dispersion #23

 

 

 

il y a toujours ce sentiment qui s’impose, celui de ne rien faire de tenu – celui de toujours aller ailleurs, ne pas s’attacher à élaborer un VRAI travail d’écriture – et la multiplication des livres (à quoi bon en ajouter un autre) – (et la pourriture des produits dérivés (comme cette chemise odieuse où on a fait broder une citation, reprise dans le cahier par un écrivain, obscène, décomplexé, indigne) la rue où siège cette entreprise (corporate) intitulée du patronyme de la famille : c’est pire encore que le reste, cette connivence institutionnelle) – à quoi bon des images encore ? Je voulais dans cette maison poser une image  de Michel Ciment qui vient de disparaître

qui parlait, parlait – drôle de mec – j’étais hier dans une librairie de cinéma, du côté du Panthéon, cherchant son livre (il n’y était pas – autobio plus ou moins –  la libraire avait autre chose à faire – j’ai bien demandé mais non, ça ne répondait pas : ça m’a fait penser à ces affaires cahiers/positif je n’ai pas insisté) – je m’en suis (un peu) amusé

parce qu’il faut les associer – lui et Stanley – parler, lire, voir, écrire – je me suis souvenu de cette fois, il n’y a pas si longtemps, où il descendait de l’ascenseur de la tour Montparnasse, j’y entrai, je l’ai croisé, tendu la main « bonjour monsieur Ciment » m’a regardé sans me connaître, l’a prise « bonjour »  le regard questionnant, « j’étais un de vos élèves en anglais en fac… » « ah bon ? comment allez-vous ? » oui, je suis monté, j’allai rejoindre mon amie qui décernait un prix – il venait d’aller la voir – cette image de lui – le cinéma, oui 

alors cette merveille (Martine Carol, dans Lola Montès – magique merveille) ou encore

Meryl Streep telle qu’en elle-même – merveille magique – des gens, des acteurs

(Gene Wilder dans le Frankenstein Junior mis en scène par Mel Brooks) le rire aussi – celui un peu plus discret (et peut-être plus amer, aussi) de Billy Wilder

(j’aime bien le chapeau, comme le suivant)

Gary Cooper (je crois dans L’extravagant Mister Deeds (Frank Capra, 1936)) tellement drôle aussi, charmant, dupé trahi mais s’en sortant par sa morale et son éthique – le cinéma, mais aussi la musique

oh Tina (Turner)… et Glenn (Gould) aussi (avec le réalisateur Bruno Monsaingeon, qui a été aussi le traducteur des écrits du pianiste)

et Jean-Louis (Murat)

ah oui, l’écriture… Ici Deborah (Levy) – est-ce qu’on perçoit comme elle aime rire ?

et pour finir, celui-là, seul au désert (enfin presque seul – il faut bien que l’image soit prise…) Théodore (Monod) on le dirait en train d’écrire sur son nino – mais non. Non. (on ne peut pas mieux finir)

 

dispersion, un feuilleton dans la maison[s]

 

Fondamental

 

 

 

