Résister (Anna Magnani 2)

 

 

je crains la redite mais c’est égal tant pis – déjà le meurtre de cette femme, en pleine rue, a été posé ici – déjà (et à des reprises nombreuses) ce verbe « Résister » s’est imposé ici – continue m’abjuré-je (oh là) (du verbe s’abjurer) (?) – je suis donc tombé au hasard sur huit images – les voici (il a fallu les capturer – dimanche prochain comme le suivant, dans les rues, on marchera contre la loi scélérate dont on sait qu’elle viole la constitution de ce pays – on le sait, on la vote – quand même… Qu’est donc devenu l’état de droit ?) 
Résister.

 

il y a quelques minutes, elle a flanqué un coup à un soldat allemand (elle, c’est Pina) et voilà qu’elle a vu Francesco s’en aller – il s’agit d’une rafle, c’est la guerre, peut-être sur sa fin, c’est à Rome – on emmène son homme, elle crie, elle crie et court et la voilà qui sort dans la rue

elle court, elle crie – le camion s’en va (il me semble me souvenir qu’il y a là le contrechamp, Francesco dans le camion qui tente de se lever, qui est rattrapé tenu empêché par ses compagnons) – elle crie « Francesco ! »
on tire

elle tombe

elle meurt

son fils se précipite (il est garçon d’honneur)

lui aussi hurle

elle meurt, il pleure

elle est morte

le prêtre la bénit –

plus tard, il subira le même sort.

 

 

qu’est-ce que tu penses ? une allégorie de la république ? une personnification, Anna Magnani qui joue Pina, de ce qui se passe – le coup de feu qui part et tue on ne sait d’où (ou on le sait trop bien). Résister.
En dédicace à Zineb Redouane et à toutes celles et ceux, mort.es estropié.es énucléé.es blessé.es dans cet état dit « de droit ». Résister.

 

Rome ville ouverte, un film de Roberto Rossellini,1945

 

  • Anna Magnani : Pina, une veuve au chômage sur le point de se remarier
  • Vito Annichiarico : Marcello, le petit garçon de Pina
  • Aldo Fabrizi : Don Pietro Pellegrini, un curé romain résistant

 

L’image d’entrée de billet est due à madame Célérier, qu’on remercie .

 

 

 

RENCONTRE

D’abord il faut que je vous dise qu’il n’y avait pas de livres chez moi, j’exagère, qu’il y avait très peu de livres chez moi lorsque j’étais petite, mes parents ne lisaient pas de livres, ils lisaient TéléMagazine ou le catalogue des 3Suisses, ou des notices de montage de maquette de bateau téléguidé. Seul mon frère avait des livres dans sa chambre, et il me semblait qu’il y en avait beaucoup, deux étagères avec une douzaine de livres chacune, derrière deux portes vitrées et coulissantes. Comme mon frère était bien plus vieux que moi (onze ans de plus), il partait la semaine à l’université, et je pouvais m’introduire dans sa chambre, avec beaucoup de précautions car le moindre changement dans la pièce serait considéré comme une faute grave, et je me souviens de monter sur sa chaise de bureau non stable, de pousser en silence une des vitrines pour dérober un Sherlock Holmes, ou un Arsène Lupin, ou un Gaston Leroux (Le Parfum de la dame en noir), avant de revenir à pas de loup le lire dans mon lit en cachant la couverture sous le drap.

De mon côté, je possédais des albums de bande dessinée, quatre ou cinq, et deux ou trois livres-disques (quand vous entendrez la clochette, tournez la page petits amis !), et aussi des volumes de la bibliothèque verte, Alice et la statue qui parle, Les Sœurs Parker et les ravisseurs. En tout, sans doute quinze livres, ce qui me semblait phénoménal. J’étais passée un jour, avec une fille de ma classe, chez ses grands-parents, sur la route de l’école, et j’avais vu chez eux la collection entière des albums de Tintin, une longue file de dos alignés, colorés, près de la cheminée, que j’avais considérée respectueusement, l’équivalent pour moi de la BNF.

En grandissant, je n’ai pu lire que des extraits de livres, uniquement grâce aux manuels scolaires. C’est dans leurs pages que j’ai lu La Conscience de Victor Hugo (en sixième, en cinquième peut-être) et que j’ai demandé à mes parents qu’ils m’offrent à Noël La Légende des Siècles, en deux tomes, format poche, un vert, l’autre violet, la plus merveilleuse des choses (je les ai encore), j’en lisais des passages à voix haute en mettant l’intonation, les pages se décollaient, et sans le vouloir je connaissais par cœur certains vers, et encore maintenant, si par hasard j’entends ou je lis « alors, levant la tête » mon cerveau enchaîne avec « se dressant tout debout sur ses grands étriers ». Ou si j’entends « elle est toute petite », je continue avec « une duègne la garde, elle tient à la main quelque chose, et regarde ».

Même avec peu d’argent, mes parents essayaient de me donner de quoi lire. Un jour ma mère m’avait ramené Poèmes à dire de Daniel Gélin (une valeur sûre, cet homme-là passait à la télévision), et pour ce livre aussi les pages se sont bientôt décollées. C’est à cette période que j’ai lu, relu, avalé un poème de Jules Supervielle.

Il y en avait d’autres, comme celui de Tristan Tzara, je le pose ici :

les fruits ruinés
les murs déchiquetés
la neige morte
les heures souillées
les pas verrouillés
ont rompu les rues
la honte de vivre
inonde mes yeux

les foyers éteints
le rire édenté
les places écrasées
la vieillesse harcelée
profilée dans l’âtre
toute la misère
pour marcher dessus
les chevaux éventrés
dans l’arène des têtes
les volets volés
les maisons ouvertes
les enfants dehors
les paroles de paille
pour seule vérité
vide matelas
pour ne pas dormir
ni rire ni rêver
le froid aux entrailles
le fer dans la neige
brûlant dans la gorge

qu’avez-vous fait qu’avez-vous fait
des mains chaudes de tendresse
avez-vous perdu le ciel
dans la tête par le monde
dans la pierre dans le vent
l’amitié et le sourire
comme les chiens à l’abandon
comme des chiens.

(Tristan Tzara, La Bonne Heure)

Mais le poème de Supervielle, c’est lui dont je voulais vous parler. Il était assez court. Me semblait magnifique. Ce n’était pas La Mer secrète. Mais je me souviens qu’il finissait par « Nous creusâmes ensemble nos fosses pour la nuit ».

