le froid parfois, puis le temps si clément – les peurs, les joies les rires les mots, le téléphone messenger et autres joyeusetés de zooms – quelque chose de tellement moderne – on n’était pas là, on était ailleurs, on parlait on se voyait – on en avait marre on pleurait – la rage au cœur de la fin mars

ça n’avait pas vocation à publication (ici jambon poireaux la quiche) (pas la lorraine) (on remarque peut-être la cafetière et les chaussons charentais de l’officiant en bas du cadre dans les bleus) il fallait bien vivre – les vieux mourraient seuls sans amis sans parents – seuls pour protéger nos propres angoisses – les gens applaudissaient à huit heures, le premier mercredi, on avait demandé aux croyants de prier – vers sept heures et demi – aujourd’hui

tu sais quoi, (laitue/betteraves/pommes) en ville j’aimais à photographier le pékin, à présent il s’avance masqué, je ne le regarde plus je ne les regarde pas, je transpire je fais attention, je ne respire que chichement – je regarde mes contemporains – il ne fait pas beau

(papardelle/poireaux/crème/andouille) je me souviens et j’entends « signaux faibles » dans le poste, les mêmes et on recommence en pire – on achètera le silence mais on ne fera rien pour l’institution de l’hôpital, rien pour rendre son humanité à cette santé qui a son ministère – la honte qui atteint nos âmes, vivants certes, mais à quel prix ? – les blouses blanches, les morts dans la rue, les prises genoux sur le cou pour faire taire, empêcher de respirer, les manifestations nassées, réprimées, les gens éborgnés, maltraités violentés gazés – les mensonges éhontés sur les stocks de masques, sur les tests sur les trains qui convoient dix malades – ces images percluses de fausseté – et puis le silence, les ciels clairs

(lentilles corail/riz basmati/ail oignons) vivre se nourrir penser aux autres – le poids de la maladie qui alourdit les bronches, celui de la peur qui essaime en nous tandis que le minus se pavane chez le professeur-miracle de Marseille – il y avait le matin le roman de L’AiR Nu à réaliser, les travaux, ranger, nettoyer penser rire se prendre dans les bras parler aux autres lire écouter – désormais, comme tu sais, nous sommes les vieux – nous sommes les parents – un printemps magnifique en soleil et tendresse colorée –

(lentilles vertes/lards/basilic) (sans point) des plats ronds dont on échangeait avec les autres les images – pas mal, hum ça a l’air bon – bon appétit – tout était parfaitement réglé comme avant, avec nos A2D, nos promenades, nos masques – des « signaux faibles » qui se font jour, on repère des « clusters » on invective « barrières » on demande des comptes – le chant des oiseaux, plus un seul avion à réaction plus un seul panache blanc qui salit l’horizon et le climat – l’idiot qui parle, les médecins qui commandent, les flics qui tabassent – résister, oui, anniversaire, penser aux autres, nos amis disparus, nos parents arrachés à notre affection –

quand on s’est retrouvés (sablés nature), on s’est embrassés, on s’est dit à nouveau qu’on s’aimait, qu’on était là, bien là, oui, on a survécu, on s’est tenu on s’est parlé, on est là – vous êtes là ? dans cette maison, oui, des plats ronds

seulement pour vivre (tarte aux pommes/confitures de cerises) sans intention particulière

pour les amis lors du premier wtf déconfinement – cent kilomètres – des artichauts à la barigoule – sans intention particulière, non, simplement pour vivre et se savoir vivant

et continuer sans laisser le vide nous envahir (ici des pommes de terre nouvelles, là des radis roses et ronds)

et cette dernière pour finir, italienne un peu, déjà posée, pour ne pas oublier

À bientôt, mon fils

 

 

 

 

je l’aurais traduit ce titre : en chinois, il semble qu’il s’agisse d’une maxime – donc de Confucius – « terre ancienne vaste ciel » – ah non c’est Lao Tseu qui en serait l’auteur (on ne sait pas, vraiment, on n’a guère de culture que la nôtre) – je ne sais pas mais l’anglais comme dialecte mondial, je sais ça, oui – et les distributeurs d’ici ou de là ne font pas exception – de longtemps ces questions se posent, sans en trouver de réponse autre que celle voulue par ce libéralisme mal nommé, cette « loi du marché » et sa main invisible – afin que les choses rapportent le plus vite et le plus possible : peu importe les humains ( l’illustration ces temps-ci avec le procès des patrons inqualifiables – mais tellement dans l’air du temps – de france télécom – je m’égare mais pas trop)