On peut sans trop se tromper (et bien que ce type d’échelle de valeurs ait quelque chose d’obscène) dire de ce film qu’il s’agit d’un des et même du meilleur dans son genre et de tous les temps – c’est excessif : comme de genre il s’agit de la science-fiction, on peut aller jusqu’à tout l’univers. Les avis peuvent varier mais on s’en fout : passons sur cet aspect si vous voulez bien. Le mieux pour l’appréhender s’il se peut (oui, c’est quand même possible) est d’en donner la structure : procédons par ordre (qu’est-ce que l’ordre ? « le désordre, c’est l’ordre moins le pouvoir » disait Léo tu te souviens ?). Ce qui constitue ce film (durée : deux heures et demie), ce sont quatre parties et un entr’acte. Durant chacune de ces parties sont exposées diverses facettes de l’histoire de l’humanité (rien que ça, mais ça quand même) mais jamais notre contemporain (on respire). Dans ces quatre parties, on trouvera l’émergence d’un objet, une entité (on en a glosé : le film sort en avril 68, il y a cinq ans, on a fait tout un pataquès médiatique de cet anniversaire 50 ans… (on a changé l’affiche, on a remasterisé l’affaire, on l’a représentée  – les auteurs sont morts, mais le marché s’en fout – on peut aussi regarder que la maison de production (la Metro Goldwyn Mayer) (Sam et Louis sont eux aussi morts depuis bien longtemps – Autant en emporte le vent et Ben Hur entre autres) (le lion ne rugit plus et l’art ne remercie plus les artistes) n’existe plus (faillite, rachat du catalogue, la loi du marché) – quelque chose (un fait social total dirait Mauss) : dieu peut-être…? en tout cas il s’appelle monolithe et il est noir – il apparaît vers la fin des parties, c’est une espèce d’énigme bienveillante (la bienveillance a quelque chose de pourri, comme on sait) – c’est ambiguë et on ne comprend pas bien. Alors voyons, tout en sachant que le film (budget estimation avant tournage : 6 millions de dollars, coût total après post-production : dix millions et demi – pour une idée de ce coût aujourd’hui, on multiplie communément par 9) a rapporté six fois ce qu’il a coûté (un peu moins de 4 millions d’entrées) à titre de comparaison, un film comme Avatar disposait d’un budget de 365 millions de dollars (en 2009) et en a rapporté (15 millions d’entrées) 3 milliards…) (pourtant,combien de fois plus merdique, vazy…).

Je ne voudrais rien expliquer, juste montrer : je crois bien qu’il s’agissait de mon douzième lustre et on (encore merci, mille fois)  m’offrit l’intégralité de la filmographie de Stanley Kubrick – un coffret, édité chez Taschen – treize longs métrages – treize disques laser dvd – plus un gros livre d’images et tout un appareil critique, dont l’entretien fleuve que Stanley Kubrick donnait au magazine Playboy d’octobre 1968 – j’en ai sélectionné quelques unes – je les pose en allant dans la chronologie du film – elles m’ont inspiré – peut-être dois-je dire aussi que, de ce film, les étudiant.es de maîtrise de cinéma et moi d’alors (1980 je crois bien) avons été invité.es par le prof (s’appelait Goimard, Jacques de son prénom, portait des costumes et des cravates de couleurs vives – les cravates, pas les costumes) à nous emparer toute une année durant – j’avais en charge de m’occuper des moyens de transports; pour d’autres, ce furent la religion, les repas, les moyens de communications, et les rôles, les effets spéciaux, le scénario, la musique, les dialogues, etc etc on en passe (ce qui inférait de voir le film un certain nombre de fois – mais j’ai arrêté de compter après dix) – je l’ai revu il y a quelques mois, avec le dvd sur un petit moniteur : ça ne vaut pas…

 

la première partie sera sans dialogue (comme les dernières) – avant notre ère – nous ne sommes pas encore redressés, l’un d’entre eux (ou elles, à ce point, pas encore d’études de genre) découvre l’arme, s’en sert et domine (ça veut dire qu’il tue) – dans sa joie de vainqueur il lance son arme au ciel comme s’il voulait le défier –

l’image passe de l’os (l’arme…) à la navette spatiale (Orion III) – qui va s’accorder (au son de la valse de Strauss – un si beau Danube bleu et un regard (pour moi) vers Claudio Magris) s’accorder disais-je à la station orbitale – c’était l’affiche première du film – on suivra un type quelconque qui souhaitera bon anniversaire à sa fille (interprétée par la fille du réalisateur) : l’intérieur de la station orbitale

ce n’est qu’une étape avant d’aller sur la Lune (les premiers pas de l’homme sur la Lune datent du 20 juillet 1969…) : un signal y a été détecté, l’homme est enquêteur (j’aime à le croire) – on a creusé pour chercher d’où vient ce signal, ici en bas, le creusement, la fosse, la mine

la découverte du (ou d’un ?) monolithe – image du haut : on (l’humanité) touche le monolithe