J’ai grandi et j’ai eu accès aux livres autrement. J’ai pu m’acheter tous les Sherlock Holmes avec mon argent de poche sans plus les voler à mon frère, et d’autres livres aussi, souvent ceux qui me tombaient sous la main, sans direction, au hasard. Et puis j’ai travaillé. J’ai moins lu, et même arrêté de lire totalement, sauf des textes pédagogiques et des recueils de comptines. Je n’ai pas fait d’études de lettres, ce qui me donne des complexes. Ce n’est pas qu’on m’en ait empêchée, c’est qu’il fallait avoir un travail, car mon frère avait été à l’université jusqu’à ne plus pouvoir, ce qui était une charge pour mes parents. Je ne voulais pas leur peser financièrement.

Mais, lire était là, quelque chose de précieux, et écrire aussi. Petite, j’écrivais. Bref, je passe les détails.

Le poème de Supervielle, un jour, j’ai voulu le retrouver. Impossible. J’ai même racheté il y a une dizaine d’années un exemplaire de Poèmes à dire de Daniel Gelin. Il y avait bien Tzara et Claude Roy, « Jamais, jamais je ne pourrais dormir tranquille aussi longtemps que d’autres n’auront pas le sommeil et l’abri », mais pas lui. Donc, je l’avais lu ailleurs. Mais si c’était dans un manuel scolaire, comment le retrouver. Avec internet j’ai fait des recherches en ligne. Entre guillemets « Nous creusâmes ensemble nos fosses pour la nuit ». Pas de résultat. J’ai modifié mes recherches, peut-être que je me trompais, qu’il n’y avait pas « creusâmes », mais pour ce qui était des fosses j’étais sûre.

J’ai demandé parfois, quand j’y repensais, à des gens plus éduqués que moi. En résidence à l’IMEC j’ai cherché dans la bibliothèque, si grande, si magnifique, les recueils de Supervielle. Je suis montée dans les étages, tout en haut, sous la voûte de l’abbaye, là où toutes les revues sont rangées par ordre alphabétique, je ne l’ai pas trouvé.

Il y a quelques mois, ça m’est revenu ce poème, l’existence, quelque part, de ce poème. J’ai cherché et cherché encore. Je me suis demandé si je n’avais pas rêvé, réinventé un souvenir.

Enfin, ça fait longtemps que ça dure pour moi cette histoire là, plus d’un demi-siècle maintenant. Je ne sais pas pourquoi ça résonne tellement. «  Nous creusâmes ensemble nos fosses pour la nuit. » Le symbole de la solitude. La finitude. L’être humain si fragile, si animal. Je n’ai pas les capacités intellectuelles de dire pourquoi ça m’avait transpercée, et ça continue.

Ce matin (levée à 5h20, comme souvent), comme j’y repensais, j’ai cherché et cherché encore. Un seul résultat (entre temps, google me demandait si je ne voulais pas chercher fesses au lieu de fosses ?). Un seul résultat vers un pdf qui a mis longtemps à s’ouvrir sur mon ipad, au moins cinq ou six minutes (mon ipad est vieux, sa mémoire doit saturer). J’allais abandonner car ce pdf était celui d’une revue d’Amérique du sud, ALFAR, 1932, dans une langue que je ne maîtrise pas. J’ai survolé les pages, des publicités (Cada tarro de café El Chana, contiene 1.000 gramos neo de café, y un finisimo vaso como obsequio). J’ai fermé le pdf. Tant pis. Et puis je l’ai rouvert quand même. Et là je l’ai trouvé. Ensuite j’ai lu la mention La direcciòn de esta revista no devuelve los originales ni sostiene correspondencia acerca de éllos, publicando solamente trabajos rigurosamente inéditos.

Je ne peux toujours pas dire comment j’ai eu accès à ce poème au commencement. Mais il est là maintenant. Je comprends qu’il ne soit pas considéré comme un poème fondateur, comme « Je m’en allais, les poings dans mes poches crevées ». Mais il l’est pour moi d’une certaine façon.

Il y a une énigme, une double énigme, une triple énigme. Où ai-je lu ce poème, sur quel support ? Pourquoi est-ce qu’il est resté ancré en moi comme quelque chose inaccessible et en même temps possible ? Quel est ce poisson et la voix qui parle dedans ?

Je le pose ici, dans la maison[s]témoin. Peut-être que maintenant, en faisant une recherche internet, on le trouvera plus facilement. C’est quoi vos textes à vous, qui existent et qu’on ne retrouve pas, ou peu, ou mal ? Vos énigmes ?

RENCONTRE

Entourés de chandelles
Dont la flamme est fidèle
À notre chuchotis,
Nous allons aux nouvelles
Au milieu de la nuit.
Tous les couloirs sont vides
Et les dortoirs aussi
Et seules les étoiles
Collent à nos fenêtres
Comme de vieux espoirs
Toujours prêts à renaître
Et qui de leurs yeux fous
Ne peuvent rien pour nous.
Mais une voix s’élance,
Fruit mûr d’un long silence :
« Je te passe une étoile,
Éteins cette chandelle,
Donne-moi ce hibou
Contre cette hirondelle
Qui fait lever le jour.
Je change tes yeux gris
Dans une autre lumière
Pour qu’il te soit permis
De voir la terre entière
Et de mieux la juger.
Je te donne un poisson
Qui n’a pas besoin d’eau,
Toujours il ressuscite
Si on l’aime assez vite
Pour qu’il se donne entier,
Prends ce vivant objet
Et pour mieux t’en servir
Protège-toi les mains
De ces gants acérés
Qui forcent le destin. »
Alors la voix se tut,
Tout redevint l’impasse
Où plus rien ne se passe
Qui ne soit attendu.
Et dans nos froides chambres,
Soufflant sur nos bougies,
Nous creusâmes ensemble
Nos fosses pour la nuit.

