NH4NO3

 

 

 

après il y a aussi le cinéma – mais ces temps-ci, c’est plus de la recherche (après les 40 jours d’atelier) – garder la tête hors de l’eau avec d’autres tragédies ? je me demande mais faire vivre la maison peut-être (à quoi bon ?) il pleut – une espèce de malédiction (l’énoncer c’est la faire exister) – des images qui sont créditées dans le texte (une vingtaine de pages que je tiens à la disposition de qui les demanderait) – la suite d’articles est due à Jean-Pierre Perrin -je pose ici les images, en fin de billet deux liens qui mènent à des articles fouillés – les zones d’ombre restent nombreuses comme toujours dans ces cas-là, crois-je comprendre (j’essaye de comprendre, d’appréhender la manière de vivre de mes contemporains, je n’y arrive que mal) – une suite d’images : l’explosion a lieu le mardi 4 août 2020, à dix-heures sept (cette image-ci vient du quotidien L’orient le jour libanais, article de Christophe Boltanski sous lien en fin de billet)

dans un entrepôt séjournait depuis six ans des tonnes (800 croit-on savoir) de nitrate d’amonium (composé servant d’engrais mais qui à une certaine teneur devient un explosif puissant) – l’entrepôt explose et provoque la mort :une terreur dans tout le centre-ville (capture d’écran d’une illustration (lien en fin de billet) d’un article de Jean-Vincent Dujoncquoy, paru dans Jeune Marine)

quelque chose comme l’enfer, supposons.
Des responsables, il devrait y en avoir mais non, c’est le Liban
Ce n’est d’ailleurs pas sans une certaine appréhension qu’on écrit ici
Tout est dévasté

On ne voit pas grand chose – plus tard – après les morts et les blessés –

le jour de l’explosion – l’enquête s’est embourbée, mais un juge officie néanmoins toujours son nom Tarek Bitar

ici des images où on brûle son effigie – des intérêts supérieurs, des guerres et d’autres morts encore et encore d’autres morts

ici l’image du visage de Lokman Slim, assassiné – d’autres connurent le même sort – je cite l’article de Jean-Pierre Perrin

« L’intellectuel Lokman Slim, le photographe Joe Bejjany, les colonels Joseph Skaff et Mounir Abou Rjeily ont été tués, l’un avant l’explosion du nitrate d’ammonium dans le port de Beyrouth, trois après. Aucun suspect n’a jamais été arrêté. Et nul ne sait exactement ce qu’ils avaient découvert. »

Des crimes impunis, dans la région, sont pléthore : une espèce de faillite – un pays entier, »petit pays je t’aime beaucoup « chantait Cesaria pour son Cap Vert – ici règne la terreur, la compromission, les affaires sont les affaires et les guerres continuent à tuer, toujours et toujours…

Que dire d’autre

 

lien vers l’article de L’Orient le jour 

lien vers l’article de Jeune Marine 

J’ai deux amis libanais, Gracia et Serge – cet article leur est dédié

Où porter le regard ?

 

 

 

non mais attends, c’est quoi cette maison ? j’avais pensé faire une approche par les images industrielles – mais non – mais non – j’avais lu regardé entendu vu  par exemple, pour rire, ceci

rire très jaune malgré tout (le regard du clebs est particulièrement signifiant) – j’ai lu quelque chose de ce genre (parce que Sandra Lucbert est quelqu’un que j’apprécie : on ne va pas sortir les fusils mais on n’en est pas loin) – j’ai essayé de m’abrutir de travail (la traduction des communiqués des BR pour poser quelque chose d’un peu, disons, abouti dans l’atelier pdf) – rien n’y a fait

j’ai lu dans un entre-filet – il me semble que c’était dans le En attendant Nadeau du jour, que Stéphane Hessel, entre et avec bien d’autres, s’était échappé du camp de concentration de Buchenwald à l’été 44 du siècle dernier – je me suis souvenu de mon père et je me suis souvenu du sien (alors que je ne l’ai jamais vu ni connu ni rien)