image du bas, le son explose, assourdit – cut – un an et demi plus tard

à bord du vaisseau Discovery – avec l’ordinateur (super-ordinateur -méga-ordinateur, tout ce que tu veux) HAL l’oeil rouge…

lui gouverne, les hommes suivent – mais il dévie (HAL tel est son petit nom), il se trompe – il débranche les cryogénéisés, (et les tue…) par mégarde peut-être (probablement pas : il veut prendre le pouvoir) – restent les humains : que se passe-t-il ? ils s’isolent dans une capsule de survie (ils ne veulent pas que HAL les entendent – on le croyait infaillible –

ils parlent HAL ne les entend pas mais les voit et lit sur leurs lèvres – on lui en veut

ENTRACTE

HAL profitant d’une sortie qu’il ordonne

tuera l’un des astronautes (ou cosmonautes – un humain en tout cas) – il en reste un cependant (Bowman se nomme-t-il) qui parvient à rentrer à nouveau dans le vaisseau

ce sera donc lui ou HAL – c’en est fini – magnifiquement rouge…

HAL chantera une comptine puis périra – carton

ici prend place une séquence, toute de couleurs de vitesses de cris de bruits de musique, psychédélique en diable – un parcours – sans dialogue – un chemin vers l’infini sans doute – mais où est-ce ? – loin – à travers les galaxies – loin de tout –  jusqu’à cette chambre – on retrouve Bowman – seul – brise un verre – seul : il regarde (image du haut)

dans le lit, c’est lui – en amorce droite cadre c’est lui – il se voit – il va mourir – il se voit  (et se voit voir) : le (ou un?) monolithe, là devant lui allongé, mourant – cette lumière

puis le foetus astral dans la* placenta qui regarde la Terre bleue, toute la vie, oh Suzy…

je le remets : ici tel est sa place

juste une merveille –

 

je me souviens de la première fois que je le vis, au cinéma Contrescarpe (ça n’existe plus) l’écran n’était pas grand, la salle comble et les gâteaux que nous avions mangé étaient à l’huile afghane – je me souviens, une merveille… (il y a cinquante ans d’ici)

 

Ce billet en spéciale-dédicace à l’hôte de cette maison (Kiki de Bayeuze) pour ses douze lustres – le féminin* de la placenta, pour Catherine Serre et sa Maison des Mues

Carte postale d’ici

 

 

 

pratiquement quarante huit billets pour l’année – je vais arrêter je crois pour celle-ci – sauf contre-ordre – pas mal de cinéma pas mal de dispersion, c’est l’heure des comptes ou quoi ? – n’importe (on ne va pas regarder en arrière – on ne va pas oublier non plus)

cette image du relieur de la place Dauphine, jouxtant presque le café où on joue à la belote (en face de la « roulotte » du couple) (je suis fatigué tu sais – de temps à autre, oui)

ici l’ouvreuse d’Edward Hopper – au cinéma, ces jours-ci, la maladie le pax – des images simplement pour se souvenir (là les deux mêmes plus ou moins)

l’ouzo sur le port, c’est en août probablement -j’ai oublié, je ne me souviens plus des olives et des chèvres qui passent – le vendeur de chaises en plastique qui passe lui aussi le matin vers onze –

il y avait cette chanson que je n’aime pas vraiment Marcel Mouloudji, « Faut vivre » mais qui dit (en creux, négativement peut-être)  ce qu’on a à faire (il était de 22) – le col de la chemise des années soixante-dix – paroles du chanteur – faut continuer tsais – ici le Bosphore ((c)MCH)

