Marchand de bonheur

Je ne vais pas cracher dans la soupe : c’est toujours moins cher que l’hôtel et je n’y dors qu’une fois par trimestre quand ma tournée passe dans le coin. Jamais rentable d’ailleurs ma tournée dans leur cambrousse : ils ne se bousculent pas les commerçants qui les prennent mes catalogues « Points Bonheur ». Honnêtement je les comprends : après, les clients réclament leurs timbres à la caisse – des timbres mal prédécoupés et qui collent aux doigts – et une fois le carnet collecteur rempli les clients râlent encore parce que le cadeau les déçoit. Faut dire qu’il y a de quoi. Une belle camelote qui en jette sur le catalogue mais quand vous l’avez dans les mains le plateau faux bois marqueté Angélus, franchement vous regrettez de ne pas avoir choisi autre chose. Mais quoi ? Une pince à sucre, un ramasse miettes, une poubelle de table ? Que des trucs dont plus personne ne se sert. Des stocks à écouler. Il en faut du bagout pour placer les catalogues Points Bonheur, et si c’était pas les points retraite qui me manquent, je te les planterais là vite fait avec leurs pinces à sucre. En attendant, heureusement que je ne passe là que tous les trois mois parce que j’ai rarement vu une installation aussi mal fichue. Sûr que c’est pas un hôtel leur maison et qu’il font ça pour payer leurs traites – et entre nous, des amis prêts à venir jusque là, ils ne doivent pas en avoir beaucoup, toujours dispo leur chambre d’amis – mais ils pourraient quand même faire un effort. Un deuxième porte-manteau et un fer à repasser, tiens par exemple, ça les ruinerait un deuxième porte-manteau et un fer à repasser? Si je prenais pas mes précautions et mon fer de voyage, je sortirais de chez eux le matin en ayant l’air d’avoir dormi tout habillé.

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