et alors que le type s’envole en Serbie vendre des rafales à ce que j’ai vaguement perçu – le gouvernement ne sert décidément à rien, et les chambres à rien non plus : on disait (tu te souviens, on n’avait pas vingt ans, on avait des lueurs d’espoir dans les yeux et des charmes dans nos sourires, on disait on scandait on applaudissait en marchant en criant) « élections piéjacons » – tout est-il donc consommé ? le type a perdu la boule (les affaires sont les affaires, c’est assez possible pour lui mais enfin, le nez dedans il dit encore que ça sent bon ? )

le dossier contient un certain nombre d’images

on peut les croire manquées – elles ont été faites à l’aveugle, certains soirs crépusculaires – je ne vois pas non plus tellement le rapport si tu vas par là

j’ai sans doute tort de le divulguer

c’est au sol – l’opérateur est en mouvement, il n’est pas certain que la direction qu’il prend soit décidée

c’est flou – c’est compliqué – c’est inutile – j’avais quelque chose de beau à faire, peut-être, et tout ça s’est dilué dans de fausses dispositions – le dossier s’intitule « herbes folles »

je ne sais pas où je vais – je m’abrutis – je ne sais plus

puisqu’elles sont là, autant en faire quelque chose – oui – quelque chose

c’est encore l’été mais ce mois se termine et j’ai des difficultés avec le suivant (comme avec tous les suivants d’ailleurs, jusque mars) j’ai peur du froid

quelque chose que je dois surmonter –  j’ai peur de voir les choses tomber comme les gens parce que à ne pas entendre ne pas écouter ne pas prendre en compte, que cherche-t-il sinon l’exaspération des passions ?

après ça, j’ai regardé le ciel

 

Gena

 

 

ici et là glanées – Opening Night (1977) mon préféré probablement parce que inspiré de All about Eve (1950) (Joseph Mankiewicz) et aussi plus loin cependant cette femme sous influence (1974) – mais mon préféré d’entre tous aussi, le sketch (disons) Los Angelès mis en scène par Jim Jarmusch Night on earth (1991) où le cinéma est remis à sa place

Gena Rowlands (c) JF Robert

elle ne se ressemble pas, hein…
Ici dans Opening Night magnifiquement

elle, oui vraiment

– salut l’artiste

 

dispersion #26

 

 

 

 

il y a une chanson qui fait
je mettrai mon cœur dans du papier d’argent
et puisque aujourd’hui est mercredi, que bientôt les habits de vacances seront placés dans les valises et celles-ci dans le coffre, l’agent pense à fermer les volets (il existe une option pour rendre cette manœuvre plus simple : appuyer sur un bouton, et l’électricité se met en marche) ne sont pas à fermeture automatique – couper l’eau et le gaz – s’en aller
Quelques semaines peut-être – là-bas attend le bricolage l’enduit la peinture – ici se perpétue le sport et son efficace concurrence (que le meilleur gagne est une antienne abjecte – masculine, dominante, impériale j’en passe) – ici donc quelques images de ces jours-ci glanées là ici et ailleurs – j’ai laissé les clés sous le pot de fleurs (rouges – d’ailleurs, elle périclitent – les fleurs, pas les clés – il faudra qu’on s’en occupe) (j’y penserai, sans doute, au retour, si cette éventualité m’est accordée)

voilà qui commence mal : pour les sous on repassera donc – il s’agit je crois bien, d’une vengeance –  il faut juste que je me dépêche – au parc (il a été réintitulé « des nations » comme si c’était là une qualité) une allégorie de la culture du sport en cette image de la boite à livres 

la transparence est totale.
C’est aussi une des raisons de ma démission capitale : je pars et je pose
 
mon numéro d’appel aux abonnés absents
un dégoût profond pour la profusion de matériel, la convocation des télévisions et des grandes marques, la pléthore d’affiches, d’images, de couleurs criardes – une espèce d’obscénité alors que flambe le monde – que des milliards d’entre nous meurent de faim de soif de manques de médicaments – une horreur