 

pdf de la revue Alfar 

sons de maison

Hier quelqu’une est sortie que je ne connaissais pas — je connais maintenant tous ceux et celles qui sortent entre deux clinquements de casseroles, la fenêtre du restaurant donne sur ma cour, et je suis souvent dans ma cour, je fais les cent pas, je réfléchis, je fume ma cigarette électronique parfumée à la pastèque, je suis abasourdie par la fleur du bégonia géant, toute blanche, que je n’ai pas vue se former, je suis curieuse des appendices en formation de mon pied de houblon qui est un pied femelle (« c’est une fille ! »), — Son nom Humulus lupulus vient du latin « humus » qui signifie « terre » et « lupulus » qui veut dire « petit loup » — ce sont de futurs cônes qui sont particulièrement beaux, qui seront bientôt  particulièrement beaux

mais n’en sont à présent qu’à l’étape de commencement, je suis aussi curieuse de la silène à fleurs doubles et des grappes qu’offre l’arbre aux faisans, mais peu importe, ce serait trop long de décrire un par un tout ce que j’ai mis en pots ici, l’idée est que je connais toutes celles et ceux qui sortent dans la cour qui longe ma cour, la dame à l’accent ukrainien qui me salue toujours avec intensité, le jeune homme assis sur une palette pour fumer, la jeune fille à lunettes très discrète, mais hier cette femme que je ne connaissais pas. Elle est sortie. Elle voulait prendre la lumière, ça se voyait. Elle s’est avancée au milieu de la cour qui fait aussi office de parking, avancée à un endroit où personne parmi celles et ceux que je connais ne s’avance. Elle a regardé les toits, le ciel. Elle avait l’air surpris de cette bataille dans le ciel, les mouettes qui par moment deviennent acariâtres, et bavardes et inarrêtables. C’était comme une découverte pour elle. Elle ressemblait à une femme qui n’aurait jamais vu de mouettes. J’ai eu envie d’être cette femme qui n’aurait jamais vu de mouettes et qui découvre.  Ensuite on a entendu des pleurs d’enfants. Cette année les touristes sont très nombreux. Il y a beaucoup de familles. Il y a beaucoup d’enfants. Il y a beaucoup d’enfants qui pleurent. Pas tout le temps, mais régulièrement, ça arrive, les pleurs. Comme une idée qui se rappelle à soi. Quelque chose qu’on aurait oublié. Et j’aime cette femme, parce qu’elle ne découvre pas les pleurs d’enfants, elle les connait. Elle quitte le clinquement des casseroles et les ordres donnés qui s’étendent plus loin que la fenêtre, et elle essaye d’attraper les cris, de voir d’où viennent les cris, ça m’a toujours ému les gens qui essayent de voir. On se tord le cou. On n’est plus tout à fait soi. On désire être transformé par les ondes extérieures. Les enfants pleurent aussi à cause de ça, de l’obligation d’être là sans bouger, d’être obligé de subir l’instant sans bouger, coincés dans une poussette ou collés à une main. Les parents viennent ici parce que c’est un endroit célèbre. Les enfants n’aiment pas la célébrité. Ils trouvent ça légèrement barbant. Aussi, je suis d’accord avec eux. Et les mouettes crient sur la célébrité des lieux et elles les recouvrent de fientes blanches, laiteuses. Elles n’en ont rien à faire de nos sarcasmes et de notre façon de nous habiller, à nous, humains, surtout le dimanche matin quand les cloches sonnent. Ici, quand les cloches sonnent, il y a beaucoup de jupes plissées bleu marine, beaucoup de gens qui sentent le savon et lancent un regard assuré,  déterminé, sans rien qui marque la surprise. Je crois qu’il y a deux camps ici, et je suis du côté des mouettes et des pleurs d’enfants, à côté de mon latin qui dit petit loup, petit loup, comme un surnom gentil qu’on donne.

Beau comme le monde

 

image d’entrée de billet : le port refuge de l’épave

 

les prises de vue sont réalisées à partir d’un téléphone portable – il s’agit d’un dispositif créé pour l’occasion d’un atelier d’écriture – « créé » est un peu trop dire – en tout cas à la faveur d’un abonnement offert au claviste/rédacteur au canard de référence (ça ne se dit plus) paraissant l’après-midi (ça non plus, il ne s’agit que de la version papier dudit organe – ça n’existe plus guère, c’est « à l’ancienne ») – ou de captures d’écran via le site de journal – l’organe de presse – dépêchons – sont donc sélectionnées une ou deux images du jour afin d’en illustrer un carnet (si on aime, on peut retrouver ledit carnet (numéro VII) ici) . À cette faveur (dont on remercie encore ici la généreuse bienfaitrice), fin juillet un article au sujet d’une espèce de fait divers – ceux dont notre monde est fait (pour partie, sans doute) – raccourci sur l’économie et l’état de décrépitude (disons) de ce monde de (sur)consommables/livrables/périssables : la vie (c’est trop dire) des pauvres objets manufacturés (on appelle ça la société de consommation – ça épuise la planète : ces jours-ci, nous avons consommé plus que la planète ne peut nous offrir et il nous reste cinq mois à vivre…) (sur les huit milliards peut-être d’êtres humains que compte ce monde, deux ou trois ne mangent pas à leur faim ni ne boivent à leur soif) (est-ce vivre ?) – ces prises de vue enregistrées sur internet sont accompagnées d’une légende rédigée en anglais (qu’on peut, au besoin dissocier de l’image, mais je la laisse) : comme c’est un dialecte terrestre que ne maîtrise pas complètement la rédaction, elle se fait aider du grand frère G : apparaît donc suite à l’image la légende et sa traduction (dans une autre police, qui n’est pas du fait de ladite rédaction) traduite (sans retouche). Les images datent donc des derniers jours de juillet, recueillies ici ou là.  