 

on y retournera – rien ne dit que l’autocrate restera sur son pouvoir abusif –  ces oiseaux-là planent sur les eaux du Bosphore

ce sont les voyages qui manquent – moins souvent, moins loin, moins longtemps, c’était le verdict au tournant du siècle, et vingt ans plus tard, des tornades, des îles sous le vent et l’eau – Catane et son parcours autour du Vésuve en train – et les trombes d’eau,  inondations… – un laurier pour la routeon n’est jamais trop loin de l’enfance quand même – le sentiment que la décade qui s’annonce sera difficile – mais peut-être voit-on mieux l’avenir lorsque le passé est profus – ici les prix Nobel de la paix de cette année (ce sont deux journalistes)

et plus proche, elle qui me fait souvenir de cet article-là (voilà un peu plus d’un an de ça)

non, mais le cinéma, par exemple : c’est la dispersion qui m’anime même ici, le cinéma cet univers perverti (regarde Sunset Boulevard si tu veux (Billy Wilder, 1950)) : cet art avait un demi siècle – était-ce un art ? en est-ce un ? OSEF, probable – tout ce travail et rien pour s’amuser, ça rend Jack un peu mauvais tsais

tu le vois, là, il contemple le lieu de sa mort prochaine – par gel; de froid; à la poursuite de son fils, afin de le tuer – il ne rigole pas vraiment, Jack –  il est pris par ses fantômes – sans doute l’écriture a-t-elle cette qualité de faire revivre les fantômes – on aime à le croire ? pfff…  Bientôt Noël, alors ? Cette image-là, c’est moi (des jours entiers à fuir…)

(c’est de l’incrustation) (laisse va) (j’adore)

Bonnes fêtes (wtf ?)

 

 

 

quinze (dans les rouges)

 

 

je déplie – j’ai formé l’index, on verra, tout ça est assez dispersé – je crois que c’est le dernier (j’ai des trucs à faire ici qui attendent depuis un moment)

ici Mona Chokri dans le premier rôle de « La femme de mon frère » (2019) qu’elle réalise elle-même – me fait penser à ce film d’Ewan McGregor (American pastoral (2016) pas si mal) (non mais pour un film d’acteur… )  – ça n’a rien à voir, un acteur qui prend la place du réalisateur et se retrouve devant et derrière la caméra, sinon une structure particulière – le film est impliqué dans un des poèmes express (#877), chez Lucien Suel par ailleurs c’est pour ça aussi) un autre si tu veux

Charles Laughton acteur formidable, passé derrière la caméra pour produire et réaliser

cette splendeur de (c’est vrai qu’il n’y joue pas mais et alors ?) Nuit du Chasseur (1955) (j’avais deux ans) – sans compter Shelley Winters (dont on se souvient aussi du rôle de la mère dans Lolita (1962, oh Stanley…)

avoue quand même… c’est du cinéma – j’adore même si les décors sont un peu trop carton (un peu comme dans « To kill a Mockingbird » (du silence et des ombres, Robert Mulligan, 1962) le Gregory Peck de mon enfance (surtout,plus évidemment, Achab à la recherche de sa baleine blanche – jambe de bois etc…) (John Huston, 1955) enfin toute une histoire du cinéma qui défile (hollywoodien plutôt disons) et lui

en empereur de la dérision (Lost in translation, Sofia Coppola 2003) Bill Murray – non, mais c’est assez tenu comme générique (le lien du générique à la famille et à l’expression d’une certaine parentalité, quelque chose de l’engendrement – le cinéma, mon frère et mes/ses amis, ma mère), je tiens aussi celui-ci, drôle et sérieux terrible

James Baldwin formidable écrivain et acteur de la vraie vie – j’aime savoir qu’il était ami d’Yves Montand, de Marguerite Yourcenar autant (tout autant que j’aime savoir que ma mère et mon père pensaient trouver quelque habitation à Saint-Paul-de-Vence ou à Vence – ces souvenirs tu sais… cette période des débuts soixante)

et puis les voilà tous les deux – tu sais quelque chose avec Julos Beaucarne (il est de 36) – elle, elle est de 33; lui était de 40) – un type passe, et tue – quelque chose  de l’absurde, de l’idiot, de l’insensé et du fou – qu’est-ce que c’est, la folie ? je me souviens aussi du héros de la classe prolétaire; j’imagine; hier aujourd’hui demain – laisse va

un voisin – un dimanche midi, avec sa fille qui n’avait pas six ans au sortir de l’expo – ça devait être en 95 ou 96 – je chantais à ma fille pour l’endormir cette balade – non loin

le piano, et sa mère – sans doute non loin –

 