Passons

marchons, avançons, laissons – nous n’y pouvons rien – la messe sera dite, espérons qu’elle ne provoquera pas trop de terreurs – une chose est certaine, cependant, c’est que la police est partout – un

au parc comme au Louvre – deux – 

nous voilà rassurés, nous sommes sous bonne garde – trois 

la belle vie – grâce à nos impôts, certes – et ça ne fait que commencer (même pas…)
passons, laisse

mes chansons d’amour resterons là dans mon piano
ici Léo et Pépé

(sale histoire – passons encore – on ne fait que passer…)
une disparition (Shelley Duvall, magnifiquement, dans
Shining (Stanley Kubrick, 1980))

et puis ici la réalisatrice Santhya Suri (son film, Santosh, magnifique – à voir)

et puis cette porte écrite (un immeuble de la rue Tesson (Paris 10°) qui a brûlé, un jour où un camion-poubelle s’est enflammé devant cette porte il y a quelques années)

j’aurai jeté la clé du piano dans l’eau
quelques images actuelles, et celle-ci retrouvée dans les milliers entreposées

douceur chaleur calme luxe volupté – et enfin, pour finir, le bac qui relie l’île (Erétria) au continent (Oropos) un soir à l’heure de l’ouzo – la voiture du vendeur de chaises de plastique – la lumière de la nuit

la chanson de Michel Jonasz Je voulais te dire que je t’attends
Bonnes vacances…

 

dispersion une série de cette maison

 

Quatre-vingt d’or

 

 

 

je ne suis pas certain d’avoir le droit – la latence – la licence – de m’emparer de ces images mais elles me plaisent et je n’ai pas vu le film (dans le genre bourrique : je n’aime pas (trop) les films musicaux (type Une chambre en ville (Jacques Demy, 1982) pas vu non plus) : ça fait que quand même ils seraient (comme ici) réalisés par des personnes aimées, je décline – c’est le cas de le dire). Ces temps-ci, l’agent est patraqué de maladie (arrêt maladie ? non, mais quel code du travail ? on se croit où ?) – ce qui ne l’a pas vraiment empêché de (re)lire

le Ma mère rit de la Chantal qu’on aime bien par ailleurs d’ailleurs – il y aura donc ici dix clichés,

Serge Meynard, Chantal Akerman et Gilberto Azevedo sur le tournage de Golden Eighties (photographie (c)Jean Ber-Fondation Chantal Akerman

 

dont deuxAkerman surle tournage de Golden Eighties (photographie (c)Jean Ber-Fondation Chantal Akerman)

 

de couleurs au sujet d’un film qui lui, parait de couleurs (en couleurs si tu préfères) – juste pour illustrer,

Chantal Akerman (et Manu de Chauvigny) sur le tournage de Golden Eighties (photographie (c)Jean Ber-FondationChantal Akerman)

 

parce que ça ne raconte pas le film

Akerman sur le tournage de Golden Eighties (photographie Jean Ber-Fondation Chantal Akerman)

 

(une histoire d’amour, des personnes qui s’aiment ou se détestent, se trouvent ou se cherchent, s’évitent ou s’attirent) – il y a madame Seyrig

Delphine Seyrig et Chantal Akerman sur le tournage de Golden Eighties (photographie (c)Jean Ber-Fondation Chantal Akerman)

ah oui, madame Seyrig

Delphine Seyrig et Chantal Akerman sur le tournage de Golden Eighties (photographie (c)Jean Ber-Fondation Chantal Akerman)

 

et monsieur Denner

Charles Denner, Lio, Chantal Akerman, Delphine Seyrig sur le tournage de Golden Eighties (photographie (c)Jean Ber-Fondation Chantal Akerman)

 

(L’homme qui aimait les femmes (Truffaut,1977)) ce qui emporte pas mal de choses.
Ça a aussi pour cadre un salon de coiffure

Lio et Chantal Akerman sur le tournage de Golden Eighties (photographei (c)Jean Ber- Fondation Chantal Akerman)

 

(ce qui a été signalé immédiatement à l’Invent’hair évidemment) (et qui m’a fait penser (ces histoires se rédigent dans le même espace temps de maladie) à ajouter un item au numéro de l’atelier-marathon d’anthologie traitant des odeurs : ici donc du poil). Je m’aperçois ce faisant disant écrivant que les légendes sont illisibles – il va falloir que je remette sur le métier ce travail (je lis, j’écris, je retranscrit les copyrights – on doit à la vérité de dire que sur le site où sont trouvées ces images le lien qui renvoie à l’auteur des images est merdique – mais on ne s’attend pas vraiment trop à autre chose de cette pseudo-institution dévaluée, comme tout ce qui, à la culture, touche dans notre contemporain).
Voilà qui est fait.