 

 

 

Le bateau se nomme Fremantle Highway (nous nommons les bateaux, nous leur donnons des numéros de coque, nous les assurons et les faisons naviguer joyeusement) (nom qu’on peut traduire par « autoroute de Fremantle« ); c’est sous pavillon panaméen (au Panama, comme au Libéria, l’impôt sur les sociétés équivalent à zéro) qu’il a le droit de circuler sur les mers et les océans de ce monde; l’armateur doit être quelque chose comme néerlandais, ou chinois ou japonais (c’est au Japon qu’il fut manufacturé, en 2013 – la nationalité n’a pas tellement d’importance; les droits de passage sont acquittés en dollars); il partit de Brême (Bremerhaven, à l’embouchure de la Weser), un jour de juillet 2023, il me semble (le 25 Juillet, vers quatorze heures – heure locale), et devait rallier Port-Saïd (le 2 août, mais non), au bout du canal de Suez (souviens -toi, il y a deux ans : le plantage d’un navire de 400 mètres de long – mars 2021 – retracé ici ) avant d’appareiller pour Singapour (du côté de Ceylan – Sri-Lanka, l’incendie du X-Press Pearl

– singapourien

il va couler, t’inquiète

voilà – 20 mai 2021 (186 mètres de long…) qui a brûlé pendant quatorze jours, à onze kilomètres des côtes – pollutions de terreur, à l’avenant) .
Ici il s’agit d’un cargo de 200 mètres de long, large de trente-deux, mu par un huit cylindres développant seize mille chevaux, quarante kilomètres heure (vingt-neuf nœuds), qui transporte des automobiles (jusqu’à plus de six mille quand même) : ce jour-là, elles étaient neuves et il en emportait près de quatre mille, dont quelque cinq cents à propulsion électrique (la mode de nos jours est d’équiper les autos de batteries au lithium qui aiment à s’enflammer quand on les a chargées à fond – d’un coup les voilà qui brûlent – une mode assez dangereuse, mais qui ne fait rien n’a rien non plus) (une incidence et on n’en parle plus : dans le massif central de ce joli pays, on dispose de gisements, semble-t-il, de lithium : on va réexploiter ça, hein – ça s’appelle la start-up naichionne, et ça vient en droite ligne du progrès, lequel comme on sait le mène, ce monde, en droite ligne aussi et directement dans le mur – c’est la seule solution qui nous reste : le mur, allons-y bon train s’il vous plaît – ou pas) (une autre incidence et on n’en parle plus : c’est pourquoi la plupart des dictatures construisent autour de leurs frontières ce genre de dispositif – l’abject quarante-cinquième président des États Unis d’Amérique avait aussi ce tropisme) (bienvenue sur Terre).

Assommés de chiffres – assommés d’images. Ici le garage des autos neuves, vu du satellite du grand frère G

l’espèce de gigantisme de nos jours (qui a la plus grosse?), là celui des containers (conteneurs si tu préfères) équivalent vingt pieds (contenu : un peu plus de 40 mètres cubes)

(il existe (semble-t-il) sur Terre à peu près 230 millions de ce type de caisses).
Or donc,  le vaisseau Fremantle Highway se met à brûler ce jour là, vers vingt-deux heures (temps moyen, méridien de Greenwich) (GMT) – les 23 membres de l’équipage sont hélitreuillés, l’un de ces marins meurt – les voitures brûlent – ici quelques images

TOPSHOT – This aerial photograph shows emergency boats extinguishing a fire aboard the Panamanian-registered car carrier cargo ship Fremantle Highway, off the coast of the northern Dutch island of Ameland. One sailor died and several others were injured after a fire broke out on a car carrier ship off the Netherlands on Wednesday, the Dutch coastguard said. Rescue personnel received a call shortly after midnight (2200 GMT Tuesday) saying a fire had started on the Fremantle Highway, a Panamanian-registered ship with 3,000 vehicles on board, about 14.5 nautical miles (27 kilometres) off the northern Dutch island of Ameland. – Netherlands OUT
(Photo by Flying Focus / ANP / AFP)
TOPSHOT - Cette photographie aérienne montre des bateaux d'urgence éteignant un incendie à bord du cargo cargo Fremantle Highway immatriculé au Panama, au large de l'île d'Ameland, au nord des Pays-Bas. Un marin est mort et plusieurs autres ont été blessés après qu'un incendie s'est déclaré mercredi sur un navire transporteur de voitures au large des Pays-Bas, ont indiqué les garde-côtes néerlandais. Le personnel de secours a reçu un appel peu après minuit (22h00 GMT mardi) indiquant qu'un incendie s'était déclaré sur la Fremantle Highway, un navire immatriculé au Panama avec 3000 véhicules à bord, à environ 14,5 milles marins (27 kilomètres) au large de l'île d'Ameland, dans le nord des Pays-Bas. - Pays-Bas OUT
(Photo par Flying Focus / ANP / AFP)

On ne peut guère remorquer le navire en feu non plus que le surcharger d’eau (sinon, il coule) pour éteindre l’incendie – on attend (oncommence par annoncer trois ou quatre véhicules électriques, puis le nombre monte à près de cinq cents)

This handout photograph taken on July 28, 2023 from the Coast Guard plane and released on July 29, 2023 by the Dutch coastguards, shows a fire aboard the Panamanian-registered car carrier ship Fremantle Highway, after a fire broke out on the Fremantle Highway late on July 25, 2023, killing one crew member, and prompting a massive effort to extinguish the flames. Towing of the cargo ship on fire off the coast of the Netherlands, with thousands of cars on board, is expected to begin on July 29, 2023, even though the fire has diminished in intensity, according to the authorities, who have been trying for several days to prevent an environmental disaster. An electric car is suspected of sparking the deadly blaze and officials said on July 28, 2023 that nearly 500 of the vil y a sans doute une façon d’envisager les choses vis à vis des incendies et des voitures qui gouverne ce type de billet –  ehicles were aboard, far more than initially reported. – RESTRICTED TO EDITORIAL USE – MANDATORY CREDIT « AFP PHOTO / NETHERLANDS COASTGUARDS » – NO MARKETING NO ADVERTISING CAMPAIGNS – DISTRIBUTED AS A SERVICE TO CLIENTS
(Photo by Handout / NETHERLANDS COASTGUARDS / AFP) / RESTRICTED TO EDITORIAL USE – MANDATORY CREDIT « AFP PHOTO / NETHERLANDS COASTGUARDS » – NO MARKETING NO ADVERTISING CAMPAIGNS – DISTRIBUTED AS A SERVICE TO CLIENTS
Cette photographie prise le 28 juillet 2023 depuis l'avion de la Garde côtière et publiée le 29 juillet 2023 par les garde-côtes néerlandais, montre un incendie à bord du navire porte-voitures immatriculé au Panama Fremantle Highway, après qu'un incendie s'est déclaré tard sur la Fremantle Highway le 25 juillet 2023, tuant un membre d'équipage et déclenchant un effort massif pour éteindre les flammes. Le remorquage du cargo en feu au large des Pays-Bas, avec des milliers de voitures à bord, devrait débuter le 29 juillet 2023, même si l'incendie a diminué d'intensité, selon les autorités, qui tentent depuis plusieurs jours pour éviter une catastrophe environnementale. Une voiture électrique est soupçonnée d'avoir déclenché l'incendie meurtrier et les responsables ont déclaré le 28 juillet 2023 que près de 500 des véhicules étaient à bord, bien plus que ce qui avait été initialement annoncé. - RÉSERVÉ À UN USAGE ÉDITORIAL - CRÉDIT OBLIGATOIRE "AFP PHOTO / GARDE-CÔTES NÉERLANDAIS" - PAS DE MARKETING PAS DE CAMPAGNES PUBLICITAIRES - DISTRIBUÉ EN TANT QUE SERVICE AUX CLIENTS
(Photo by Handout / GARDE-CÔTES NÉERLANDAIS / AFP) / RÉSERVÉ À UN USAGE ÉDITORIAL - CRÉDIT OBLIGATOIRE "AFP PHOTO / GARDE-CÔTES NÉERLANDAIS" - PAS DE MARKETING PAS DE CAMPAGNES PUBLICITAIRES - DISTRIBUÉ EN TANT QUE SERVICE AUX CLIENTS
A thermal camera shows the cargo ship Fremantle Highway, on fire at sea on July 26, 2023. Coastguard Netherlands/Handout via REUTERS THIS IMAGE HAS BEEN SUPPLIED BY A THIRD PARTY. MANDATORY CREDIT. NO RESALES. NO ARCHIVES.
Une caméra thermique montre le cargo Fremantle Highway, en feu en mer le 26 juillet 2023. Coastguard Netherlands/Handout via REUTERS CETTE IMAGE A ÉTÉ FOURNIE PAR UN TIERS. CRÉDIT OBLIGATOIRE. AUCUNE REVENTE. PAS D'ARCHIVES.

