Seulement pour ça

 

 

Il y a des jours où les choses ne vont pas comme elles devraient : si j’avais dans l’idée de trouver quelque chose (une chose pour la poser quelque part) dans le film « Quai des Orfèvres » (Henry-Georges Clouzot, 1947) c’était à cause Louis Jouvet (c’est un type que j’aime beaucoup) (et que le film est vraiment bien aussi, évidemment) mais je n’y ai pas réussi. C’est un film policier, et force y reste à la loi. Comme il se doit ? Probablement. A la fin, l’inspecteur chef-adjoint dit (ou pense) « on croit qu’on va être dans une grande affaire de passion et tout se termine dans une misérable petite affaire... » : c’est sans doute toute la vie de flic qui est mise en mots.

Mais cependant, les scènes de cabaret magnifiques

cabaret

Suzy Delair (Jenny Lamour alias Marguerite Chauffournier) chante « Avec son tralala » dont on se souvient la trivialité, oui, Bernard Blier, qui joue son mari, le Maurice Martineau qui a composé cette chanson (on entend Lino Ventura, dans le « Garde à vue » de Claude Miller (1981)), c’est tout dire, ici en homme si timide (à ses heures…) et si dominé, et Simone Renant magique (Dora Monnier, photographe aux moeurs diverses et cette réplique que lui lance Jouvet/Antoine : « dans le fond, vous êtes un type dans mon genre, avec les femmes vous n’aurez jamais de chance… »)

simone renant et bernard blier

la cruauté des sentiments tranchants, et la foule des seconds rôles  : par exemple le magnifique Pierre Larquey le chauffeur de taxi qui dit

larquet

« je SUIS un bon citoyen, la preuve c’est que moins  je vois les flics et mieux je m’porte…« , Charles Dullin ou Jeanne Fusier-Gir, des merveilles, une distribution de dingue, tout est vrai comme disait Louis Jouvet (alias Lambertin, légion d’honneur respectée par les imbéciles

entrée des artistes

dans « Entrée des artistes » (Marc Allégret, 1938)-d’une autre facture d’un autre âge – et Jouvet dans la dernière scène : « la vie est une farce, c’est vrai, mais il faut y croire… Vous ne croyez pas à la sincérité de Rodrigue ni à l’amour que Mélisande porte à Pélléas mais il faut y croire… Rien n’est faux, il suffit d’avoir un peu la foi et tout devient réel… Mais ne l’oubliez pas, c’est lorsque le rideau se lève que votre vie commence, il ne tient qu’à vous qu’elle continue le rideau une fois baissé... » (la farce advint ensuite, ont-ils eu à y croire…) et donc, le métier de comédien, oui, certes, celui de chanteuse

avec suzy delaire

tout cela a quelque chose à voir avec cette maison(s)témoin de cinéma, oui, mais surtout, lorsque ce commissaire (Louis Jouvet, inspecteur chef-adjoint Antoine dont on connaît encore le théâtre aujourd’hui) qui dit ici à Suzy Delair « oh vous, je vous connais, vous êtes une petite arriviste » et plus tard, dans son bureau « moi aussi, on m’attend« , lorsque ces mots avancent et qu’en effet, pour un soir de Noël, on l’attend, c’est parce que seulement il se penche sur le lit de son fils, et uniquement pour ça sans doute

qui dort

qu’on aime tant le cinéma.

 

3 réflexions au sujet de « Seulement pour ça »

  1. Comment peut-on encore aimer des films si dépassés, même JOUVET date avec son jeu compassé, son ton déclamatoire trop travaillé…
    Et pourtant je n’aime que les vieux films en N. et B. et ne vais jamais au ciné. J’ai 72 ans.

  2. Larquey à Renan,
    – je suis bien désolé, madame, mais que voulez vous nous ne sommes pas les plus forts !
    Jouvet à Larquey
    mais il est dépassé ton permis…
    Jouvet à son gosse
    allez viens, tu vas l’avoir ton sandwich !

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