On y croise aussi Myriam Boyer et John Berry

Myriam Boyer, Chantal Akerman et John Berry sur le tournage de Golden Eighties (photographie (c)Jean Ber-Fondation Chantal Akerman)

et d’autres

Akerman sur le tournage de Golden Eighties (photographie Jean Ber-Fondation Chantal Akerman)

Le film date du siècle dernier, 1986 – je pose ceci, c’est juste pour la maison, parce que il faut quand même qu’elle vive, et je vais me recoucher

 

je me rends bien compte que je suis agi par quelque chose qui me dépasse – ce recours à l’Akerman pour vanter ses mérites et l’anniversaire des dix ans de son suicide – sale coup qu’elle se et nous fit, le 5 octobre 2015, un an et demi après la mort de sa mère – après Charlie mais avant le funeste 13 novembre… – dans le livre (je cite de mémoire) elle dit à peu près « je pense au suicide, j’y pense souvent même… mais non, pas tant que ma mère sera vivante… je ne peux pas lui faire ça… » – c’est certainement cette sincérité qui touche juste  

 

et d’autres images

 

Celles-ci précèdent les 5 posées il y a quelques temps – ici il y en sept d’objets (tout ce qu’il reste) et sept de personnes (elles sont toutes mortes) – la photographie comme preuve de l’existence (et ici, en cette maison, comme témoignage) – il s’agit de la première « Scène intérieure » (initialement publiée par Jean-Bertrand Pontalis qui dirigeait la collection L’un et l’autre aux mêmes éditions) sous titrée « Faits » (ici en folio numéro 5940) – (la seconde, disons, mais qui, ici, a paru en premier, était intitulée  « Cinq femmes » et sous-titrée « Scène intérieure II ») – je retranscris ici quelques lignes de l‘Avertissement qui permettent de comprendre le contexte de ces deux ouvrages :

 

Les pages qui suivent contiennent, en effet, tout ce dont je me souviens, et tout ce que j’ai pu apprendre aussi sur mon père, ma mère, ma sœur, mes grands-parents paternels, deux oncles et une grand-tante disparus à Auschwitz en 1943 et 1944. Une tante par alliance seule est revenue. J’avais cinq ans et demi.

Le petit Marcel, ce samedi-là, avait été avec Annette, sa gouvernante disons, se promener au parc Montceau, situé en face de l’appartement du grand-père paternel. La gestapo vint à ce moment et arrêta toutes les personnes présentes dans l’appartement. Marcel et Annette, sur le trottoir de l’autre côté du boulevard virent cette arrestation, et s’en allèrent rapidement. Une chance

Ici une image de la mère (Maria Cohen, née le 9 octobre 1915 à Istanbul) déportée dans le convoi numéro 63 du 17 décembre 1943, assassinée (j’ignore la date de son décès)

recadrée

puis deux images du père (Jacques Cohen – né le 20 février 1902 à Istanbul) déporté dans le convoi numéro 59 du 2 décembre 1943 – assassiné

ces gens vivaient dans le dix-septième arrondissement de Paris, vers les Batignolles – ils étaient juifs immigrés d’Istanbul dans les années vingt du siècle précédent –

Monique Cohen, sœur de Marcel, née le 14 mai 1943 à Asnières (92) déportée à six mois comme le voulait la loi, avec sa mère dans le convoi 63, assassinée – on ne garde d’elle que ce bracelet

que je rapproche, on distingue le nœud pratiqué à l’une des parties, sans doute pour adapter le bijou au poignet de cette enfant

Sultana Cohen, la grand-mère paternelle de Marcel, née en 1871 à Istanbul, déportée dans le convoi numéro 59 du 2 septembre 1943, assassinée

Mercado Cohen, grand-père paternel (père de Jacques donc) né en 1864 à Istanbul, déporté dans le convoi numéro 59 du 2 septembre 1943, assassiné

vient Joseph Cohen (le frère aîné de Jacques), oncle de Marcel, né le 10 août 1895 à Istanbul, déporté dans le convoi numéro 59 du 2 septembre 1943, assassiné