 

dispersion une série pour décorer les murs de la maison[s]témoin

 

(parfaitement en phase avec le raku qui suit des lignes comme un cartomancien, ces images, notamment Yoko Ono & les 3 du film de Laughton : il y a des hasards qui n’ont pas besoin d’explication) (mais j’en suis content – spéciale dédicace à C. Jeanney donc) (il n’y manque que la Lotus seven…)

 

 

 

Une phrase, une chanson (résister #5)

 

 

 

 

il arrive que je tombe sur une phrase, ou quelque chose, qui m’entraîne ailleurs et encore ailleurs – je laisse suivre le chemin parfois, je me lève et je vais dans le jardin, sur le balcon, ou derrière la fenêtre seulement, ou encore dans le garage, je range un peu (des vieilles cassettes vidéo inutiles – il n’y a que les jaquettes – d’autres choses incongrues laissées là par les ouvriers – une bouteille d’eau en plastique, des chiffons, un carton) – la maison est inhabitée (je me souviens de madame Muir)

(elle était veuve et voulait écrire) – il y a quelque part, sans doute dans un placard, une affiche apportée là par je ne sais qui – je ne suis pas ici, je suis ailleurs – une phrase disais-je, elle est d’Antonio Gramsci (1) un type qui a passé la fin de sa vie en prison parce qu’il avait des idées qui allaient à l’encontre de celles du pouvoir (sous l’ordure mussolini (2) – il était communiste emprisonné dès 1926 jusqu’à sa mort le 27 avril 37, à Rome, des suites de sa maladie) – je dispose ici d’une espèce de bible, un petit dictionnaire Larousse de 1961, mais il n’y figure pas – dommage (j’ai pris une photo d’un dessin de Laennec (3) tout à l’heure, mais de Gramsci, nenni) – j’ai pêché dans le wiki – la phrase donc « il n’y a pas d’illusion à se faire quant à une possibilité de conquérir par petites étapes la justice et la liberté » fait froid aux os mais enfin elle ne m’apparaît pas sans fondement – hier dans le journal on nous indiquait que le « nouveau » wtf cnpf faisait agir ses groupes de pression (on sait que ce gouvernement n’est que la chambre d’écho législatif de ce centre du patronat, serait-il français et national qui plus est) afin que l’Europe et la France (en particulier) adoptassent (eh oui) des réglementations plus souples en ce qui concerne les émissions de CO2 (lesquelles pourtant assez souples, sinon lâches, nous conduisent directement à cette maladie qui nous prive de nos libertés les plus fondamentales) – ces trois personnages : des emblèmes de ce que nous vivons ? – ici, dans cette maison toujours à louer – ce que je fais encore ce mercredi – il n’y a pas de visite, il n’y a pas d’acheteur – j’ai posé sur un mur, sur le côté de la fenêtre, une reproduction « impression soleil couchant » je crois que ça s’intitule

– et puis une autre des danseuses de Degas il me semble bien

– il y avait avant qu’on ne puisse plus sortir de chez soi des endroits (il faut le souligner pour les nouveaux-venus) spécialement réservés aux expositions de tableaux, ça se nommait des musées parce que les peintres (et peintresses, mais essentiellement des peintres) étaient pour la plupart d’entre eux (et elles, mais passons) inspirés (é e s ) par des muses (lesquelles ne sont que féminines) – sinon ça allait bien ce monde-là – on y découvrait tardivement les notions de genres et de « race » (laquelle comme on savait déjà n’avait aucune existence dans l’espèce humaine) (sauf évidemment celle que mettaient en scène les mussolini et autres fumiers – essentiellement des hommes, tu me diras – le monde en regorge encore – passons) – (ceci n’est pas un billet politique, je fais mon travail, je n’ai pas à parler politique – le travail n’est pas politique, il est subordonné : tu fais ce qu’on te dit, point barre – et tu nous épargnes tes états d’âme – si on est poli, on fait suivre la dernière phrase d’un « sil te plaît » à la limite de l’hystérie) (un peu comme à l’armée si tu préfères) ici je remets cette image déjà déposée de ce colonel Dax (je connaissais Micheline) sous les traits de Kirki