Il s’agit d’une quarantaine d’années vécues par une famille – et quelques amis – une tragédie d’entrée (la mort d’un enfant) et un peu plus de trois heures d’histoire et d’émotions. Un film qui vient de Chine, primé au festival de Berlin cette année (les deux interprètes – papa et maman – ou plutôt l’inverse – y ont reçu le prix d’interprétation – les rôles sont stéréotypés

le père s’assoit et mange – entre le petit : l’enfant unique d’alors – cette liberté de quiconque de procréer mise à mal par le gouvernement d’alors – sauf pour ceux qui en ont les moyens financiers –

mais voilà qu’elle retombe enceinte – lui propose de garder l’enfant : impossible

et l’amende ? Son amie mais sa cheffe lui rappelle la loi

elle avortera

et sera décorée pour cet acte – mais concomitamment le drame de la perte de leur premier né (je n’ai pas exactement compris, mais l’idée y est : le petit va mourir – il se rend avec son ami (le fils de la cheffe :

ce sont deux familles amis

) c’est ainsi : les enfants vont jouer près d’un barrage

et il se noiera – la scène terriblement efficace

une première séquence, une narration assez libre, chronologique, mais libre – on avance, les heures passent, ils émigrent sans doute dans le sud du pays

le vide et le manque subsistent, quand même ils adopteraient un autre enfant

un peu con comme sont cons les ados quand ils le sont – et puis le film continue, ils vieillissent ensemble, ils vivent encore

ils sont gens simples

travaillent et vivent (d’autres histoires y sont aussi)

puis la vieille amie va, elle aussi, mourir, et veut revoir ces anciens amis

ils reviendront donc les voir, la revoir elle, sur son lit de mort – il y aura du pardon dans l’air

des maladresses sans doute dans le scénario, un peu aussi dans les explications – je ne comprends pas tout, mais je vois quand une valise est vide par exemple : peu importe – pas vraiment mélodrame à la Mirage de la Vie (Douglas Sirk, 1962) mais un film qui a la carrure d’un classique

même si les choses sont attendues, les acteurs sont à l’unisson

les enfants, les parents, une espèce de vie – cruelle, désespérante parfois… (en ouverture de billet, la jeune soeur de l’ami du père du môme, je crois bien, mais je ne me souviens pas de cette image : je la pose parce qu’elle a des couleurs, un peu comme cette dernière ici, et quelque chose de joyeux…)

 

« So long, my son » un film de Wang Xiaoshuai

 

allez allez

en fait l’idée c’est de faire ce que l’on fait
avec plus ou moins de bonheur
plus ou moins de chance
plus ou moins de sérénité et de ténacité
plus ou moins de questionnements
sans oublier que nous ne sommes pas des îlots ou des gardiens de phare, faire c’est aussi regarder ce que font les autres avec plus ou moins de hardiesse, plus ou moins de vilenie, plus ou moins d’âpreté, plus ou moins de courage et/ou de cohérence
le faire des autres vient heurter s’engouffrer s’insinuer saupoudrer pénétrer notre faire à nous
et c’est ce qu’on garde de ces poudres de ces poteaux ou ces tenailles qui compte
par exemple j’ai lu cet homme qui dénonce ceux qui sont fiers de leur hideur
j’ai vu ces sit-in
ces armes maniées à la cow-boys
ces pelleteuses que des bras sans force repoussent, bras accablés
ces têtes hautes qui refusent de s’asseoir au fond du bus, qui refusent que les noyés se noient
faire, ce n’est pas difficile
faire, c’est impossible
c’est entre ces deux plateaux de la balance que son propre visage se sculpte en trois dimensions
et dans ce faire il y a aussi l’insu
ce qui survient et n’était pas prévu
parler de cinéma, ce n’est pas parler de cinéma, c’est parler des gens de comment ils vivent de comment ils sont vus de comment ils se voient de ce qui est proposé dans le faire
on peut se placer en vigie
on regarde ou on tourne les yeux
on fait comme ça nous chante
et parce qu’on fait ce qui nous chante ça sonnera toujours assez juste
(l’idée)
parce que les idées, ce ne sont pas des concepts, ce sont des corps
les rêves de piscines vides n’existent pas
ou bien c’est que les boutiquiers ont gagné ?
les boutiquiers à cols blancs dont les suv possèdent un pare-chocs anti rhinocéros en centre-ville ?
non les rêves de piscines vides n’existent pas
hop
inutiles
et déjà envolés
allez allez, ne traîne pas dit la voix, tout va bien