Rebecca Chaki, cousine germaine de Mercado, qui vivait chez lui boulevard de Courcelles, née le 13 avril 1875 à Istanbul, déportée dans le convoi numéro 59 le 2 septembre 1943, assassinée

puis enfin David Salem (le plus âgé frère de Marie, la mère de Marcel, donc un de ses oncles) né le 29 avril 1908 à Constantinople, déporté dans le convoi numéro 75 du 30 mai 1944, assassiné (on dit de lui qu’il a eu une belle mort : il s’est jeté sur les barbelés électrifiés du camp d’Auschwitz) (ici avec sa sœur, dont il est l’aîné de sept ans)


Il reste aussi quelques objets dont les images sont portées en fin d’ouvrage, sous la rubrique « Documents » – ils forment des souvenirs de Marcel, des objets qui lui restent.
Le coquetier de sa mère (qui lui venait de ses parents et d’Istanbul)

puis ce petit objet représentant un cheval, offert par Jacques à Marcel (Jacques l’avait confectionné pour son fils)

le violon de Jacques (miraculeusement retrouvé dans la cave de l’appartement des Batignolles qui lui avait été pillé, probablement par des voisins peu scrupuleux)

le petit sac en tissu ayant contenu le bracelet de Monique

la résille de Jacques (il avait des cheveux qui se crantaient, ça ne lui plaisait pas, il la portait la nuit afin de domestiquer ses cheveux qu’il gominait aussi)

son étui à cigarettes en cuir

et enfin une reproduction d’un ours qui porte un récipient servant de cendrier (objet qui tenait dans la main – la bouche ouverte était peinte en rouge)

ici la table

Je pose pour finir ces quelques lignes de l’Avertissement, en page 8 de l’ouvrage, qui indiquent :

Aux monstruosités passées, il n’était pas possible d’ajouter l’injustice de laisser croire que ces matériaux étaient trop minces, la personnalité des disparus trop floue, et, pour utiliser une expression qui fait mal mais permettra de me faire comprendre, trop peu « originale » pour justifier un livre. À la scène III de l’opéra de Richard Wagner L’Or du Rhin la formule magique d’Alberiche  qui rend invisible est la suivante « Seid Nach und Nebel gleich » (« Soyez semblable à la nuit et au brouillard »). On sait l’usage qui fut ultérieurement fait de ce Nacht und Nebel.

 

Plus jamais ça.
Ce billet est dédié à mon grand-père Victor, déporté dans le convoi numéro 67, du 3 février 1944, assassiné à Auschwitz, ainsi qu’à Willy Holt, déporté dans le même convoi, mais qui, lui, en revint (et c’est heureux). Avec toute ma tendresse à eux comme à Marcel.

 

 

préférences

 

 

 

 

assez souvent je me dis mais
ça sert à quoi tout ça, ça sert à quoi, tout ça ? Ne me demandez pas de vous suivre
sic – une chanson, toujours dans les moments déprime il me vient une chanson – hier elle me disait « à ce moment-là vous étiez bien plus mélancolique » et je ne retrouvais pas ce moment, ce moment-là – c’est reparti c’est revenu – mais je me préoccupe de cette maison, si ça se trouve c’est moi, l’agent – mais pourquoi en faire? je ne sais… je ne tiens pas de compte, je ne vois pas de statistique, il vient de temps à autre quelqu’un, une visite vaguement – le lotissement pourrit – le chef ou la cheftaine ou la cheffe ou j’en sais rien (haine plus un) est aux abonnés absents – le moment est désespérant : on n’en vendra jamais une seule – elle n’est pas à vendre, elle est là, et se tient – cette chanson, elle, me tient compagnie mais ça ne sert à rien non plus – le nihilisme me guette : c’est pourquoi je m’évade 