– il est donc préférable de travailler seul – et donc de disposer, comme disait notre amie Virginia d’une chambre à soi – justement ici, on en compte quatre, dont une sous la forme d’un bureau – huit mètres carrés, une fenêtre, une porte : c’est suffisant – au rez-de-chaussée, oui – les trois autres à l’étage, avec la salle de bains, un autre cabinet de toilettes, enfin tout le confort moderne – les arbres du jardin des voisins sont fleuris, les oiseaux y chantent un peu et le ciel s’est dégagé, on ne ressent plus les miasmes du trafic aérien (déjà, un peu avant, il y avait eu cette affaire d’un constructeur d’avions qui pour des raisons de rentabilité avait précipité la réalisation d’une de ses œuvres, et aussi (zeugme) la mort de près de quatre cents personnes – le constructeur avait fini par arrêter cette production – c’était avant) (une allégorie) – aujourd’hui, certains s’en remettent à la prière, d’autres pensent que la santé passe après le travail et l’économie du pays – c’est un printemps assez chaud, voilà une dizaine de mois (ai-je lu dans une gazette) que les températures sont plus élevées que la moyenne dans notre pays – est-ce que ça a une quelconque pertinence que de parler du pays quand on parle des températures ? Fait-il moins chaud ici (ou à Kiev, par exemple) que là (à Oslo, Malmö ou Stockholm) ? En tous les cas, j’attends mais je n’ai pas rendez-vous – cette chanson, tu sais, cette si jolie chanson qui faisait à un couplet « Monseigneur l’astre solaire, comme je n’l’admire pas beaucoup/ m’enlève son feu, or de son feu moi jm’en fous, j’ai rendez-vous avec vous/la lumière que je préfère c’est celle de vos yeux jaloux » tu te rappelles ? oui, je l’entends, je l’écoute, je la chante – non, mais l’amour, ils ne nous l’enlèveront jamais

Rien n’a changé (#3 Résister)

 

 

 

Il faudrait savoir où on écrit (avant de savoir quoi) – faire les choses à bas bruit surtout – écouter « des roses et des orties » avec les « o » ouverts pour les fleurs plus – « on est lourds, tremblant comme des flammes de bougies »  – le mercredi ce sera maison[s]témoin aussi – on ne se savait pas atteint, on était indemne remarque bien aussi, on ne savait rien, on errait comme des mauvais diables – les gens étaient dehors, chez eux, entre eux – deux trois ou quatre tout dépendait d’eux ; le truc s’en allait, frappait ici, en trois jours c’en était fini, terminé – les vieilles gens surtout – c’était adorable surtout dans ces temps où on se battait pour que la retraite soit un droit acquis de haute lutte, chaque mois une retenue sur le salaire, chaque mois l’employeur mettait au pot – mais non, terminé, gilets jaunes ou pas, retraites ou non : terminé –

 

 

personne ici : seul au monde, le garage vide, la vue d’une plage sur le mur du salon – les palmiers, la mer bleue, toute la vie – la maison n’était plus que peu fréquentée, déjà, avant les événements (certains les regroupaient sous le nom de pacification) : à présent, encore moins de visite – elle reste telle qu’en elle-même ce n’est pas qu’elle pourrisse sur ses fondations (d’ailleurs fort peu profondes : elle n’est que vaguement posée là, une centaine de mètres carrés quand même tu me diras – à l’étage un peu moins, sous-penté – non mais c’est un lot intéressant, qui dispose d’un certain potentiel, l’agent vous le dirait s’il n’était obligé de rester chez lui par civisme et aussi par flemme – ça peut arriver aux meilleurs, et d’ailleurs, à l’agence on ne le lui envoie pas dire – si vous y tenez absolument, il peut venir vous faire visiter, c’est quand même et après tout son travail : assume-t-il (comme on dit aujourd’hui) ou n’est-ce pas essentiel ?) mais ici ou là, on peut percevoir l’usage du temps – les saisons qui passent, à la radio on donnait la deuxième rhapsodie hongroise de Frantz Liszt, jouée par Georges Cziffra, en avril 56 en Hongrie – deux mois avant l’insurrection – il faut du temps pour s’habituer à cet état de choses, dieu merci on avait la musique – sur les étagères du salon on avait disposé de fausses jaquettes de disques vidéo (les Fantômes de Madame Muir; Guêpier pour trois abeilles (Honey pot) ; Sleuth (Le Limier) ; My fair Lady ; À bout de souffle (mais qu’est-ce que c’est dégueulasse ?)

