Par la fenêtre

 

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J’en ai visité des maisons, témoins et sans témoins, avec ou sans les propriétaires, avec ou sans soleil, avec ou sans meubles, avec ou sans grenier, avec ou sans jardin. Je n’ai encore jamais réussi à trouver celle qu’il me fallait. Celle-ci est vraiment différente, on dirait que chaque pièce a été décorée par une personne différente. Même la cave est personnalisée…

Il faudra bien que je me décide à trouver un nouveau lieu de vie. Tout changer, c’est facile à dire, moins facile à réaliser.

Il faudrait déjà que je réalise ce qui m’est arrivé, que je l’admette. Toute une vie chamboulée en quelques secondes. Repartir à zéro, et ne regarder que devant soi.

Je n’ai pas tout perdu, il me reste le travail. C’est déjà très beau d’avoir du travail à notre époque, tant de gens n’en ont pas. Le travail, je n’existe que par lui, que pour lui. C’est pour cela qu’il faut que je retrouve une maison qui me convienne, un lieu qui serait mon prolongement où j’entasserais tout ce qui me ressemble. Un lieu où j’aurais envie de passer du temps, histoire de ne pas passer ma vie au travail !

Mais ce que je souhaite vraiment, ce n’est pas quatre murs pour y entasser ma vie. Si j’écoute mes désirs, ce que je préfère c’est avoir un jardin autour des quatre murs. Je pourrais passer ma vie dans ce jardin, et après être rentrée à l’intérieur, je pourrais passer des heures devant la fenêtre à regarder ce jardin. Il n’y a que là que je me sentirais enfin moi-même, couchée dans l’herbe la tête sous le tilleul et les pieds dans le plantain. J’aurais aimé être un campagnol ou une musaraigne pour passer ma vie à courir dans l’herbe, ou une chouette pour les voir courir d’en haut.

Ce qu’il me faut c’est un beau jardin et de jolies fenêtres pour voir le jardin.

Ici, les fenêtres sont belles ; ils les ont habillées de grilles en fer forgé. On a l’impression qu’elles dansent autour du temps. Devant la fenêtre un pic épeiche sautille sur le gazon. Il m’a vu et s’envole dans le hêtre pourpre. J’ouvre la fenêtre et l’évidence me saute au visage. C’est ce jardin qu’il me faut.

Une maison témoin, après tout, est faite pour donner envie aux gens de se projeter dans une nouvelle vie. Je n’ai jamais fait les choses comme tout le monde, moi je me projette dans le jardin. Je vais leur faire une proposition, ils accepteront peut-être que je m’installe dans le jardin ou à défaut que je reste assise devant cette fenêtre.

Si je promets de ne pas gêner les autres visiteurs…

Texte et Photo M. Christine Grimard

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