ici une carte simplifiée qui montre l’emplacement où se trouvait le navire quand il se mit à brûler (ce sont des îles  situées au nord de la Hollande

fin de l’histoire : le bateau brûle toujours un peu mais on a la possibilité de le remorquer, on l’entrepose dans le port d’Eemshaven (Hollande) – c’est par là (pointillés rouges)un peu de géographie (zoom arrière) (le port d’attache, désormais, du navire est signifié du point rouge)

où il restera, dit-on,jusque’à la fin de l’année – (on attend que cesse l’incendie)

 

il y a sans doute une façon d’envisager les choses vis à vis des incendies et des voitures qui gouverne ce type de billet – les bateaux, les avions,les façons de parcourir le monde,celles de faire des affaires et du commerce – quelque chose de la vie humaine -non loin de la guerre cependant – contre le feu, le sel, les éléments – personnelle, cette façon, oui

« C’est le plus important. Tu ne crois pas ? »

Ma mère est ma maison.
Ma mère est faite de texte.
De textes.
C’est de plus en plus visible. C’est ce qui arrive avec les paysages en grands dangers, brossés par le vent, réduits à l’essentiel. Il ne reste plus que la ligne d’horizon et l’armature d’un tronc, un peu d’herbe, le bleu de la mer, c’est tout. Ce qui faisait foisonnement, la végétation dense, les ruelles, les fontaines de Trévise, les habitants et leurs déambulations, les points de vue panoramiques avec la rose des vents gravée sur une table d’orientation, les fêtes folkloriques, les processions de la fête de Saint Bernard, tout ce qui perdait le regard, les cigales la nuit, les nappes sur les tables dehors, froissées, éclairées par les lampadaires, les craintes d’orage et d’inondations, tout s’est enfui, recroquevillé, a disparu.
Il ne reste que quelques histoires droites, réduites au plus simple déclencheur. Ce sont toujours les mêmes. Il ne reste à ma mère que du texte. Elle écrit de moins en moins, et puis plus du tout. Des cartes de vœux, et je ne sais plus la dernière fois qu’elle a rempli un chèque. Ses lettres sont de plus en plus tremblantes, maintenant ce sont des chiffres qu’elle trace, elle fait ses comptes qui sont des contes, car elle ne s’appuie pas sur des données mathématiques. Je veille bien à ce qu’elle ait toujours des stylos à portée de main. Je lui ai acheté un cahier, c’est elle qui me l’a demandé, elle devrait y poser des additions, en tout cas c’est ce qu’elle désire, c’est l’outil de repérage auquel elle se raccroche.
J’ai longtemps cru que rien n’était plus éloigné de ma mère que le texte. Je disais :
elle parle pour ne rien dire
ce qu’elle dit n’a pas de sens
elle dit une chose et son contraire
elle parle pour parler
elle fait de l’air avec sa bouche et ses cordes vocales, c’est ce que j’ai longtemps cru.
En fait, elle est au-delà du texte, ce qu’on peut qualifier de prouesse.
Ou elle se trouve bien au-dessus du texte. Tout en haut. C’est lui qui la porte. Ce sont ses fictions qui la tiennent, soutiennent. Dans le paysage réduit à l’essentiel qu’elle est devenue, sa ligne d’horizon et son tronc sont ses fictions.
Elle me les répète sans arrêt.
On pourrait penser à un problème cognitif, à une maladie dégénérative, à une baisse des capacités logiques, à une perte de raisonnement, oui, beaucoup pourraient le penser, mais elle s’en fout. Elle répète. Elle ne se sent pas malade. Je vais bien, elle dit, et puis j’ai toute ma tête.
C’est le plus important.
Tu ne crois pas ?
Heureusement que j’ai toute ma tête.
C’est bien, je suis contente.
J’ai vendu la maison, je me suis bien débrouillée. J’ai été futée, heureusement.
(la maison a été vendue par obligation, ce n’est pas elle qui l’a voulu ou s’en est occupée, elle me montre le papier du notaire et m’explique qu’il vient d’arriver au courrier, c’est moi qui lui ai donné il y a six mois, nos histoires se chevauchent, parallèles qui ne se rencontreront pas, mais je veille bien à ce qu’elle ait toujours des stylos à sa disposition)
Plus son paysage se minimalise, plus j’augmente le mien, factice. J’ajoute et j’ajoute des pots sur la terrasse de cailloux cernée de murs.
Chaque matin je vais voir si le pied de houblon trouve une nouvelle direction avec sa tête de serpent. J’ai soif de lianes. Les clématites, les chèvrefeuilles et les tiges de cobée s’enroulent ensemble, selon la même chorégraphie indistincte. Les feuilles des capucines de Canaries s’élèvent, larges près du sol, réduites dans l’ascension. Le schisandra croule de fleurs discrètes qui se confondent avec des cerises, et son feuillage de soie cache un peu le géranium menthe dressé, debout. L’akébia n’en finit pas de faire de nouvelles volutes dans sa course avec les haricots géants d’Espagne. En Espagne, lorsque ma mère était enceinte de moi, elle a assisté aux processions, capuchons sombres, deux trous noirs pour les yeux, torches levées dans l’obscur, chants funèbres, et elle a eu peur. Ma mère est ma maison.