d’autres encore; dans les souvenirs, on avait à propos de ce dernier (le cinéma), les explications de Romain Gary qui envoyait deux jours avant de se donner la mort – une balle de revolver dans la bouche, je me demande si ça se déroulait rue du Bac – un mot à François Pillu (dit Périer) – ou alors j’ai rêvé : j’ai recherché, rien trouvé – n’importe peut-être (*) – l’entière filmographie de Stanley K. (Kubrick, mais Stanley K. lui va assez bien) – les quatre parties de 2001, l’opus 100 de Schubert pour Barry Lyndon ; et dire que Kirky s’en est allé… Cent deux au compteur comme on dit élégamment quand même (Spartacus, ou le colonel Dax ?

comme on aime). Il y avait aussi de nombreux livres – le décorateur de la boite faisait appel à un grossiste, il y en avait de toutes sortes, surtout de belles couleurs, des choses qu’on ne verrait pas ailleurs, une bibliothèque multicolore dans le salon, dans l’entrée ? quelque part en tout cas, ça a quelque chose de nécessaire, ce genre de meuble – et puis ça habille. Les gens aiment voir des livres posés les uns à côté des autres, égayés de ces jolis tons, ça donne à l’intérieur quelque chose, une espèce d’image de la tradition, de l’intellect et de l’intelligence quand même aussi, parfois, il faut bien l’avouer : les livres ont cette espèce d’image pas vraiment surfaite, non, mais si on ne sait pas ce qu’il y a dedans, il faut bien avouer que l’objet, en lui-même, quand même ses commerçants l’affublerait de l’adjectif « parfait », l’objet n’a rien de très original, il faudrait sans doute le reconnaître. On a, de même, mis des casseroles dans la cuisine – un peu exposées sur le mur, à côté de la hotte – tout le confort moderne (sur option). Enfin toutes sortes de choses et d’objets indispensables à la bonne image de cette maison, essentiels à la bonne mémorisation du lieu, représentation retenue par les visiteurs, tentés et par là, envieux : il faudra signer à nouveau des contrats, choisir ses couleurs (taupe, pour les murs, c’est magique – mauve, pour l’entrée, c’est d’un chic) – établir le montant du premier chèque (si ça se fait encore) – et bientôt, emménager. Bienvenu chez vous (comme aime à le dévoiler en une la démagogie mercantile et odieuse – soyeuse ? sucrée ? apaisante ? – du dépliant, sur la table transparente du salon)

 

(*) erreur de casting : il s’agit d’une carte qu’envoyait Romain Gary le 29 novembre 1980 à Ray Aron pour le remercier d’une lettre datant de 1945 que ledit Romain avait envoyé à Ray à l’époque et que celui-ci donc, lui refaisait parvenir (cité dans « Mémoires, 50 ans de réflexion politique », Ray Aron, Julliard p. 716)

 

Dans trois mille ans

 

(publicité, propagande, j’ai beau faire attention à ce genre d’injonctions – si j’en vois une, je ferme… – comme j’aime le cinéma (même celui de chez l’oncle sam) j’en parle un peu avec des scrupules) (ce type d’italiques, en début de billet, ça permet de lancer la machine, mais c’est aussi, j’espère, dissuasif : sans un tout petit peu de sympathie pour Hollywood – une once, presque rien- on peut passer son chemin. Ici, dans la maison(s)témoin, on accueille toutes les sortes de fantômes goules et autres bizarreries, et c’est à peu près normal aussi qu’on y trouve des entités qu’on nomme « extra-terrestres » -bien qu’elles le soient, terrestres, évidemment, puisqu’elles ne sont que l’émanation d’esprits plus ou moins habités par ces histoires imaginaires – je les ai placées dans la chambre d’amis, parce qu’elles ne font que passer, et aussi dans la salle d’eau, parce que c’est sans doute grâce à l’eau qu’on parvient, ici, à les comprendre…).  