je préférerai ne pas
regarder cette honte
voir ces ordures ces déchets ces horreurs depuis tant et tant de siècles
ces fleuves de sang
je préférerai ne pas voir
parfois ne pas savoir
ne pas avoir lu ni entendu dire ou taire
ça n’est pas que nous soyons frères
ou sœurs
d’une même famille mais du moins
tenter la paix de l’espèce
ce n’est pas le bonheur mais du monde
nous sommes la crème – et d’eux, et d’elles
et de leurs enfants nous ne prenons rien
et rien ne leur donnons
qu’ils meurent de faim et de soif, nous dans ces sportifs et utilitaires véhicules
dans le confort doux de nos nuits
nous les repoussons, nous construisons des murs
nous coulons leurs bateaux et s’ils survivent les mettons dans des camps
je préférerai ne pas savoir que ce n’est qu’une affaire de couleur
j’aime les couleurs, j’aime les contrastes
et je vois ce que font les votes de ces jours-ci
et ces regards et ces corps qui se noient
et ces autres qui vont et viennent et à la rue dorment
dans les recoins qu’on leur laisse
non parfois je voudrais ne pa
s voir
ne rien entendre et rester à regarder simplement l’air le vent la lumière
une belle musique doucement
je voudrais tant que ça cesse mais non
c’est là, devant nous, là, la bête immonde
hargneuse égoïste bavant sa hargne et sa haine
avec ses armes et ses drapeaux
cette honte

Cinq images

 

de nos jours, le 56 rue des Batignolles

 

ces cinq images qui sont dans le livre – des femmes qui aidèrent le jeune Marcel, puis plus tard encore, parents déportés assassinés – le, pour partie, même patronyme que le rédacteur – ça crée des liens – j’ai commandé recylivres le précédent ouvrage – va pas tarder – cependant de cette histoire (qui est aussi, en un sens, la grande) les bras me tombent – fréquentes déprimes plus éruptions psoriasistiques – tentative d’écritures avortées et encore et encore – quelques centaines de mots/jour – n’importe, voici dans la maison quelques héroïnes – des images souriantes – des femmes qui s’occupent des enfants (on voit aussi leurs hommes, parfois) (l’époque intime aussi quelque chose de la reconnaissance de ces rôles : ces êtres-là ne construisent pas des armes, ne violent ni ne tuent – l’époque est épique, comme elles le sont toutes : l’émergence du sexe « beau mais faible » comme disait une enquêtée – quotas ? vivrions-nous la fin de ?)

 

Annette Voland, veuve Gru, qui recueille Marcel  à six ans – ses parents raflés par la gestapo, lui en réchappe (19 à 60)

leurs sourires sans doute
Raymonde Duc Martin – vivait à Vaujours où Marcel commença d’aller à l’école pour en fuguer (on ne le battit ni le punit pour ces actes-là) (61 à 92)

oui les sourires pour la photo
Lily Salem épouse d’Emmanuel, un oncle maternel de Marcel (sa mère et son père disposaient du même patronyme, je crois bien qu’ils étaient de Constantinople) (93 à 122)

modiste, elle tutoie son employé sauf quand il y a des clientes  – créatrice de chapeau aux Batignolles – on l’aime beaucoup – les trois rangs de perles comme la reine d’Angleterre –
Madame Gobin (vit au troisième, 56 rue des Batignolles, au dessus de l’échope de la modiste Lily) (123 à 148)

dont on ne connaîtra pas le prénom – formidable pédagogue – drôle gaie adorable et veuve
Gabrielle Bertrand, journaliste, exploratrice, aimant les éléphants, le Bouthan, vivant dans une chambre de bonne – magnifique héroïne (149 à 185)

trente ans de plus que Marcel – elle décède à l’hôtel du Quai d’Orsay (l’expo de Sophie Calle) – pour elle, je reproduis cette phrase qui, comme un gant à ma taille, me va : ne demande pas ton chemin à celui qui le connaît, tu risquerais de ne jamais te perdre

Cinq femmes – contre l’œil hein – parfaitement humaines

 

Cinq Femmes un livre de Marcel Cohen (gallimard 2023) (encore merci)

 

Soixante-dix-septième

 

 

 

