épisode 21 – jardin

 

 

 

Il y avait un jardin attenant à la maison

il y a dans les projets l’un d’entre eux qui se nomme VIVRE sans majuscule qui est censé paraître (ou apparaître) le jour des quatorze lustres de l’auteur (quatorze lustres, c’est long – et ça passe comme un rêve) – ici il s’agit du jardin des lustres deux, trois et quatre – ça s’arrête à un moment – c’est autobiographique mais on s’en fout, il s’agit de la maison – contre le mur de briques qu’on verra sur la droite des images rebondissaient les balles jaunes ou blanches de tennis frappées pour l’exercice dit « du mur » – le tennis oblige à cette discipline – au fond de l’image, la maison des B. aux tuiles rouges, le père conduisait une merco 200 diesel voyageur représentant placier en quelque chose – je ne sais pas je n’ai jamais su – j’écris ce billet pour rapprocher le souvenir, je pose sur la platine Patti Smith et son « Horses » dont j’aimais tant l’écoute vers la fin des années 70 – si tu préfères

c’est une affaire entendue, classée terminée – on n’a rien oublié – ou du moins on ne sait pas ce qu’on en a oublié – ça se passe là

ici c’était en juillet 2008 (indique la référence) – en réalité (je ne sais pas trop ce que ça peut bien vouloir dire réalité mais ça ne fait rien)  j’étais en train de me dire deux choses : d’une part, que au toit de cette maison dans laquelle je vécus des années cruciales de cette vie (toutes les années sont cruciales), il y avait ici une lucarne – sur ce pan de toit  (alors qu’il en était une d’un des trois autres greniers qui composait l’étage (outre les chambres de mes deux sœurs) (les fenêtres des chiens dits assis) (on a du la virer mais on a posé des vélux (3) aux autres greniers –

ici ce sera en mai 2011 (haie mieux taillée, arbres assez nombreux – on aperçoit au fond la maison des B.)

de mon temps comme disent les vieillards il n’y avait qu’un seul poirier au milieu de la pelouse, lequel ne donnait rien sinon des fruits comme le bois durs – peut-être est-ce l’un d’entre eux (août 14) qui dominent les autres ?

les fenêtres n’étaient pas de cette eau, ici elles semblent ne pas s’ouvrir sinon en glissant dans leur plan – j’agonis ce genre d’ouverture – ça tombe bien, je m’en suis allé de ces lieux en soixante treize (juin 15)

je n’avais pas vingt ans – le volet à peine entrouvert au premier sur l’image précédente est celui de ma chambre (ex-cuisine, ex-chambre verte – vaguement le sentiment d’avoir déjà déployé cette géographie ici) – haie furieusement bien taillée avoue quand même

juillet 2017, l’un des troènes semble fatiguer – mars 2018 :

décidément on ne verra personne aux fenêtres, on ne verra personne au jardin – on s’en fiche un peu c’est vrai – parfois l’idée revient de m’y rendre, de sonner, de dire « bonjour j’ai vécu ici de septembre soixante à juillet soixante-treize, vous permettez que je regarde comment vous avez arrangé le bazar ? » – juin 2019

en face vivaient les propriétaires (image d’ouverture: la bâtisse de droite mansard et compagnie) tu te souviens de madame Thomas ? elle a passé l’arme à gauche dans les années d’alors – une vieille femme assise à sa fenêtre, la mère de l’huissier ou du greffier enfin quelque chose on s’en fout – (quelque chose de la justice et du droit – quelque chose de propre sur soi – aisé) (on se fout de pas mal de trucs j’ai l’impression, non ?) (c’était il y a longtemps, c’est vrai) – janvier 2022

à peine quelques mois – le troène est malade, les automobiles (électrifiées ces temps-ci) la haie le mur les greniers – et les arbres qui croissent…

 

j’ai oublié, je me vois assez bien cependant y retourner, marcher dans les rues, emprunter celle-ci qui monte – je l’ai fait un jour, dans les années du début de ce siècle, alors que j’avais l’intention, ou simplement l’idée, d’entreprendre avec son épouse, quelque chose sur le voyage de Y. en voiture et au Pakistan à la fin des années cinquante – et puis les choses ont semblé partir et s’éloigner, l’épouse de Y., ainsi que lui en deux mille, s’est éteinte – avril ne pas se découvrir (j’entends bien que le moment n’est pas aux réminiscences, remémorances et autres souvenirs perdus) (le moment est abominable et je me réfugie, probablement, loin dans le temps, loin aux moments pourtant où attentats crimes meurtres et tortures étaient tout autant légion qu’aujourd’hui – la guerre est certainement le fait le plus récurrent de l’histoire des hommes – j’entends bien) – non ça ne fait rien – un raku parfois peut se revêtir de fils d’or – on aime à le savoir – pour ne pas oublier
par ailleurs et dans le même contexte-mouvement-exercice et la même volonté difficile à assouvir, on a à proposer à la revue DIRE quelque chose – on a carte blanche – alors pourquoi pas le premier chapitre de VIVRE ? – tu sais quoi, je me demande mais je continue dans le rouge quand même (celui des brigades)

 

c’est sans le savoir vraiment, mais ça ne me gêne pas et ça  continue l’épisode 10 du raku