Ici, une jeune femme, linguiste (on l’appelle Louise – comme madame Brooks et ses araignées, au hasard – et Banks – comme je ne sais pas exactement quoi) (Amy Adams). Elle se trouve ici devant l’écran, une épaisse plaque de verre transparente sur laquelle, avec elle, correspondent les nouveaux venus (une douzaine de « coques », « vaisseaux » ou quoi que ce soit, habités par des genres de calamars à sept bras réparties sur toute la Terre (il ne s’en trouve point en France, désolé) – au fond de l’image, noire et grumeleuse : la paroi du « vaisseau »)

premier-contact-1

Elle a l’honneur, ou la chance, ou le culot, d’entrer en relation avec des êtres supérieurs (sans doute) qui lui disent venir en ami sur cette planète afin d’aider l’humanité à surmonter ses divisions (entre US et Chine, malgré les efforts de Nixon, ce n’est pas, comme on croit le savoir, l’entente cordiale) (on ne parle pas – trop – de la Russie : la géopolitique du monde est changée depuis que l’union soviétique -ça fait bizarre de parler de ça, pas vrai ? – n’est plus). Plus loin, ces entités (nommée « heptapodes » -z’ont sept « pieds » – discutent par flots d’encres interposés, sont tout puissants, s’en iront à la fin dissous comme nuage de lait dans thé anglais…) veulent nous aider car elles auront, dans trente siècles – une paille – besoin de nous (disent-elles) (car elles connaissent, tout comme Louise, l’avenir). En tous cas, douze trucs arrivent sur Terre : l’armée est sur le pont (ici, l’armée et son chef, incarné par Forest Whitaker – sont moins bornés qu’à l’accoutumée…) (colonel Weber) (on pense à Folamour, et Sterling Hayden (alias Colonel Jack. D. Ripper…) et à ce que cette venue aurait pu provoquer chez eux…)

premier-contact-2-forrest-whitaker

On cherche et on finit par trouver : grâce à la culture scientifique (très scientifique) de ce garçon-là (très très scientifique, physicien en diable) (Ian Donelly, incarné par Jérémy Renner) on parvient à comprendre le langage des extraterrestres, et surtout leur but ultime.

premier-contact-3

Même la CIA (dont on voit, dans l’image ci-dessus l’incarnation qui guette à la jumelle l’avenir) ne peut parvenir à mettre des bâtons dans les roues du (bientôt) couple. Et donc on discute le coup avec eux (les deux entités présentes aux US), et grâce à cette préscience dont est dotée cette mademoiselle Banks, on parvient à ne pas créer de dissension trop forte entre les divers Etats de cette planète afin de l’unir dans un but commun : continuer à vivre. Et à procréer (fatalement, pourrait-on suggérer) (on nous épargne la scène de lit, merci). Las, la progéniture est atteinte d’une maladie incurable… C’est donc en vain, en un sens, que tout ce qui a été entrepris se sera résolu. Mais enfin, nous verrons : dans trois mille ans puisque les fantômes s’en sont allés, et que la planète, elle, continue de tourner…

Le film (budget : 47 millions de dollars quand même) (en a rapporté, pour le moment, plus de trois fois plus…) (le cinéma est une (très) bonne affaire et aussi – bizarrement ? – le premier poste d’exportation du budget étazunnien, stuveux) est assez dramatique, le montage très alambiqué (on croit à des flash-backs, mais c’est l’inverse), l’image parfaite, les effets spéciaux réussis (on pensera à nouveau à Stanley Kubrick pour les changements de gravité entre l’intérieur du « vaisseau », et la Terre) : un beau film de science fiction au cinéma, ce n’est pas si courant…