Lorsque j’ai commencé à demander à cette maison ([s]témoin)  s’il s’y trouvait des occurrences du mot  Cannes elle m’a donné trois pages d’articles – une trentaine – ce n’est donc pas que ça ne me plaise pas – c’est juste une vitrine : quelque chose qui montre quelque chose d’autre afin d’en procurer une jouissance suivie d’un désir – quelque chose d’assez obscène, il faut peut-être le (re)dire : hors de la scène exacte qui est celle de l’écran – lequel ne fait rien d’autre que de cacher exactement ce qui est projeté – on sort de là un peu hébété sans rien d’autre que des fantasmes – dehors il fait encore jour ou il pleut – il fait nuit et on est déçus, on a faim ou soif – on a envie d’une cigarette (ça va ensemble) – à nos âges (et à d’autres) on a des besoins à satisfaire –  et puis après on rentre – y aller, est-ce une habitude ? Un pli (mauvais, faux, à repasser ?) ou un besoin de toutes pièces créé ? Racontez-moi une histoire que je m’endorme… oui, sans doute, aussi mais pas seulement (des ombres, des fantômes, des vrais gens cependant – peuple – on les aime d’un amour secret, déçu, figé malheureux : on ne les connaît pas on ne voudrait pas, nous ne sommes pas du même monde disait une publicité de rillettes – toujours cette sensation – des vampires (des vampes) assoiffés…) – une industrie un peu comme une autre, mais un peu seulement   

(le mode opératoire a un peu changé – les légendes sont automatisées)

 

Cannes vingt-vingt-quatre mais d’abord une photo d’un des hommes les plus riches de ce pays qui a marié une starlette, laquelle l’entraîne sur « les marches du palais » (y’a une tant belle fille lonla) – le type (il est de 62) se laisse faire, heureux de montrer (et promouvoir) son bonheur et la poitrine opulente de sa conquête (on n’est jamais sûr de la réalité des photos, tu sais bien)

L’homme d’affaires français François-Henri Pinault (à gauche) et l’actrice américano-mexicaine Salma Hayek Pinault arrivent pour la projection du film « Killers of the Flower Moon » lors de la 76e édition du Festival de Cannes, dans le sud de la France, le 20 mai. 2023. (Photo de LOIC VENANCE / AFP)

s’il fallait exercer quelque cruauté (en serait-ce vraiment, d’ailleurs) on rappellerait les années de naissance des deux protagonistes – mais non – elle lui est contemporaine (elle est de 66) mais plus embijoutée – c’était l’année dernière – mais non – sans doute d’un an ont-ils ainsi que nous autres, pauvres et mortels, vieilli – cette année – sept-sept était son quantième – on a distingué des films – ce sont gens connus – et comme il y a quelque soupçons traînant dans les airs , on a justifié un jury composé d’autant de femmes que d’hommes mené par un président qui était une présidente

Membres du jury, de gauche à droite, Kore-eda Hirokazu, Eva Green, Pierfrancesco Favino, l’actrice Camille Cottin, Juliette Binoche, Meryl Streep avec la Palme d’Or d’honneur, la présidente du jury Greta Gerwig, Nadine Labaki, Lily Gladstone, J.A. Bayona et Omar Sy posent pour les photographes à leur arrivée à la cérémonie de remise des prix et à la première du film « le deuxième acte » lors du 77e festival international du film, Cannes, dans le sud de la France, le mardi 14 mai 2024. (Photo de Vianney le Caer /Invision/AP)

(on ne mentionne pas le nom de  cette femme en noir, extrême droite de l’image : ce n’est pas fair play) on a vaguement glosé sur les robes rouge/noire/blanche mais on s’en fout – une autre ?

Greta Gerwig, présidente du jury du 77e Festival de Cannes et les membres du jury Omar Sy et Lily Gladstone posent sur le tapis rouge lors des arrivées pour la cérémonie d’ouverture et la projection du film « Le deuxième acte » Hors compétition au 77e Festival de Cannes, Cannes, France, le 14 mai 2024. REUTERS/Yara Nardi

(sur celle-ci, la brunette qui porte un nœud papillon n’entre pas dans la légende) (les légendes cependant rallongent le propos – mais n’apportent guère plus qu’une information tiède – placements de produits : lesquels ici sont des productions, des réalisations à plusieurs dizaines de millions de dollars – ou d’euros) – un critique a vu une cinquantaine de films sur les quelque cent dix proposés (compète palme d’or: 22) – la vie est difficile – en une dizaine de jours, fréquence de 5/jour – mais je ne retiens que peu de chose cependant : quelques images (six en tout – on pourrait dire : ce n’est que du cinéma)

d’abord :

suivie de

La réalisatrice indienne Payal Kapadia (R) célèbre sur scène avec son casting après avoir reçu le Grand Prix pour le film « All We Imagine as Light » lors de la cérémonie de clôture de la 77e édition du Festival de Cannes, dans le sud de la France, le 25 mai 2024. (Photo de Christophe SIMON / AFP)

non, mais rien n’est joué – ce n’est pas seulement du cinéma, c’est aussi de la joie – pure et dure certes – mais de la joie et puis c’était ma favorite – j’exècre  ceux qui, depuis dix ans gouvernent ce pays, l’Inde – et puis cet homme-là qui s’échappe