Extérieur nuit (2)

 

 

Dans ce deuxième billet, on explicite un peuplus les tenants/aboutissants ainsi que d’autres développements (plutôt en liens vers d’autres textes – plus copieux, sans doute, moins illustrés aussi) de cette histoire qui date de quarante cinq ans. Le billet se base sur quelques images capturées lors de la diffusion du feuilleton/série/film Esterno Notte sur arte  réalisation de Marco Bellochio, (qu’on peut toujours voir ici) présentée à Cannes l’année dernière (est-ce du cinéma, est-ce de la télévision, est-ce quelque chose de plateforme ? je crains que ce ne soit pas (ou plus) le débat, mais celui-ci existe réellement – et pour ma part, je préfère voir les films en salle…) Une deuxième élaboration donc. En ouverture de billet, une image de la représentation d’Aldo Moro, lequel, à une tribune du parti de la Démocratie Chrétienne dont il est, à l’image, encore le président, convainc l’assemblée du bien fondé de son travail avec le parti communiste afin de réaliser ce que la presse intitula le »compromis historique » – lequel compromis était fortement combattu et depuis de nombreuses années, par les États-Unis, notamment en la personne de Henry Kissinger (personnalité détestée par le président Moro) mais qui,alors, n’est plus aux affaires (comme on dit) – Kissinger (républicain) était conseiller spécial et ministre des affaires étrangères du précédent président étazunien  (Gérald Ford)

 

 

les divers plans de coupe dans lesquels se meut cette narration – assez chronologique cependant – m’ont particulièrement fait penser à ce que Marco Bellochio instille dans son film, cette façon de se rendre intérieur aux protagonistes – ou complètement extérieur.
Ici

rien à voir avec le reste de la vie – mais c’est là et j’adore

J’adore aussi ceux-ci

c’est la nuit – il en a passé cinquante cinq dans son réduit – et c’est le jour

une ville qu’on aime –  une espèce de creuset –

cette ville qui, vingt ans plus tôt accueillait Fellini (le cinéma, c’est important) (la fontaine de Trévi, la via Veneto reconstituée sur le plateau 5 de Cinecitta) – ici ça se déroulait sur la rive droite du Tibre, trastevere – on parlait on négociait, il ne faudrait pas croire que tout le monde était d’accord – des milliers et des milliers de contrôle

en pure perte – il faut montrer qu’on fait quelque chose (mais qu’on laisse pourrir, non) (on fait même appel aux esprits, c’est pour te dire) – le gouvernement démocrate chrétien, épaulé de ses alliés (le parti communiste ne veut pas négocier ce serait reconnaître être doublé à gauche…) (le parti socialiste veut négocier, quant à lui : ce n’est pas un allié…) – longtemps Moretti (ici à l’image, au centre – à gauche Valerio Morucci, à droite Adriana)

assez leader, disons, de l’équipe qui a mis au point l’enlèvement, la séquestration, le procès et la suite promise au président Moro, longtemps il a tenu bon : non, on ne négocie pas, non, on ne l’épargnera pas (jusqu’au 6 ou 7 mai, en discussion, dans un bar de Rome) longtemps

on ne fera rien pour que ces valets du capitalisme s’en sortent la tête haute – il s’agit d’orgueil, il s’agit de ne pas perdre la face – tandis que la police ratisse largement (ici une image d’Adriana qu’elle voit, elle-même, sur une planche de bord de voiture de police)

elle qui rêve – c’est important, les rêves, ce sont des humains qui vivent, et dorment – celui d’Adriana (il est dit qu’elle le raconte dans le livre qu’elle a écrit – non traduit en français) (quand on raconte un rêve et qu’on l’écrit, il devient une réalité quand on le cite) ce rêve

déambulation au fil de l’eau

des morts passent

ils sont là, il y Aldo et d’autres morts – sous les balles, ce sang ordinaire, obligatoire et nécessaire – cette boucherie

elle se réveille – en sueur – un mauvais rêve dans la vraie vie – le rêve du pape (tu vois, ce n’est qu’un humain comme les autres – et la nuit il rêve ou quand il dort)

martyre, Aldo ? On le laissera mourir, et on espérera que sa mise à mort sera exécutée par ceux qu’on combat : ainsi seront-ils (et elles aussi) vaincu.es…

 

 

le billet précédent Extérieur Nuit (1)

 

 

 

 

les jardins de Carthage

Le réalisteur, Youssef Chebbi.

 

Le film dont on parle ici était projeté dans une salle l’Espace Saint-Michel dont le directeur-gérant-exploitant vient de disparaître : Claude Gérard, à qui ce billet sera dédié, parce que c’est un homme qui a travaillé pour que le cinéma vive,dans toute sa diversité et notamment sa qualité politique. Qu’il en soit ici remercié.  

 

 

c’est ainsi qu’à l’habitude – les documents disponibles sont mis à contribution et profit – ils dépeignent ce que la distribution veut montrer du film –  pour ma part, comme c’est un endroit qui m’est assez cher, je suis plutôt content d’en parler – il ne fait aucun doute que le décor (Tunis, un de ses quartiers neufs – ses habitants son parler ses couleurs tout autant) est l’un des personnages principaux et participe de beaucoup à mon statut de spectateur. Nul doute non plus que ce qui est dépeint ici fait partie de toute l’Afrique du Nord, et sans doute du continent entier, et de l’emprise qui y règne de la religion sur les hommes et les femmes qui y vivent. Le titre du film Ashkal elliptique certainement peut se traduire par « formes ». 

