Les loups

 

 

 

 

ça répond au mot de dégraissage (en anglais ça fait « lean »), il y a des officines sur les bords de la mer Noire je crois bien qui pour quelques centaines d’euros vous font profiter de leur savoir faire afin de vous ôter ces poignées d’amour ou plus qui affectent votre beauté supérieure – il y avait cette image magnifique d’un président svelte aux rames d’un canoë ou quelque chose, tu te souviens – et d’autres qui parviennent à truquer les photos évidemment, c’est plutôt une attitude qui veut tenir compte de l’apparence, comment est-on en photo?, c’est une question qui se pose ici, dans cette construction, cette maison, qui veut traiter des traces laissées dans l’imaginaire. Ce qui fait qu’on dit « lean management » c’est quand même plus agréable et plus clair. Il y a quelques semaines, avant Noël, un autre de cette classe avait fait parler de lui

il se trouve à droite sur cette image (les cours de bourse dégringolaient), une espèce d’enfant sage tandis que son collaborateur préféré fait le spectacle (on aime la pochette, la montre, les boutons de manchette, le noeud des cravates, l’air satisfait, à l’arrière plan, le cadreur télé). A cette occasion, j’avais pris quelques images sous prétexte de me souvenir de ce moment où celui-là fut foutu dehors

manque de cravate, je suppose, enfin remercié (on ne s’inquiète pas trop non plus pour lui), le sourire c’est quelque chose de magnifique et qui inspire la confiance, un peu comme le rire

la confiance et la joie – c’était le bon temps – ce sont les images qui circulent : ici on applaudit parce qu’on a foutu quelques centaines de paumés dehors, on dégraisse, on applique les recettes et les cours en bourse montent  –

ces gens-là savent s’amuser et sont particulièrement drôles, cet humour magnifique et un peu pince sans rire, tu comprends

oui, entre amis, les marques comme on les aime, l’avenir radieux, la hausse des cours en point de fuite… Et puis ce ne sont que des hommes, après tout (il y a peu de femmes, c’est vrai mais ça se trouve quand même) : un billet qui en traite, quelque chose de dégradant ou d’indigne. Lorsqu’il arrive  la tête de l’Etat, celui-là a aussi de grandes idées pour le patronat (son prédécesseur avait accompli ce merveilleux cadeau de 50 milliards d’euros à cette classe dirigeante dont on aperçoit ici deux des fleurons d’alors que le monde nous envie)

n’est-ce pas qu’on sent bien l’humour, la franche gaieté et la camaraderie sincère (et non pas la veulerie,  ni l’hypocrisie : l’accord dans le ton des tissus est à l’image de celui des idées), il y a ces ordonnances, cette loi travail ni loi ni travail, et on balance des hommes et des femmes dehors, on dégraisse, c’est ce qu’il faut faire. Arrivé en  2015 à la tête d’une enseigne dont le bénéfice bondit (ici à la présentation du bilan

– le type est content, ici en 2016, on le serait à moins : cinq cents personnes dégraissées), il aime foncer (on (enfin votre serviteur…) ne lui connait pas encore – comme certains s’en vantent – de jet privé (c’est certain) ou de yacht (c’est probable) amarré à Miami toute l’année pour quelques jours de balade en mer), et on entend ces cris de loups à présent. Voilà six mois (un peu comme un autre) qu’il a été nommé à la tête d’une enseigne plus importante (pensez, elle est cotée dans les quarante plus grosses), on apprend que ce seront deux mille quatre cents qui seront foutu dehors (non, pardon, remerciés, mis à la retraite anticipée, dans le cadre de départ volontaires, sans doute négociés, avec des conditions avantageuses et tout le barda qui va avec)

non, ça n’a rien à voir avec ces éclats de rire d’autres concurrents laissés en arrière (mais pourtant, quelle joie…!) restons calmes, pondérés et présentables

et heureux, en un mot entre amis…

Quel monde merveilleux…

3 réflexions au sujet de « Les loups »

  1. Ping : 24 janvier 696
  2. sont aisés, dans leur aspect, leurs attitudes, les loups, au prix d’un effort plus ou moins grand sur leurs souvenirs d’idéaux pour les meilleurs, mais faut ce qu’il faut, avec un naturel un rien vulgaire pour les autres (faut bien nous laisser de quoi les mépriser un peu un silence, c’est le prix de la paix)

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