Cannes, Festival International du Film, portrait du réalisateur iranien en exil Mohammad Rasoulov. Il présente « Les Graines du Figuier Sauvage », en compétition pour la Palme d’Or

on a entendu dire qu’il y avait là quelque chose comme de l’opportunisme du cinéma – de tout le cinéma – mais ce prix lui sauve sans doute la vie – le cinéma, oui – non, mais c’est vrai j’aime beaucoup – le faste, le luxe, l’hypocrisie moins mais enfin, il ne semble pas qu’il  puisse, cet art qu’il est aussi dit-on, s’exprimer autrement – une immense publicité, une injonction à aller voir ces films-là et pas d’autres… cette image aussi, pourtant 

tirée du film donc, Les graines du figuier sauvage – que fais-je donc d’autre ? ici encore un autre film qui aura ma préférence (Grand tour  réalisé par Miguel Gomes)

et pour finir une image du « Tout ce que nous imaginons être de la lumière »

on verra
on ira voir

en ouverture de billet, une image de ce grand tour, probablement l’héroïne principale – non mais quelle beauté… – Crista Alfaiate, qui jouait déjà dans le Mille et une nuit du même réalisateur

 

 

déserter

 

 

il n’y a pas de raison que ça s’arrête – jusqu’au dernier souffle peut-être – être empêché, le corps qui ne suit plus, l’esprit qui divague, l’âme qui s’envole – j’ai regardé et je me suis souvenu de cette salle – le Brady –
(image taxée, crois-je, au compte de François Morice ex-libraire de la rue Jacques-Cœur)

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il s’agit juste d’une histoire, l’histoire d’un jeune type – un jour et une nuit –

(dix-huit ou vingt ans)

qui ne veut pas faire la guerre –

et lui il court –

on n’y voit guère de palestinien, sinon quelques enfants qui courent, effrayés

et deux cadavres dans les ruines – sinon, tout le monde est juif dans le film : Tel-Aviv sous les missiles parfois – une espèce de routine – et ce type (Shlomi – interprété par un Ido Tako survolté – magnifiquement)

qui ne cesse pas de courir pour échapper à son destin – probablement
Il va voir sa grand-mère parce que, chez lui, dans sa maison, chez ses parents il n’y a personne – il court. Sa grand-mère perd la tête : mais qu’est-ce que ça change ?

Ils dansent ensemble – il va dormir –

puis se réveille : elle lui dit de revenir (elle mettra pour lui l’eau chaude pour une douche) . Oui, mais quoi faire alors ? Il court en vélo va voir son amoureuse

-il veut s’échapper – il ne veut pas qu’elle parte (au Canada, elle devra suivre ses parents)

– il court encore – elle, elle bosse dans un restaurant – il va se baigner

(car Tel-Aviv est au bord de la mer – la guerre n’est jamais loin…) vole des fringues, s’enfuit encore à nouveau

mais c’est un film tourné avant le 7 octobre 2023…
On le cherche, on le croit enlevé

– mais non –
Shlomi court, court encore (cours, Shlomi, cours…!)  retrouve à l’hôpital sa mère et son père lequel a fait une crise cardiaque – ça ne va pas l’empêcher de fumer – devant sa mère, seul avec elle, Shlomi avoue : il est déserteur

– il s’est enfuit – une espèce de lâcheté
– « comment ? dit-elle – mais non ! »
– elle le convainc de retourner se battre, une sorte d’honneur, il acquiesce – il tente de revenir, il court encore – c’est la nuit – et puis


et puis…

Haletant.
Mais à présent, comment dire, à présent comment faire pour y échapper ? Je ne sais pas. La mort est partout.

 

Le déserteur un film (israélien) de Dani Rosenberg