 

 

Il ne s’agit pas d’une production exceptionnelle (quoique le pays soit assez petit et qu’il y règne pourtant une activité cinématographique assez importante ) mais d’un film noir comme on en connaît des centaines (c’est un genre que l’on aime) – un couple de policiers

une femme, Fatma et un homme, Batal

qui  enquêtent sur des faits

qui ne cessent de se reproduire : des gens s’immolent – le décor important est situé dans la banlieue de la capitale

Tunis, sur les bords de la lagune, nommé les Jardins de Carthage, un nouveau quartier voulu par la dictature précédente (incarnée par Ben Ali foutu dehors en 2011, je crois bien qu’il est mort en Arabie Saoudite) pour y loger ses ouailles – las, tout fut arrêté – ce ne sont pas ruines mais chantiers

parfaitement graphiques – les hommes s’immolent et le pouvoir fait semblant de ne rien voir – le pouvoir masculin : l’enquête se clive

Fatma veut comprendre, Batal se protège – et protège par là l’état des choses – il faut aussi dire que le père de Fatma revêt l’aspect du pestiféré : il œuvre dans une organisation »Vérité et Réhabilitation », inspirée de celle de la réalité du pays, « Vérité et Dignité » (laquelle s’est embourbée et n’a pas réussi à restaurer la confiance qu’on pouvait avoir en la volonté de faire du pays une vraie démocratie)  – de ce fait, la policière Fatma, qui travaille dans et pour un état (policier mais qu’elle voudrait de droit), est une renégate et le pouvoir l’agonit – il faut noter ce parti-pris dans le film de poser une certaine normalité : il n’est cependant pas douteux que les femmes sont très minoritaires dans les forces de police tunisiennes. Pendant que Batal souscrit à la tradition et à sa religion, à sa famille tout autant, Fatma elle travaille à élucider le mystère

Les gens brûlent.

Allégorie d’une religion qui se nourrit de ceux (et celles, mais on les voit moins) qui y croient, cette narration nerveuse se termine en un hapax apocalyptique… Une réussite sans espoir cependant

 

 

Ashkal un film (tunisien) réalisé par Youssef Chebbi

 

 

Ici Match

Dans la série amusons-nous en bricolant,
la maison[s]témoin vous offre
un numéro gratuit de la revue
Ici Match, qui traîne actuellement
sur la table du salon
(de la maison)([s]témoin).

Ce do it yourself vous parviendra
à la suite de tout téléchargement
gratuit d’icelui.

~~}      Ici Match 112 version 1

~~}      Ici Match 112 version 2

 

 

COMMENT FAIRE ?

Procédons pas-à-pas, grâce à ce MODE D’EMPLOI complet et rébarbatif :
1- télécharger
2-imprimer
3-découper selon le pointillé
4-plier comme indiqué sur les photos n°4406, 4407 et 4408 :

   

 

 

FAQ

Vous avez téléchargé la version 112/1 et elle est en noir & blanc ?
– C’est normal. À vous d’y déposer couleurs et inventions impératives.

Vous avez téléchargé la version 112/2 et elle est en couleur ?
– Oui, au cas où le matériel tinctorial vous ferait défaut, la maison[s]témoin s’est agitée de façon pigmentaire en amont.

Vous n’avez téléchargé aucune des deux versions ?
– Reportez-vous à l’alinéa 616 de votre contrat initial. Zoum zoum.

 

******

Quelques illustrations additionnelles et supplétives en plus ci-dessous  :

   

   

   

C’est à vous, allez-y !

 

 

 

c’est une affaire d’adolescents, au début ils ont dans les quinze ans, à la fin près de vingt – ils parlent assez librement semble-t-il de la vie, de l’amour, des suites et du reste – comment c’est une vie ? comment ça se commence ? qu’est-ce qu’on y voit, quand elle est ouverte (on commence à se connaître par corps, on se défie, on s’adore) ? – il y a quelques couples qui se forment, ou se défont (hommes, femmes, ou alors pas encore) – la musique surtout : c’est un film magique (bon, on s’en fout de la magie mais ça donne une envie de vivre et de se battre et d’être : tout ce qu’il semble que les ans érodent mais non – vazy ont-ils coutume de dire n’importe où n’importe quand hein, c’est ça)

le dossier fait parler le réalisateur (Jonàs Trueba – je ne suis pas sûr d’en avoir parlé ici, un autre de ses films – assez magnifique aussi (le dvd m’en a été offert par A. ) (encore merci) Eva en août – j’en ferais chronique dans Madrid Ville&Cinéma dès que possible – si je peux, j’ai pas mal de pain sur la planche ces temps-ci – notamment le 40 de François Bon) – ici présentés donc huit des personnages qui peuplent ce film formidable – on trouve ces vignettes sur le site du distributeur, elles sont ici détaillées dans l’ordre de mes préférences

un des participants, assez solitaire, sensible, frêle peut-être, extra – un de la classe, un de ceux qui voyageront plus tard, le plus attachant qui tombe en amour de celle-ci

adorable de spontanéité – en vrai tous les acteurs (et les actrices) sont bien – en vrai aussi, si elles (et ils) jouent un rôle, la distinction du film fait en sorte de nous faire sentir qu’il se pourrait que ce ne soit pas exactement le leur – c’est une vraie merveille – ici le rôle principal peut-être

puis son chéri qu’elle rencontre durant le temps du film

sont-ce des acteur.es ou des personnes vivantes ? La limite est toujours, et où que ce soit dans quelque film que ce soit, dans quelque réalité qu’on traverse, cette limite est trouble – ici tout autant –

sensible, adorable aussi et les questions qu’ils elles se/nous posent, celles que nous posons encore ? Que nous posions alors? Est-ce que tu crois qu’on peut oublier franchement ?

beaux et belles comme des dieux – on se cherche, on se trouve (on se prend,on se déprend)

c’est de cet humour-là dont il s’agit – on adore ça parce que c’est vrai, c’est juste, c’est clair et franc – formidable

mais oui, changer le monde, rien de moins – cette ambition saine et splendide – une vraie merveille…

 

Qui, à part nous ?  (Quien lo impide ? en espagnol : qui nous en empêche ? Mais non, personne, allez-y, foncez !!!) Un film (formidable) de Jonas Trueba ( le film passe comme un rêve ; il dure trois heures quarante, il y a deux entractes, on s’en fout, on reste, on revient, on va fumer (ou autre) on fait ce qu’on veut, nous sommes dans un pays libre semble-t-il), on sort cinq minutes, on reprend sa place, s’il y avait le bruit de la croix de Malte qui entraîne la pellicule on n’en serait qu’à moitié étonné – cette vie, cette vie magnifique…)

