Weldi

 

 

 

 

 

tu regarderas : les filles les femmes ne portent pas tellement de foulards – osef tu me diras, mais quand même, il y a quelque chose (ce quelque chose, si tu veux, c’est que ce sont juste des gens exactement pareils à nous, nos égaux, nos semblables) – il y a pas mal d’incises qui ont trait au travail, ordinaire – le héros Riadh (Mohamed Dhrif, parfait) est un type d’une soixantaine d’années qui va prendre sa retraite – il travaille sur le port de Tunis

(donc c’est plutôt à la Goulette – au fond,  le mont Boukornine)

je ne sais pas trop où il habite

il bosse, fait des courses, son fils Sami (Zakaria Ben Ayed, intérieur et secret) doit passer son bac, sa femme Nazli (Mouna Mejri, extra) bosse, mais ailleurs (elle enseigne, elle s’absente – elle fait à manger)

une famille – plus ou moins heureuse, mais plutôt plus – plus ou moins moyenne, ordinaire, on pourrait dire peut-être normale… Il a une amie

(sympathique Imen Chérif) ils parlent de tout et de rien comme des amis

– le travail, la famille – justement Sami a des maux de tête – graves – on cherche

on ne trouve rien et Sami suit ses cours

mais ne parle pas

parfois, pourtant, avec des amis il sort danse chante

mais rit à peine – et puis c’est la retraite pour Riadh – et puis un soir

c’est sans doute la veille des épreuves du bac, un soir Sami

disparaît : son père le cherche

on ne l’a vu nulle part – il a disparu – on ne dit rien, il a disparu – mais on comprend, on le recherche on sait qu’il n’est pas mort

que sait-on ? Rien, dit Riadh à sa femme, je t’expliquerai…
On nous expliquera, Sami a disparu, il est à la guerre, il a peut-être choisi il est parti, on ne le verra plus – un drame, Nazli n’en peut plus, son mari veut aller chercher leur enfant

et s’il meurt en Turquie ? Elle n’en peut plus, mais il s’en va

– il reviendra –

il appelle Nazli mais il ne trouve pas, personne

dit-il à son logeur, il ne trouvera rien sinon un rêve

personne (plus tard, sur internet, une image de lui, embarbé, une femme à ses côtés, voilée, et un enfant : des regards face caméra, le voilà, c’est lui Sami, il s’approche internet est coupé – c’est tout) on se souvient un peu de la chemise qu’il portait

on se souvient un peu de l’histoire de la guenon qui, enlevant une mèche de cheveux, enlève les migraines (c’est quelque part, dans le sud – c’est sur internet, on enverra le lien…) –   on riait on s’embrassait on s’aimait

adieu Sami

 

Weldi (Mon cher enfant) un film tuniso-belge de Mohammed Ben Attia (un peu de production des frères Dardenne)

Cacher ces yeux que je ne saurais voir

 

La manière a changé mais pas cette sorte d’amour qu’on porte à cette espèce d’art (le 7° (et le 8° aussi) / ces classements, numérotations, catégories et tentatives de mise en place de rangement de toutes les activités humaines, dans le but d’en tirer profit (ce mot de terreur) ont toujours quelque chose d’obscène). Quelque chose a changé, mais surtout pour ce qui est des illustrations : on prenait les nôtres, on les taillait, les ajustait et on les posait. A présent, on en prend d’autres souvent issues de la promotion des films (les films se promeuvent, les divers acteurs sont mis à contribution, on appelle ça le service après-vente (ignoble) : on dispose de « dossiers de presse » (repris mot pour mot sur des sites parce que on n’a pas que ça à faire) dans lesquels les promoteurs (comme il en est d’immobiliers) (les distributeurs) imposent quelque chose : ainsi que dans le film (un peu raté) « Corporate » (Nicolas Silhol, 2016) on les aide donc ici – et ils nous aident à les aider (wtf ?). On crache dans cette soupe, c’est vrai – mais on n’en a rien à faire, de cette soupe-là. Ici, on parle de cinéma, et la cinéaste (la Varda, si tu veux) commet des documentaires, assez fréquemment. Ici, ils sont trois à s’être associés (trois, au moins) : des têtes d’affiche, qui, par elles seules sans doute, peuvent mettre en place, pour peu qu’elles le veuillent, la production d’un film. Je me souviens d’avoir vu passer l’appel à dons qui a été pratiqué lors de la production de celui-ci « Visages, villages » (2017) présenté à Cannes cette année (images plus bas), hors compétition. Deux personnages en quête de vrais gens. Et le musicien (le cinéma, sans musique, c’est terrible et ça me procure un tel chagrin que – par exemple – les productions des frères Dardenne me blessent profondément). Tout ça pour indiquer que personne n’est dupe : on parle encore de ce qu’on veut et on n’en tire aucun bénéfice; on pose (on colle) quelque part dans la maison(s)témoin une image photographiée mais elle ne s’en ira pas  (croit-on naïvement) de sitôt; ce billet se trouve être en relation avec un autre (qui lui-même etc etc…) c’est tant mieux – et on aurait bien tort d’attendre quelque chose d’autre que ce qui se passera. Ca se posera un peu sur (ou dans, je crois, la rubrique) les murs. Comme un Décor…

 

Le film commence rue Daguerre et se termine je crois à la campagne ou à la mer (non, au bord du lac). Bizarre (et un peu décevant) qu’on ne voie pas à l’image Matthieu Chédid dit -M- mais on répare l’oubli

(une très jolie chanson (parole Robert Nyel; musique Gaby Verlor) , « C’était bien » (le petit bal perdu) il me semble (chantée par Bourvil, il me semble aussi, t’as qu’à voir) illustre aussi ce cinéma-là – 466 974 vues ce jour) (533 510 ce 3 septembre 2017).

L’un des gimmick du film (l’un des Mac Guffin si tu veux) c’est que le JR en question ne retire pas ses lunettes de soleil (ni son chapeau) et qu’il finit par faire semblant de se fâcher contre l’insistance qu’Agnès Varda met à vouloir les lui faire enlever (de quoi je me mêle). La fin du film (que j’ai trouvée dramatique) met en scène le moment où, comme Jean-Pierre Melville sur l’image  là retire ses lunettes et montre son regard, JR fait de même pour la Varda et que le monde (comme elle) voit enfin ce visage : flou. Il reprend en cela un autre même geste qu’avait joué pour la cinéaste un de ses amis d’alors (ami de la photographe d’alors) : ainsi tourne la boucle et le tour continue, et continue encore…

Ils sont trois têtes d’affiche :

le dernier JR qui ne quitte ni ses lunettes ni son chapeau colle des affiches sur les murs. C’est juste magnifique, la Varda filme et fait le clown (lui aussi), la musique accompagne précède tisse élabore illustre. Une douzaine de tableaux plus des transitions (au montage, la Varda) (comme Alain Resnais), une espèce de road-movie (c’est un genre, c’est un classement dans lequel les premières places sont prises par des fictions, « Alice dans les villes » (Wim Wenders, 1974),  et « Thelma et Louise », (Ridley Scott 1991)), on aurait tendance à dire « de vrais gens » (mais les faux ne sont qu’au cinéma, à la télévision, sur les photos…), j’en ai gardé quatre ou cinq (ce ne sont que ceux qu’on m’a proposés à travers la banque d’images dont je dispose) : quelque chose de la réalité du monde. Par exemple, je viens de trouver cette image des femmes de dockers (le formidable « c’est nos femmes » dit l’un d’entre eux – ils sont tout petit, en bas des images, les femmes comme des oiseaux à la place du coeur)un autre tableau montre Jeannine la seule habitante d’un coron promis à la disparitionun autre montre des chèvres avec leurs cornesun autre enfin un homme assis sur un bunker (il s’agit du photographe GUY BOURDIN (merci Employée) qui apparaît nu sur certaines photos d’AV des années 50)le maire de la commune où se trouve le bunker (SAINTE MARGUERITE-SUR-MER (re)) raconte comment le bunker a été poussé (ici il est très pixellisé) avant qu’il ne tombe sur la tronche d’un promeneur/touriste ou quelque chose, et comment il est resté ainsi sur la plage. L’agriculteur aux 800 hectares de Chérence dont j’ai oublié le nom (il se reconnaîtra) (l’image du hangar se trouve aussi sur le blog du Chasse-Clou lorsqu’il visita Chérence) le tout formidable de drôlerie, de sensibilité et de courage (et un peu de cucuterie comme la Varda aime à en poser, parfois). On en sort heureux d’être sur la même planète qu’eux. Avec, donc, tout notre amical souvenir.

Ainsi qu’à ce type-là, au bord du gouffre (?) de la retraite (adorable)

 

 

addenda italique 1: le rendez-vous manqué avec l’auteur (il n’est pas seul : au cinéma personne n’est jamais seul, et d’ailleurs il n’en fait plus guère) (son attitude de tête à claques mais auteur) des très aimés « A bout de souffle »(1960) et « Pierrot le fou » (1965) sans compter « Sauve qui peut (la vie) »(1979) surnommé le solitaire de Rolle dont on ne citera pas le nom sinon « peau de chien » avait l’air de cinéma, n’eût été le vrai émoi (m’a-t-il semblé) ressenti par Agnès V. (la moitié de Jacques Demy) (on ne peut pas ici ne pas le redire) – est-ce mise en scène que ces mots écrits au feutre sur la vitre de cette maison  – est-ce seulement la sienne ? – ? est-ce un coup de force tenté/perdu par la cinéaste ? s’embarque-t-on sans certitude d’avoir porte ouverte ? Je me souviens de Maurice Pialat (il ne m’aime pas non plus, je sais bien) levant son petit poing et disant aux siffleurs « si vous ne m’aimez pas, je ne vous aime pas non plus… » et j’ai pensé à ce mot voyant se dérouler cette dernière illustration (pas de visage, non, sinon celui, f(l)ou, de JR sans lunettes) et le cadeau de ses gâteaux préférés. 

Je me souviens de cette image et j’ai la réponse à la question que (nous/se) posait Patricia (on voit au reflet dans la photo, la bibliothèque de  derrière le bureau de la maison brûlée, tiens)

Le film se termine sur les deux AV et JR assis sur un banc, cadrés de dos, contemplant le lac (l’affaire n’y est pas) mais qu’aurait donné (sinon ce qu’ils en auraient fait) la rencontre ? On aimerait dire qu’OSEF (et c’est ce qu’il en est, en vrai…) mais, pour ma part, j’ai tout à fait le sentiment que cette manière d’agir est celle de certains artistes : rien à foutre des autres, du reste du monde et des rendez-vous avec les vieux amis… Une façon de voir le monde, la vie et ceux qui la font

addenda italique 2: (après en avoir discuté avec l’ami Chasse-clou taleur au bar) le solitaire de Rolle en question tape quand même les 86 printemps/balais/piges/berges ce qui fait peut-être qu’il ne désire pas qu’on soit averti de son aspect – une marque de respect des autres ? il me semble qu’il ne s’est pas présenté non plus à Cannes, à un moment… on peut gloser, mais la manière dont il se trouve présenté dans le film indique, à tout le moins, une espèce de mépris (pensé-je)