Artisteries 5

 

 

 

faut-il croire que le syndrome contemporain des « séries » m’ait à mon tour contaminé ? (contaminé est un mot « à la mode » comme disait le lombardidier) (on ne sort pas les fusils, non, mais enfin…) (j’agonis pourtant les séries : elles nous racontent des histoires et les histoires, comme on sait peut-être, ne font pas avancer la vérité) (elles ne nous disent rien) (encore que  celle-ci (la vérité) ne soit pas non plus un but existentiel) (chacun.e fait ce qu’il peut : j’essaye de ne pas (me) mentir) (je suis sur d’ardents charbons : j’en termine et je n’ai rien écrit encore…) peu importe ces scrupules de puceau (ce genre de métaphore me ravit) (ou de pucelle, soyons justes) (je suis plutôt adepte de la sincérité) : ici le cinquième volet d’une espèce de recherche dont je ne saisis pas parfaitement la problématique, on verra, mais qui constitue cependant la trame, le tissu, le fond ou le décor d’un film The Artist dont je tente, par ces billets, d’analyser la teneur. Dans cette maison, qui plus est, j’ai déjà donné pas mal de génériques : je continue…
Le cadre est celui des images, et notamment, de leur révolution expressive : il s’agit de comprendre comment, ou en quoi, le son apporte quelque chose d’autre au cinéma (aux images de cinéma) – et quoi si possible. Le dessin est en creux : j’ai opté pour recenser les diverses options qui dans le film-même indiquent des sons mais ne passent pas par le bruit, ou l’ouïe : dans ce sens-là (aux deux sens) (on ne va pas tarder à s’y perdre : mais non) on analyse ici les génériques qui opèrent dans le film. Il en est un au début, plusieurs intérieurs (traités ailleurs), et un à la fin. De celui du début et de celui de la fin, il n’y a guère à dire : ce sont des nécessités pour tout film (nécessités juridiques, notamment : on crédite ainsi telle personne d’une participation à telle profession, et de ce fait, cette personne exerce cette profession et devient ce qu’elle prétend être). Ces indications pour parler des génériques intérieurs à la narration proprement dite du film. Ailleurs, les génériques qui investissent Peppy Miller dans son rôle de premier plan.

On trouvera ici le générique (long comme le bras, in extenso) du film.

  1. Générique de début.

Je ne pose que deux des cartons qui le composent : mettons le titre

on le voit : la police de caractère (probablement quelque chose de vieillot), une esthétique à la « Harcourt » qui réfère directement au temps de la diégèse (la lumière qui vient d’en haut à gauche, un spot qui produit une espèce d’ellipse) et puis les postes et les noms

(on remarque cependant aussi que les prénoms figurent ici à chacune des lignes, ce qui n’était pas le cas dans les génériques que singe celui-ci) (il y a beaucoup d’emprunt de tous ordres dans le film, des citations ou des plagiats, la mesure est difficile à trouver mais on s’en fout) (à peu près). Le carton directement suivant expliquera

Pourtant j’évite par là de parler de la musique qui elle aussi entame une narration : comme une ouverture de grande production (il faudrait analyser les musiques du film qui soulignent – surlignent, grasseyent, abondent –  tous les effets). Cette musique est présente tout au long du film, sauf dans la séquence (sonorisée) du rêve de George (les images de ce rêve ici).

2. Générique de fin.

La liste des artistes donc (les comédiennes et les comédiens : sans le dire, mais en l’explicitant quand même, les places respectives) réalisateur, producteur puis les artistes:

qu’on va tous citer (pour finir par le chien – l’ordre est sauf)

il continue par nombre de prestataires techniques (j’abrège quand même) pour en arriver aux mentions obligatoires des œuvres dont on s’est servis pour la réalisation du film, et notamment les musiques (Edward est le prénom à l’état civil de Duke)

(la musique additionnelle si on peut dire est due à Ludovic Bource : le musicien de pratiquement tous les films du réalisateur)

Plus loin :

on voit l’emprunt d’un des films, « The mark of Zorro » (Fred Niblo, 1920) avec Douglas Fairbanks dans le rôle (formidable) dont on voit quelques images lors de la scène où, plus tard, George détruit les films dans lesquels il a joué sans doute, y met le feu et manque de mourir (on pourrait gloser sur le fait que les copies qu’il détient sont flamme (on est 1932, semble-t-il) et qu’elles devraient prendre feu sans doute en explosant, le tuant sur le coup, mais on est et on reste au cinéma).

Viennent ensuite les dédicaces :

(Paul Rassam est l’oncle (producteur de cinéma à Hollywood : ça aide) de Thomas Langmann, Gilbert Marouani (agent de talent dit wiki – décédé en 2016) d’autres connaissances sans doute dont, pour le réalisateur, le footballeur à la main d’or…)

Enfin, à la fin de la fin, une autre dédicace à un musicien (collaborateur sur les OSS 117 du réalisateur) qui vient de décéder au moment de l’exploitation du film.

Présenté à Cannes en 2011, « The Artist » y fait assez bonne figure, puisque Jean Dujardin y obtient le prix d’interprétation masculine (rappelant en cela celui de Jean Yanne en 1972 pour son interprétation dans « Nous ne vieillirons pas ensemble » (Maurice Pialat, 1972) (montage Arlette Langmann, l’épouse de Maurice Pialat, production Jean-Pierre Rassam, l’oncle de Thomas Langmann)) – (une espèce de bonus de nationalité j’ai l’impression) (président du jury: Robert De Niro) . Il semble que ce soit à Cannes, cette année-là, que le film ait été acheté par la maison des frères Weinstein (de si #metoo sinistre mémoire). Poussé par elle (assez (probablement la plus, alors) puissante) dans le monde étazunien (et donc international) du cinéma, il y obtint les oscars du meilleur film, réalisateur, premier rôle et un nombre impressionnant de prix ailleurs dans le monde. D’un budget de 12 millions d’euros, le film en a rapporté 130 au box-office mondial.

 

ici les divers éléments des artisteries qui composent cette recherche :
artisteries 1
artisteries 2
artisteries 3
artisteries 4